6) page 115 Propositions
refonte entière des trois premiers points remplacés par
« Généralités
o Redéfinition claire du rôle et de la fonction de chaque magistrat et des fonctionnaires de justice
o Prise en compte des responsabilités et amélioration de la réparation des erreurs judiciaires
o Développement de la participation citoyenne dans toutes les catégories d’affaires, et intégration des juges de proximité comme juges d’instance suppléants à compétence normale
o Casser la logique de la cooptation d’une caste de gestionnaires productivistes par une réforme du CSM lui conférant un caractère pluraliste et représentatif de la société, voire le transformant en Haute Autorité Judiciaire
o Lancement d’un débat sur la réforme des modes de gestion financière de l’État introduit par la LOFT et ses impacts sur la justice
o Doublement du budget de la justice, outre la prise en compte des transferts de personnel.
Justice pénale
o Mise à plat du fonctionnement du système judiciaire pénal bouleversé par des décennies de harcèlement législatif incohérent, redéfinition des rôles, simplification des procédures, participation citoyenne, et en particulier :
- Adoption du modèle européen de justice pénale par l’instauration de la légalité des poursuites (le magistrat du parquet compétent doit enquêter sur toute plainte et doit saisir un juge de la culpabilité sur toutes les « affaires poursuivables « , sauf à mettre sa responsabilité personnelle en jeu) dont les corollaires sont la suppression du juge d’instruction et de la possibilité pour les personnes privées de mettre l’action publique en mouvement, ce qui concourra aussi à la dépénalisation de la société, ainsi que des règles objectives d’attribution individuelle des affaires à chaque magistrat et des règles de gestion des carrières protectrice des interventions du politique,
- scission de la recherche de la culpabilité et du choix de la sanction, l’aveu de culpabilité justifiant un traitement pénal obligatoire ne pouvant résulter que de la déclaration faite à un juge avec possibilité de l’assistance d’un avocat comme l’exige la CEDH, la sanction, classique ou alternative, pouvant résulter d’un accord ultérieur avec le parquet
- Transfert des prolongations des gardes à vue à un magistrat du siège saisi par le parquet
- Rupture de la culture de soumission du ministère public au politique par l’inscription dans la loi de l’interdiction de donner des instructions individuelles
- Abrogation des directives de politique pénales, toute infraction poursuivable devant être poursuivie comme dans les pays voisins de la France (Italie, Allemagne, Grande Bretagne etc.)
o Création de pôles régionaux d’enquêtes et de poursuite ayant compétence exclusive sur leur ressort s’étendant sur une ou plusieurs région de programme, pour la poursuite et le jugement des affaires de grande criminalité et de délinquance organisée, crapuleuse comme financière, comportant autour d’un parquet spécialisé des enquêteurs détachés des services de police judiciaires et des administrations intéressées. Chacun de ces pôles sera dirigé par un magistrat ayant rang de procureur général indépendant des autres structures judiciaires locales ou régionales
o Rattachement organique des personnels et des services spécialisés de police judiciaire au ministère de la justice, remplacement des officiers de police par des greffiers en chef comme officiers du ministère public des tribunaux de police. Réaffirmation du droit exclusif du Procureur de la République de diriger la police judiciaire, renforcement de ce pouvoir par le droit nouveau de déterminer précisément les moyens de police judiciaire affectés à telle affaire ou à telle catégorie d’affaire particulière. Réaffirmation du droit du magistrat de choisir individuellement les OPJ qu’il saisit. Interdiction exprès aux OPJ de donner des informations sur les affaires qu’ils traitent à toute autre personne que les magistrats du parquet dont ils relèvent et que leur chef de service, qui lui-même ne pourra en informer que les magistrats
o Unification des procédures et des juridictions relatives à l’exécution des peines
o Réduction du nombres des infractions pénales, et parmi celles-ci de celles qui sont punies d’emprisonnement. Ouverture d’un débat sur la dépénalisation des stupéfiants tenant compte de l’échec de la prohibition »
puis on reprend sur
[o Simplification des procédures ….]—-
Motifs: sortir du système monarchique, repris par l’Empire, puis par la République, et de la logique du tout-pénal dès que quelqu’un veut se plaindre de quelque chose.
La fiche reprend la position traditionnelle de la droite comme des différents gardes des Sceaux socialistes sur la notion de politique pénale dirigée par le gouvernement, qui pour moi, et mon syndicat, est une aberration dangereuse. La politique pénale c’est en creux la politique des classements sans suite, c’est à dire des affaires qu’on abandonne… Aujourd’hui, par exemple, la plupart des parquets ne poursuivent plus les infractions au droit du travail, sauf le travail clandestin et les accidents graves. Le TTR (traitement en temps réel) de la petite délinquance urbaine et de la délinquance routière a bouffé tous les moyens. À partir du moment où l’on retire au parquet l’opportunité des poursuites, et que l’on individualise la réponse pénale comme l’exige la CEDH, il n’y a plus de place pour une politique pénale quelconque, c’est une notion qui disparaît « de facto ». Il n’y a plus qu’un constat des pratiques à dresser.
En démocratie la politique pénale est déterminée par le législateur lorsque il vote le code pénal. Quitte à moduler de façon très diversifiée le traitement pénal une fois la culpabilité établie, ce qui suppose, dès ce stade, l’intervention d’un juge et la possibilité d’assistance d’un avocat, ne serait-ce que pour respecter la CEDH. Quitte aussi à rappeler qu’il y a beaucoup trop d’infractions pénales dans le droit français, et qu’une société ne se gouverne pas à la loi pénale.
En démocratie le gouvernement n’a pas à être informé des affaires en cours autrement que par le garde des Sceaux via les parquets, responsables la police judiciaire et de l’action publique. On pourrait même douter qu’il ait à être informé des affaires avant qu’elles ne soient jugées.
Les Italiens ont fait » manu polite » sans juges d’instructions parce que leur garde des sceaux n’avait pas la prétention de conduire une politique pénale et n’avait pas le droit de donner des instructions individuelles. Et aussi parce qu’en Italie le politique n’intervient pas dans la carrière des juges et des procureurs.
La fiche est également faible sur les rapports police justice, avec quelques erreurs factuelles (par exemple la PJ est, théoriquement, déjà sous l’autorité des parquets) tous les problèmes que posent les GIR co-pilotés (c’est peu de le dire) par les préfets, et les nouveaux textes de procédure pénale. Actuellement la justice ne fait qu’avaler et digérer ce que lui apporte des services d’enquêtes, services sur lesquels elle n’a jamais eu aussi peu de prise dans l’histoire de France. Il faut redonner aux parquets la direction effective de la police judiciaire, notamment par la possibilité de fixer les priorités d’emplois et le nombre des enquêteurs affectés à telle ou telle affaire ou catégorie d’affaires et par la création, à l’italienne de pôles régionaux de lutte contre la criminalité et la délinquance organisée regroupant magistrats du parquet, policiers, gendarmes, douaniers, inspecteurs des impôts, du travail, etc. Cela ne veut pas dire que certaines réformes récentes ne soient pas techniquement justifiées.
Enfin la pénalisation des stupéfiants est une absurdité du point de vue même de l’économie libérale : la prohibition a échoué, comme prévisible, et ne sert plus qu’à détourner vers l’économie souterraine des énergies et des talents qui sont perdus pour l’économie des quartiers et pour l’intégration positive de beaucoup trop de jeunes.