Intervention de Djamila Sonzogni
Monsieur le Président, mes Cher-e-s collègues,
Concernant le budget du tourisme, le fait qu’il soit en baisse par rapport à 2011 n’est pas le plus important. C’est l’exemple même de budget dont il ressort de façon évidente que la première question n’est pas le fait qu’il baisse ou qu’il augmente mais avant tout de savoir comment l’argent public est dépensé et réparti.
En fait la question c’est de savoir quelle politique touristique on veut développer.
L’axe le plus coûteux de votre budget, c’est l’axe 2 sur la promotion de l’Alsace comme destination touristique, presque un tiers du budget soit 4,5 millions d’euros dont 3,5 rien que pour le CRT. Faut-il consacrer un tiers du budget à faire de la communication ? Ça me paraît vraiment très élevé ! Faut-il encore payer pour la promotion des dernières phases des TGV Est et Rhin-Rhône, qui nous coûtent déjà des millions d’euros pour faire gagner quelques dizaines de minutes sur des trajets accessibles surtout aux cadres et ce au détriment de la plus grande partie des Alsaciens ?
En plus des 3,5 millions d’euros pour le CRT, on ajoute 100 000€ pour l’observatoire et 300 000€ pour le RESOT. Ces deux dispositifs devraient être intégrés au CRT, dont ils partagent les missions et une bonne partie des moyens.
Sur l’axe 1, l’aide aux entreprises de tourisme :
Soutenir l’hôtellerie familiale et indépendante est nécessaire mais à un niveau raisonnable et avec des critères précis. Nous avons revu le plafond (il n’y en avait pas) ; il est aujourd’hui à 700 000 euros : c’est encore trop. Une révision du dispositif est prévue, les modifications sont insuffisantes. Oui à une baisse plus significative du plafond.
Mais il faut aussi dans les critères instaurer le fait de ne pas subventionner des structures qui sont des succursales cachées, qui font des bénéfices importants et qui n’ont pas besoin des subventions publiques car ça reviendrait, au final, à financer le séjour des clients aisés qui les fréquentent.
Il faut aussi instaurer des critères sociaux et environnementaux.
Quand on voit ce que l’on a versé en 2011 par rapport aux emplois créés, l’emploi est bien cher : depuis la mise en place du dispositif en 2007, 10 millions d’euros ont été accordés par la Région et 226 emplois créés, soit la coquette somme de 45 000 euros de participation régionale par emploi !
De même pourquoi subventionner des travaux de climatisation et ne pas encourager la performance énergétique alors que nous conditionnons l’aide aux structures associatives à une performance énergétique ? Pourquoi ne pas imposer cette condition à l’hôtellerie familiale et indépendante à qui nous apportons en termes de budget deux fois et demie plus d’argent ?
A propos de l’hébergement associatif, qu’il faudrait transformer en une filière d’hébergement solidaire et écologique, c’est bien de remettre les choses à plat, mais vous vous contentez de modifications techniques, notamment de répartition financière avec les départements. Il faudrait être bien plus ambitieux et, dans l’anticipation du Conseil unique d’Alsace, faire en sorte que la nouvelle collectivité prenne l’initiative d’une politique touristique permettant de reconvertir ces nombreuses structures (petites et grandes), pour beaucoup en difficultés, en direction d’un tourisme solidaire et écologique.
C’est un vrai schéma du tourisme solidaire et écologique qu’il faut construire dès maintenant avec les structures, les acteurs du tourisme et de l’économie sociale et solidaire, les autres collectivités territoriales. Cela peut avoir des retombées économiques positives : meilleur taux de remplissage, pérennisation des hébergements, revitalisation de territoires ruraux…
Un impact social : permettre à des publics qui n’ont pas trop de moyens, des familles, des groupes de jeunes, notamment des urbains d’aller en vacances en Alsace. C’est l’occasion d’encourager ces structures dans une démarche de tourisme écologique. On pourrait associer à ce schéma les soutiens aux autres hébergements (campings et habitations légères, hébergements innovants).
Cela demanderait un peu plus de moyens que les 500 000 euros attribués mais le jeu en vaut la chandelle et une meilleure répartition des moyens (notamment par le redéploiement des subventions destinées à la communication) permettrait de mettre en place cette politique.
L’axe 3 accessibilité, innovation et stratégie
Sur le rallye, nous restons conformes à nos engagements et nous refusons les 460.000 euros de subventions pour l’édition 2012, en augmentation de 35 % ! A ce propos, deux remarques :
1) vous nous informez via la presse d’une étude qui affirme que le rallye a rapporté 18 millions d’euros. Ce chiffre est étonnant et nous aurions apprécié d’avoir connaissance de l’étude précisément, d’autant plus qu’elle est financée par la Région via l’observatoire régional du tourisme… mais si, comme vous l’affirmez, le rallye rapporte réellement 18 millions d’euros à l’Alsace, c’est une opération rentable. Alors pourquoi le financer sur les deniers publics que chaque citoyen paie quels que soient ses revenus ? C’est une raison de plus pour dire non au financement public de cette manifestation.
2) la subvention pour le rallye représente quasiment 50% de l’axe 3. Quelles que soient nos convictions sur l’intérêt public de ce style de manifestation, c’est trop et vous en conviendrez.
Axe 5 : Vous vous obstinez à soutenir le Bioscope, qui va nous coûter pour 2012 encore 50 000 euros. La Région s’était engagée dans une première phase qui a coûté 30 millions d’euros aux collectivités locales pour le résultat que nous connaissons. Si les entrées ont un peu augmenté cette année, elles atteignent moins de 100 000 en comptant les nombreuses entrées gratuites. Nous sommes très loin des 300 000 entrées qui permettraient un équilibre budgétaire. Cette année, le déficit est de plus de 3 millions d’euros, il est de 24 millions d’euros depuis l’ouverture… Ça fait plus d’un an qu’on attend le projet pour la phase 2… combien de temps la Compagnie des Alpes va-t-elle accepter de combler ce gouffre ? Est-ce que les collectivités territoriales vont s’engager, dans le contexte de crise actuel, sur une deuxième phase prévue à 15 millions d’euros ? Nous sommes dans une IMPASSE.
Il est temps de se mettre autour d’une table pour voir comment RECONVERTIR CET ECHEC et c’est à cela que devraient servir les 50 000 euros que la région investit dans ce projet plombé d’avance. Nous repartons sur 140 000 euros sur le golf de la Sommerau, encore un projet plombé d’avance, projet élitiste socialement, pas desservi par les transports communs, anti-environnemental. Vous ne nous avez pas écoutés sur le Bioscope et malheureusement la réalité nous donne raison, il est encore temps de le faire pour le golf.
Bien évidemment nous voterons sans état d’âme contre ce budget qui valide un projet d’un autre âge.
Je vous remercie.