Insécurité juridique et action en justice : condamnation de la France par la Cour Européenne des Droits de l’Homme
La loi nouvelle ne peut porter une atteinte disproportionnée aux droits de créance concernant des procédures en cours …Une loi nouvelle en matière de responsabilité civile et administrative s’applique-t-elle valablement aux affaires en cours non encore définitivement jugées ?
L’affaire soumise à la Cour Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme mettait en cause la manière dont la France a, en matière de responsabilité médicale, et pour faire suite à la Jurisprudence dite Perruche, pris une Loi dite « anti-Perruche » en date du 4 mars 2002, restreignant le droit à réparation des victimes, qui s’appliquait aux instances en cours comme aux actions futures.
La Loi nouvelle prive les victimes des indemnités auxquelles elles auraient pu prétendre.
Par arrêt en date du 6 octobre 2005, la Cour Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme condamne la France en raison de l’immixtion disproportionnée du législateur dans le droit à réparation du justiciable, et de l’atteinte ainsi portée à ses droits et possessions, en l’occurence, la créance indemnitaire à laquelle il aurait pu prétendre sans l’intervention de la loi nouvelle (affaire Maurice / France) [voir article de [Libération 7 octobre 2005 ]].
En trame de fond, se trouve ainsi affirmé le principe de « sécurité juridique » qui tend à imposer qu’un plaideur puisse espérer voir appliquer au traitement de son dossier, un droit stable, ce qui n’est manifestement pas le cas, lorsqu’une loi nouvelle, ou encore un revirement de jurisprudence vient bouleverser l’économie du litige.
Admis assez largement en droit Européen, le principe de « sécurité juridique » n’est pas très bien accepté par les autorités françaises, ni même par les instances politiques. La France et, ici, son Parlement, se voient ainsi infliger, en raison d’une loi de mars 2002, une douloureuse leçon de « droits de l’homme » par la Cour de Strasbourg[Le Conseil d’Etat a affirmé solennellement pour la première fois le principe de sécurité juridique dans son arrêt du [24 mars 2006, Ernst ]].