La part de responsabilité du gouvernement UMP dans la suppression du Harcèlement sexuel du code pénal

Libre opinion :

Vendredi dernier, le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions réprimant le harcèlement sexuel dans notre Code pénal. Cette suppression, si elle est une épreuve douloureuse pour toutes les victimes, était logique, tant ce texte était flou et imprécis. Il n’en a pas toujours été ainsi, comme l’explique bien cet article de Maître Eolas. Reste que depuis la loi de modernisation sociale de janvier 2002 (article 179, et le Conseil constitutionnel n’avait alors pas étudié cette disposition, n’ayant pas été saisi), le harcèlement sexuel était défini comme : « le fait de harceler autrui, dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle ».

En 2009, il y a pourtant eu une occasion unique pour changer la disposition mal rédigée qui allait être censurée. C’était pendant les débats sur la Proposition de loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes.

La proposition de loi déposée en novembre 2009 par les députés disposait ainsi dans l’article 19 de cette loi, que « Tout agissement à connotation sexuelle subi par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant constitue un agissement de harcèlement sexuel. Tout agissement de harcèlement sexuel est interdit. » Cet article était voté à l’unanimité par l’Assemblée nationale, sans discussion lors du débat sur le texte en février 2010.

Mais lors de son passage au Sénat au mois de juin 2010, le gouvernement par la Secrétaire d’Etat Nadine Morano et le rapporteur du texte, le sénateur UMP François Pillet ont souhaité enlever cette proposition. Selon l’amendement 45 déposé par François Pillet cette définition, pourtant nettement plus précise présentait « par son imprécision, un risque de contrariété au principe constitutionnel de légalité des délits et des peines. »

Le mercredi 16 juin 2010, Nadine Morano, Secrétaire d’Etat chargée de la famille et de la solidarité, chargée du dossier, soutenait cet amendement en réunion de la commission des lois au Sénat « s’agissant de l’article 19, la qualification par le juge de la connotation sexuelle du harcèlement est contraire au principe de légalité des délits et des peines. Il faut veiller à ce que le juge se prononce sans risque d’arbitraire ».

Sans discussion, le 24 juin 2010, le Sénat entérinait cette amendement.

Un peu moins d’une semaine après, le texte revenait à l’Assemblée nationale. En commission, puis dans la discussion, les député-e-s Martine Billard et Daniel Goldberg retiraient leurs amendement, sous la demande insistante de Nadine Morano qui arguait, se trompant cruellement, que cette modification pouvait être contraire à la Constitution. Nadine Morano promettait également sur le harcèlement, « un débat plus approfondi pour apporter de véritables réponses » (voir la discussion).

Le 8 septembre 2010, l’Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail, dans une lettre très documentée à Nadine Morano, s’était alors émue des conséquences de cette modification par le Sénat, sous l’impulsion du gouvernement. Peut être auraient-elles dû être écoutées à l’époque. Et on serait curieux d’avoir les explications de l’ancienne Secrétaire d’Etat.

Pierre Januel

2 commentaires pour “La part de responsabilité du gouvernement UMP dans la suppression du Harcèlement sexuel du code pénal”

  1. Le Conseil constitutionnel n’a rien trouvé à redire à l’article 179 en 2002 car il ne l’a pas examiné (sa saisine portait seulement sur les articles 96, 101, 107 (censuré), 108, 134, 137, 158, 159, 169, 170 et 216).

  2. J’ai donc modifié l’article

Remonter