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Intervention en Assemblée

28 juin 2010 – Laurence Vichnievsky pour le groupe EELV/Poc

 

Monsieur le Président, chers collègues,

Lors de la première plénière, j’ai entendu une élue de cette assemblée me qualifier de caution, votre caution plus précisément.

Permettez-moi de répondre d’un mot qui fera le lien avec la présentation de cette délibération relative à la transparence des relations de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur avec ses partenaires financiers.

Je ne suis la caution de personne ; je crois que chacun a compris ici que je me laisse difficilement enfermer, encore moins par les miens.

En revanche, la transparence et l’éthique sont au cœur des fonctions que j’exerce en qualité de magistrat mais aussi d’élue puisque ces deux valeurs ont été les fers de lance de la campagne du mouvement Europe Ecologie aux élections européennes comme aux élections régionales .

Ces valeurs se sont traduites dans le programme de EE par des propositions concrètes pour une meilleure gouvernance de la région.

Je rappelle que la reprise de certaines de ces propositions, dont celle relative à plus de transparence de la région avec ses partenaires financiers a conditionné notre accord de fusion .

Notre région a initié le mouvement qui se dessine aujourd’hui dans toutes les régions françaises puisque dès le 26 mars, notre collectivité a décidé de prévoir que des critères éthiques seraient intégrés aux cahiers des charges des consultations bancaires.

Il s’agissait d’aller plus loin.

Aussi je me félicite de la mise au vote aujourd’hui d’une délibération dont l’objectif est de contribuer à la lutte contre les paradis fiscaux et dont le groupe EELV a pris l’initiative. Cette présentation commune aux groupes socialiste et Europe Ecologie traduit également une nouvelle gouvernance de notre région, associant davantage les différentes composantes de la majorité dans le cadre d’un véritable partenariat.

En cela, Monsieur le Président, je veux bien être votre caution.

Et je veux évoquer le contexte que nous connaissons actuellement en France, largement préoccupant : trop d’affaires de corruption, qu’il s’agisse d’élus, de fonctionnaires ou de salariés de nos grandes entreprises, que cette corruption soit active ou passive, trop d’affaires de fraudes fiscales.

Les récentes révélations concernant les passe-droits, les privilèges indûs ou au moins indécents, les avantages en nature dont bénéficient beaucoup de ceux qui nous gouvernent et la confusion des genres à laquelle ceux-ci participent, laissant planer le soupçon que nos puissants pourraient être aidés dans leur volonté de dissimuler leurs avoirs pour les mettre à l’abri dans des territoires dont nous réprouvons officiellement les pratiques, sont indignes d’une démocratie et décrédibilisent la « République irréprochable » voulue par le Chef de l’Etat.

Faut-il rappeler que selon l’ONG Transparency International, la France n’est que 24ème dans la lutte contre la corruption ?

Et nous savons combien l’existence des paradis fiscaux facilite les processus corrupteurs.

La France continue à donner une image dégradée de sa classe politique et de son administration publique : c’est cette image qui écarte nos concitoyens des urnes alors qu’il n’y a pas d’exercice plus noble que l’exercice politique : servir l’intérêt général

Chacun comprend aisément que cette situation est encore plus intolérable en temps de crise et que la collectivité régionale devait réagir.

En temps de crise, l’exemplarité prend toute sa dimension et nous savons à cet égard le rôle détestable joué par certains établissements financiers.

Vouloir, comme le veut la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, travailler avec des partenaires financiers transparents et responsables n’est pas neutre : c’est notre manière à nous, modeste mais volontariste, de ne pas cautionner un système qui permet de faire sortir du circuit de l’économie réelle des milliards d’euros en les soustrayant à l’impôt mais aussi à l’investissement non spéculatif et à la rémunération du travail, favorisant ainsi, et de manière paradoxale, la crise que nous vivons et l’appauvrissement de nos états quand il ne s’agit pas de leur faillite.   

Nous allons ainsi concrétiser nos annonces de campagne et les traduire dans le cadre des compétences qui sont les nôtres.

De quoi s’agit-il ?

Le contenu de la délibération

La décision de contracter avec un établissement bancaire ou financier sera désormais appréciée en tenant compte des relations entretenues par cet établissement avec les territoires dits « non coopératifs » les paradis fiscaux en d’autres termes dont une liste a été publiée par le gouvernement en février 2010 et qui comprend 18 états à ce jour.

La région devra aussi tenir compte des procédures et outils mis en place par les candidats pour lutter contre le blanchiment, la corruption et la fraude fiscale

Tout cela ne se fera pas du jour au lendemain, bien sûr et il s’agit, dans un premier temps de demander des informations à ces établissements ;

Dès que la loi le permettra, il s’agira d’exclure tout partenariat ou marché avec des établissements concernés par des activités directes ou indirectes dans les paradis fiscaux.

Ces mesures, non contraignantes pour l’instant, sont aujourd’hui largement symboliques mais on peut en attendre beaucoup au plan pratique car il faut bien comprendre que beaucoup d’informations jusqu’ici confidentielles vont désormais se trouver sur la place publique et que le monde de la finance tient à sa réputation, très largement mise en cause ces derniers mois.

Croyez-moi, et j’ai un tout petit peu d’expérience dans ce domaine, l’effet préventif ne se fera pas attendre : le vote de cette délibération conduira les établissements financiers à faire preuve de plus vigilance, tant à l’égard de leurs propres partenaires que de leurs investissements.

La Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, tout comme l’IDF et la Bourgogne ouvrent la marche ; en ces temps de rigueur pour les finances publiques, l’évasion fiscale est un scandale et nous devons montrer l’exemple.

Nous répondons à une attente forte et on ne peut plus légitime de nos concitoyens ; aussi, je ne doute pas que ce texte sera voté à l’unanimité.

Je vous remercie.