Notre-Dame-des-Landes : Bruxelles lance une procédure d'infraction contre la France
Par nicole rouaire le mardi 22 avril 2014, 09:18 - Actu - Lien permanent
Article d'Actu Environnement du 18 avril 2014
La Commission met en demeure la France et pointe un défaut d'évaluation des impacts environnementaux lors de la procédure d'autorisation du projet aéroportuaire. Les maîtres d'ouvrage restent confiants pour lancer les travaux en dépit des recours.
Cette procédure d'infraction intervient après que la préfecture de Loire-Atlantique ait publié le 21 décembre 2013 quatre arrêtés préfectoraux relatifs à la loi sur l'eau et à la biodiversité, autorisant le démarrage des travaux, moyennant des mesures compensatoires des zones humides impactées. L'analyse des incidences du projet réalisée par les maîtres d'ouvrage (le concessionnaire Aéroport du Grand Ouest (AGO)-Vinci et la Dreal des Pays-de-la-Loire) et la définition des mesures sont basées sur la logique ERC (Eviter - Réduire et, en cas d'incidences résiduelles, Compenser), indiquent les arrêtés.
Infraction sur les impacts cumulatifs du projet
Mais, selon l'AFP, Bruxelles reprocherait aux autorités françaises de n'avoir pas mené, lors de la procédure d'autorisation, "une évaluation des effets synergiques et des impacts cumulés de l'ensemble des infrastructures du projet". Une telle évaluation "aurait dû être établie au moins avant la publication des arrêtés de décembre qui permettent d'initier les travaux d'aménagement", a précisé un représentant de la Commission européenne au site d'informations Presse Océan.
La France enfreindrait la directive de 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement qui impose pour la construction d'un aéroport, de recenser notamment "les effets notables sur l'environnement, y compris les effets secondaires et cumulatifs".
Depuis 2009, la Commission "suit de très près la manière dont les impacts cumulatifs du projet seront pris en compte", avait déjà indiqué en septembre 2013 le directeur général de l'environnement de la Commission, Karl Falkenberg. Il était auditionné par la commission des Pétitions du Parlement européen, suite à l'ouverture fin janvier 2013 par l'exécutif européen d'une procédure de précontentieux contre ce projet aéroportuaire.
Suite à cette saisine, Bruxelles avait déjà demandé à deux reprises des informations aux autorités françaises compétentes concernant le respect des exigences prévues par la législation environnementale européenne.
Des travaux freinés par les recours judiciaires
La France dispose de deux mois pour de nouveau répondre à Bruxelles. Les porteurs du projet se veulent rassurants. Aéroports du Grand Ouest, concessionnaire, est "confiant sur le fait que les réponses qui seront apportées par la France dans les délais satisferont aux demandes de la Commission".
Interrogé par l'AFP, la préfecture de Loire-Atlantique quant à elle, "prend acte" de la décision de Bruxelles et assure que "sur le fond du dossier, ça ne change rien". La préfecture y voit "une petite formalisation des points qui restent à traiter" et estime que la mise en demeure européenne n'annule pas les arrêtés autorisant la reprise des travaux.
Les premières actions de transferts des espèces et de défrichage étaient prévues le premier semestre 2014 par la préfecture. En février dernier, plusieurs associations opposées à l'aéroport ont déposé des recours judiciaires contre ces quatre arrêtés dénonçant les insuffisances du projet en matière de compensation environnementale.
Johanna Rolland, la nouvelle maire socialiste de Nantes, a signé un accord électoral avec l'écologiste Pascale Chiron soulignant "l'orientation du gouvernement de ne pas débuter les travaux avant l'épuisement de tous les recours juridiques actuellement déposés". La nouvelle ministre de l'Ecologie Ségolène Royal a réaffirmé cette position. Cette semaine, le Conseil national de protection de la nature a donné un avis défavorable à la destruction d'une espèce menacée à Notre-Dame-des-Landes, le campagnol amphibie.
"Ségolène Royal n'a jamais caché son scepticisme quant à ce projet, il lui appartient maintenant en tant que ministre de l'Ecologie de faire un geste fort en faveur de l'environnement en mettant un terme définitif à ce projet", a déclaré Denez L'Hostis, président de la fédération France Nature Environnement.
Rachida Boughriet