Réaction de l’ASPMP, l’APSEP et le SMEP à la proposition de la mission parlementaire.
Réaction de l’ASPMP, l’APSEP et le SMEP à la proposition de la mission parlementaire conduite par Mr Garraud, député, de création d’un Centre Fermé de Protection Sociale.L’ASPMP, association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire, l’APSEP, association des professionnels de santé exerçant en prison et le SMEP, syndicat des médecins exerçant en prison, qui regroupent les professionnels de santé exerçant dans l’ensemble des établissements pénitentiaires, s’étonnent et s’inquiètent de la proposition de création d’un Centre Fermé de Protection Sociale.
De quoi s’agit-il exactement ?
D’une structure à statut indéterminé (ni prison, ni hôpital) où seraient enfermés, pour une durée indéterminée, le cas échéant à vie, les auteurs de crimes à l’issue de leur peine d’emprisonnement, dès lors qu’ils seraient considérés comme dangereux criminologiquement.
Qu’entend-t-on par dangerosité criminologique ?
Le risque de commettre une infraction pénale (délit ou crime), dans le cas qui nous occupe de récidiver.
Il s’agit donc d’une proposition de maintien en détention non pour une infraction commise mais pour une infraction virtuelle et incertaine, pour un risque et non un acte. De surcroît, cette détention serait fondée sur une évaluation de la dangerosité criminologique basée sur des expertises psychiatriques et des outils prédictifs.
Or, les outils prédictifs sont encore l’objet de recherches et se limitent de toute façon à des réponses de type probabiliste. Ce sont pour la plupart des outils épidémiologiques non applicables aux cas individuels.
En outre, les expertises psychiatriques et psychologiques ne s’inscrivent pas dans une démarche criminologique ; elles renseignent sur le fonctionnement psycho-relationnel de la personne et les potentialités thérapeutiques. Les experts s’accordent du reste sur l’impossibilité de déterminer avec certitude si une personne est susceptible ou non de récidiver ; la définition du risque comporte une marge d’erreur importante.
C’est donc le principe même de telles structures que nous récusons, véritables lieux de relégation qui viendraient se substituer en fait à une peine de réclusion criminelle à perpétuité.
Rappelons que le meilleur moyen de prévenir un risque de récidive criminelle est, encore et toujours, la préparation de la sortie de prison dès l’incarcération ainsi que les aménagements de peine dont la libération conditionnelle, assortis de mesures d’accompagnement global, de soutien social et de contrôle à la sortie de prison. Ce qui suppose évidemment la mise à disposition de moyens adéquats. Rappelons enfin que si une personne présente des troubles psychiatriques qui la rendent dangereuse pour elle-même ou autrui, il existe d’ores et déjà des structures de soins qui peuvent la prendre en charge. La capacité de ces structures médicales peut être augmentée afin de demeurer dans le champ du soin, ce qui suppose bien entendu, là encore, des moyens adéquats.
Le 31 octobre 2006
Les Présidents, Dr Catherine Paulet, ASPMP, Dr Patrick Serre, APSEP, Dr François Moreau, SMEP.
P.S. :
– Contact : catherine.paulet@free.fr
- Texte issu de ACP N°16 – ARPENTER le champ pénal 06/11/06 – Lettre d’information sur les questions pénales et criminologiques – Directeur de la publication : Pierre V. Tournier