13 février 2012 : Conseil d’Alsace

13 février 2012

Intervention de Jacques Fernique

Monsieur le Président, chers collègues,

Bien sûr, nul ne sait avec totale certitude ce que sera la majorité nationale dans quelques semaines. Nul ne sait quel sera le gouvernement à venir. Mais ce que nous savons, aujourd’hui, ce que nous avons à faire savoir, c’est notre résolution forte pour le Conseil unique d’Alsace, c’est notre détermination à faire en sorte que les prochaines élections territoriales, quelles que soient leurs dates, n’élisent ni des Conseils généraux, ni un Conseil régional, mais le Conseil Unique d’Alsace.

Aujourd’hui, nous n’en sommes plus aux professions de principe : nous l’avons fait le 7 mai ici et par une unanimité qui engage, nous l’avons partagé avec tous les élus territoriaux d’Alsace à Colmar le 1er décembre.

Aujourd’hui, nous avons à voter la délibération demandant à l’État que soit engagée la possibilité de fusion, nous n’avons pas peur du mot, et de régime spécifique prévue par la loi encore en vigueur, mais nous avons surtout à donner corps à la démarche en mandatant le groupe projet qui travaillera concrètement à imaginer et à proposer les modalités nouvelles de cette décentralisation différenciée à laquelle nous aspirons et que suivent avec intérêt tous ceux qui dans ce pays, quel que soit leur choix politique, sont persuadés que c’est par le renforcement du fait régional et des territoires de solidarité que la République trouvera une vigueur nouvelle. Alors j’espère que le temps qu’il a fallu pour que ce groupe projet existe aura permis aux uns et aux autres de réaliser le caractère essentiel de sa mission, de s’y préparer et de ne pas la gâcher : donc pas question pour nous que ce groupe projet ne soit qu’un vague simulacre aussi peu productif, on peut se le dire, que les 8 mois écoulés depuis notre plénière du 7 mai.

Oui, nous savons que la dynamique s’est émoussée, oui nous savons qu’il faudra un tout autre rythme, une toute autre énergie que la course de lenteur que nous avons connue jusqu’ici. Alors il fallait peut-être en passer par là pour obtenir sans brusquer personne les 101 voix du 1er décembre, mais pour réussir à présent la mise en œuvre, et dans un contexte politique qu’effectivement nous ne maîtrisons pas, il faudra assurément changer de braquet.

Notre projet de fusion des collectivités a besoin d’énergie, de volontarisme car quelle que soit la majorité parlementaire et gouvernementale, l’Alsace devra batailler : car quelle que soit la majorité nationale nouvelle, il faudra que la volonté décentralisatrice vienne des régions et de la nôtre pour que les choses bougent vraiment.

L’équilibre auquel nous sommes parvenus au Congrès de Colmar est fragile, les choses ne sont pas évidentes encore cette semaine : il tient dans la balance entre deux principes structurants qu’il s’agit de maintenir sans que l’un ne s’impose sur l’autre. Le principe de solidarité et le principe de proximité, celui de l’unité régionale et celui de la spécificité des territoires. Cet équilibre est inédit dans notre pays et c’est par l’expérimentation de la pratique de la subsidiarité que nous tiendrons ensemble ces deux tensions. La responsabilité d’une politique doit revenir à l’entité la plus proche apte à résoudre elle-même le problème posé : l’Alsace rhénane, l’Alsace européenne est particulièrement bien placée pour être pionnière de la greffe dans notre pays toujours trop jacobin, de ce principe si familier ailleurs en Europe.

Le groupe projet devra trouver les modalités pratiques du juste équilibre, nous l’avons affirmé fortement à Colmar, entre la proportionnelle régionale et le scrutin uninominal de territoire ; il devra faire progresser la parité femmes/hommes ; il devra garantir que la majorité voulue par les citoyens d’Alsace, quelle qu’elle soit, ait vraiment la majorité, en clair que ce Conseil d’Alsace permette l’alternance démocratique ; il devra conforter Strasbourg capitale régionale tout en équilibrant la place de nos principaux pôles urbains ; il devra surtout trouver avec le gouvernement qui nous aurons et la représentation nationale future les termes et les moyens précis de notre évolution spécifique.

L’équilibre précieux dont dépend la réussite du Conseil d’Alsace n’est pas figé. Tout pourrait se dérégler et échouer. Et effectivement, le projet de délibération de Charles Buttner que l’on découvre ce matin n’est pas acceptable, car il n’est pas rédigé en termes identiques à ce qui est proposé à l’Etat.  Il s’agit donc que les tenants du fait régional soient impliqués, présents, sachent montrer, dans cette grande affaire de l’Alsace, leur cohésion comme nous l’avions fait au printemps, leur cohésion sur la méthode et c’est d’autant plus crédible que nous divergeons sur les contenus politiques : car que serait un conseil d’Alsace qui ne conviendrait qu’à une politique possible, qu’à une stratégie de développement ?

Les majorités actuelles de nos trois assemblées l’ont compris en acceptant en décembre de déconnecter leur projet politique stratégique particulier de la démarche d’émergence du Conseil Unique : c’est celle-ci que nous votons aujourd’hui, et absolument pas les contenus politiques de la majorité UMP. Le groupe projet s’enliserait s’il revenait là-dessus et se mettait à fonctionner en son sein par la majorité politique que l’on connait.

Et puis enfin, il dépend d’abord des conseillers régionaux que le groupe projet soit résolument régionaliste. Cela n’a rien d’évident au vu de sa composition. Ne laissons donc pas tout l’espace à ceux qui sont de par leurs mandats surtout soucieux des spécificités, des cantons, de leur ville et de la diversité locale : le Conseil d’Alsace serait vain s’il ne faisait que juxtaposer les particularités et les visions courtes et rétrécies.

 

Alors notre vote d’aujourd’hui n’est pas une formalité, si nous Conseil Régional, voulons peser, s’il nous importe que ce Conseil d’Alsace soit fusion des énergies et non juxtaposition des existants, s’il nous importe que la Région ne se dissolve point, ne s’émiette point dans un machin sans ressort et sans cohésion, alors sachons aujourd’hui comme au 7 mai, être ensemble les plus novateurs, les plus déterminés.

Les écologistes, comme hier, comme avant-hier, voteront cette délibération.

Il paraît que rien n’arrête une idée dont le temps est venu.

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