La biométrie

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La biométrie

Présidence de M. Christian CABAL, Député de la Loire

Ouverture par M. Christian CABAL,
J’ai le plaisir de vous accueillir dans cette salle Lamartine où nous allons commencer l’audition prévue dans le cadre des travaux de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST). L’OPECST est une structure commune à l’Assemblée nationale et au Sénat dont le but est d’enrichir et de faire progresser la réflexion au plan scientifique et technologique, d’effectuer des analyses et des évaluations sur des domaines précis, et de formuler des propositions ayant notamment des incidences sur le plan législatif et/ou réglementaire.

Cette audition constitue donc un point d’étape de la réflexion de l’Assemblée nationale et du Sénat concernant la problématique de la biométrie. Celle-ci s’inscrit dans le suivi du rapport que j’avais eu l’honneur et le plaisir de présenter, il y a près de trois ans, après une série d’auditions et de visites auprès des différentes instances en charge de ces questions, ou utilisant ce système ou ces procédures. Ce rapport a pris en compte des observations datant parfois de quatre à cinq ans. Depuis, on constate des évolutions de niveau moyen au plan technique, mais de niveau plus élevé au plan des incidences sociologiques et réglementaires, en raison des préoccupations singulièrement aiguës des pouvoirs publics concernant la prévention du terrorisme et de différentes formes de délinquance. On observe donc une évolution plus ou moins rapide de plusieurs dispositions, même si l’Europe de l’Ouest reste singulièrement en retard dans ce domaine par rapport aux États-Unis et à d’autres pays du continent américain.

Cette audition publique constitue un état des lieux, qui permettra d’éclairer les pouvoirs publics qui sont sur le point de proposer des évolutions législatives, notamment sur la carte nationale d’identité dont les perspectives de modification approchent à grands pas. II était nécessaire, trois ans après, de procéder à une mise à jour des différents domaines ayant trait à la biométrie, d’autant que depuis 2003, la fraude documentaire s’est développée dans de multiples circonstances et situations.

On pourra ainsi éclairer la représentation parlementaire qui a récemment présenté deux rapports s’inscrivant de façon conjointe et connexe sur la problématique de la biométrie : celui de M. Pierre Lasbordes, Député, vice-président de l’OPECST, remis au Premier ministre sur la sécurité des systèmes d’informations et celui de M. Jean-René Lecerf, Sénateur, rapporteur de la mission d’information du Sénat sur l’identité intelligente et le respect des libertés. Le législateur a la volonté d’améliorer les textes déjà existants pour renforcer les moyens de lutter contre les différentes formes de délinquance liées à l’identité et à l’expression de cette identité. Des initiatives concernant l’utilisation de techniques biométriques ont émergé dans presque tous les pays développés et dans des pays moins développés. Il était indispensable de faire le point, sur un plan scientifique, des différentes techniques, et des observations auxquelles elles ont donnés lieu.

Les recommandations du rapport

Le rapport que j’ai rendu préconisait plusieurs recommandations. Les premières notamment tendaient à définir un cadre législatif plus précis et les conditions dans lesquelles les autorités publiques pouvaient être habilitées à utiliser et à accéder à des traitements comportant des données biométriques.

Une deuxième série de préconisations visait à garantir l’information du Parlement sur les différentes techniques et sur les différents systèmes de données biométriques, afin de disposer d’un mécanisme qui assure des éléments de contrôle des dispositifs au niveau parlementaire.

Le troisième point consistait à créer un observatoire associant les différents acteurs et utilisateurs concernés afin d’assurer d’une part, une veille juridique et technique et, d’autre part, l’information du public.

Il s’agissait enfin de mettre en place un organisme de concertation entre les structures publiques et privées avec des moyens techniques et financiers de fonctionnement, en faisant réaliser par des laboratoires indépendants les évaluations nécessaires.

Trois ans plus tard, où en sommes-nous ?

Concernant les principes que je viens d’énoncer, on n’a pas constaté d’évolution particulièrement notable : les choses sont demeurées pour une bonne part plus ou moins en l’état, presque anarchiques, sans mise en œuvre de l’organisation que nous avions imaginée. On est resté en attente de données comparatives notamment, car il eut été très improductif que chaque pays, aussi grand soit-il – à part les États-Unis qui font ce qu’ils ont envie de faire et se préoccupent peu de ce qui se passe dans le reste du monde – développe ses propres systèmes sans un minimum de compatibilité entre eux et d’harmonisation dans les critères d’appréciation et de mesure de leur fiabilité.

Comme la biométrie existe et existera, il serait dommage qu’on évacue l’enjeu industriel qui est particulièrement important ; il n’est pas toujours agréable d’évoquer le marché, mais nous sommes dans une société marchande. Il existe donc un marché, même si celui-ci obéit à des dispositions réglementaires dans beaucoup de cas. En France, le secteur de la biométrie est l’un des rares à occuper une position très respectable au plan économique, au travers de plusieurs entreprises qui ont pu développer des systèmes biométriques dont l’efficacité est reconnue dans les différents et nombreux marchés du monde. Cela fera l’objet d’une présentation sur le plan de l’économie et de l’emploi, qui en est la conséquence directe.

Pour ces multiples raisons et afin de garder une position en pointe dans le domaine international, induisant une activité économique qu’il convient de soutenir, une nouvelle évaluation « à distance » du rapport sur la biométrie a été proposée. En outre, des décisions formelles devront être prises à une échéance proche dans le domaine de la carte nationale d’identité, décisions qui seront éclairées par l’expérience acquise dans la mise en œuvre de nouveaux dispositifs, comme le passeport électronique. Celui-ci a connu ces derniers mois une actualité assez complexe liée à des contestations du dispositif d’impression de ces documents. De nombreux citoyens qui devaient et voulaient aller dans un pays exigeant ce type de passeport ont rencontré des difficultés.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons organisé cette audition d’actualisation. Nous allons entamer la première table ronde où interviendront le Professeur Cabanis, Madame Dorrizzi, Madame Deloison, Monsieur Didier, Monsieur Robin, Monsieur Mordini, Madame Lahalle et Monsieur de Mengin. Cette première table ronde est centrée sur les questions scientifiques et technologiques, les nouveautés et les évolutions significatives depuis le rapport précédent.

Je vais donc donner la parole à mon collègue, le Professeur Cabanis, de l’Université Paris VI « Pitié-Salpêtrière » ett du centre hospitalier des Quinze-Vingts. Président de la Société de Biométrie Humaine et membre de l’Académie nationale de médecine, il est également l’auteur de plusieurs ouvrages sur l’ophtalmologie et la neuroradiologie et vient de créer un groupe de travail « Génétique et biométrie », à l’Académie nationale de médecine.

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