3 points sont abordés dans ce discours : la réforme territoriale,
la nécessaire coopération des régions en matière ferroviaire, et le refus de
céder au chantage exercé par le groupe ERAMET.
Monsieur le Président, mes chers collègues,
Aux lendemains des élections locales et européennes, où l’abstention
représente encore et toujours le premier parti politique de France, sans même
parler de la montée en puissance de l’extrême-droite, la démarche
technocratique, à la hussarde du Président de la République sur la réforme
territoriale est un véritable pied de nez à la démocratie, aux
territoires et à la citoyenneté tout simplement.
Elle émerge dans la plus grande précipitation. Qui plus est, cette
réforme est démagogique vis-à-vis des Français puisque les économies à
la grosse louche promises par la diminution du nombre de Région sont un
leurre.
La réforme territoriale envisagée ne permettra pas de faire des économies
substantielles à défaut de s’attaquer d’une part au fonctionnement de l’Etat et
ses relations avec les collectivités, d’autre part à la clarification des
compétences afin de supprimer les doublons et les trop nombreuses strates et
antichambres administratives.
Pour l'instant, la seule chose promise aux territoires c’est un
nouveau transfert de dette de l’Etat vers les collectivités, en
particulier vers les Régions dont l’équilibre financier est de plus en plus
fragilisé.
Cette réforme ne peut être celle de l’austérité, elle devrait être
forcément pensée en même temps qu’une vaste réforme fiscale redonnant
de l'autonomie aux Régions, et à l’issue d’un vrai débat démocratique
impliquant les citoyens et les acteurs socio-économiques.
Notre pays a besoin d’être réformé, l’action publique a besoin d’être plus
lisible et efficace, c’est une certitude.
Mais fallait-il une fois de plus, porté par l’idéologie social-libérale de
la compétitivité territoriale, prendre le problème à l’envers en commençant non
seulement par créer de grandes métropoles, puis des méga-régions à la logique
concurrentielle, alors que la France est championne d’Europe du nombre de
communes et qu’elle recense une centaine de conseils généraux dont la
suppression est renvoyée à un calendrier plus qu’incertain ?
Fallait-il improviser un découpage des Régions totalement déconnecté des
réalités de la vie des citoyens, des bassins de vie, des enjeux
socio-économiques et environnementaux des territoires, du patrimoine historique
et culturel, mais aussi des coopérations existantes ?
La taille des régions françaises est un faux débat car elles sont en
superficie et en population au-dessus de la moyenne européenne. Le vrai débat,
et il faudra bien avoir le courage de l’avoir un jour, pour mettre fin au
jacobinisme historique de la France, c'est qu’elles sont des naines financières
à côté de leurs homologues des grands pays européens.
En euros par habitant, le poids budgétaire des Régions françaises est 5 à 10
fois inférieur à celui des Régions des autres pays européens. Leur autonomie,
leur pouvoir d’action, leur possibilité d’avoir des politiques différenciées
sont extrêmement limités dans la mesure où elles ne maîtrisent que 12,5% de
leurs recettes fiscales. 13% pour l’Auvergne.
Ainsi, au lieu de les faire grandir contre leur volonté et contre celle des
citoyens – les sondages l’attestent, en Auvergne notamment – il faut leur
transférer des compétences certes, mais aussi et surtout des moyens financiers
et réglementaires pour qu’elles soient plus autonomes. Les annonces du
gouvernement en la matière doivent tous nous inviter à la plus grande
vigilance.
De plus, « penser que la compétitivité de la France sera améliorée
par la construction de grandes régions est un non-sens économique » comme
l’écrit un ancien sous-préfet : « les entreprises Michelin,
Volvic et Vichy n’ont besoin ni d’une métropole clermontoise ni d’une grande
région Auvergne Rhône Alpes pour être des leaders mondiaux dans leur domaine
», au même titre que Kuhn à Saverne, sous-préfecture du Bas Rhin de 12 000
habitants, de Bugatti à Molsheim, 9300 habitants, de Kronenbourg à Obernai, 11
000 habitants. La réussite de ces entreprises n’a rien à voir avec la dimension
de la métropole ou de la région dans lesquelles elles se situent.
Permettez-moi également de mettre dans le débat quelques chiffres de
comparaison au regard des compétences principales des Régions afin de tordre le
cou à un certain nombre d’idées reçues, voire à une forme de dogmatisme de
certains prophètes de la fusion Auvergne / Rhône-Alpes.