La diversité musicale est en danger. Le communiqué de presse
ci-dessous, signé par Pascal Durand, vient le rappeler à juste
titre.
L'annonce précipitée de la constitution du Centre National de la Musique est
une véritable opération de poudre aux yeux montée pour sauver les revenus des 5
majors qui captent 80% des bénéfices du secteur. Si la constitution d’un "CNC
de la musique", sur le modèle du cinéma, est en soit une idée intéressante, sa
mise en oeuvre pose un véritable problème.
Parce qu'elle a refusé d'accompagner la mutation internet, l'industrie
musicale a connu une perte de son chiffre d'affaire de 40% au cours de ces 5
dernières années. Le téléchargement dit "illégal" a proliféré sur le terrain
déserté par les majors qui, aujourd'hui encore, s'opposent à toute idée de
licence globale qui pourtant gènérerait bien plus de revenus pour la
musique.
A l'instar d'Hadopi, le CNM ne résout en aucun cas le problème du secteur.
Aucune vraie recette nouvelle : le budget de 145 M d’€ est pour
l’essentiel constitué des aides déjà distribuées par les sociétés d’auteurs (50
M d’€) et d’un prélèvement sur les recettes du CNC (95 M d'€, une partie de la
« taxe sur les services de télévision » Cette taxe est principalement
issue des services internet).
Ce prélèvement est justifié « parce qu’il est légitime que les
opérateurs de télécom contribuent au financement de la production et de la
création ». Si c’est le cas pourquoi pas une licence globale comme EELV et de
nombreux acteurs le demandent, et qui pourrait rapporter à la musique 2 à 300
millions d’€ juste pour la musique ?
Par ailleurs la progression des recettes de la taxe sur la billetterie du
spectacle vivant est re-répartie en faveur de l'industrie du disque en
déconfiture : l'économie de rente s'attaque aux emplois culturels.
Les recettes prises aux sociétés d’auteurs, à l’audiovisuel, ainsi que la
redistribution des recettes du spectacle vivant, vont directement aller dans la
poche des grosses entreprises de la diffusion et de l’édition phonographique,
via des systèmes d’aides automatiques réservés aux entreprises « ayant un
chiffre d’affaires significatif ».
On taxe les petits pour alimenter les grands. Sur 145 millions d’Euros, 7
millions d’Euros seulement seront apportés en aide aux créateurs !
Au delà des aspects économiques, c'est mettre en péril la diversité
musicale. Le rapport privilégie les formes de musique déjà sur-représentées
dans l'industrie.
Pendant ce temps là, les opérateurs télécom, les plate-formes internet, les
producteurs d’appareils d'écoute, de smartphones et de tablettes, qui vendent
leurs produits notamment grâce à la fourniture de contenus musicaux, peuvent
dormir tranquilles sur leurs bénéfices : on n’y touchera pas.