Intervention d’Andrée Buchmann
Monsieur le Président, chers collègues,
Je ne vais pas être originale en remarquant que dans un contexte de crise économique qui ne fait que commencer, le budget que le Conseil régional consacre à l’économie diminue.
Est-ce à dire que nous avons grand espoir de pouvoir bénéficier de la dynamique économique qui s’instaure en Bade Wurtenberg qui recherche de plus en plus des emplois qualifiés ?
Il est vrai que dans un passé pas très lointain, les dirigeants alsaciens s’étaient installés dans le confort d’un environnement favorable en étant convaincus qu’il n’était pas nécessaire d’innover et que la prospérité allait de soi.
C’était le temps des 60.000 travailleurs frontaliers vers la Suisse et vers l’Allemagne, et de l’implantation d’entreprises étrangères, notamment japonaises et américaines, à grands coups d’exonération de taxes professionnelles et de subventions.
Une partie de nos difficultés résident dans les conséquences de ce manque de créativité : disqualification de l’enseignement bilingue et du bilinguisme en général, insuffisamment de soutien aux petites et moyennes entreprises, peu d’ouverture aux nouveaux champs de l’économie verte et des métiers émergents.
Même si le discours devient plus écologique, on ne peut qu’être surpris par la permanence des vieilles logiques.
Ainsi présenter le Grand Contournement Ouest comme un facteur d’attractivité, dans une totale incohérence avec d’autres politiques comme celle de la trame verte et bleue, de la biodiversité, de la préservation des zones humides, notamment dans le cadre de notre classement n zone Ramsar, du schéma de cohérence écologique.
Présenter le Grand Contournement Ouest de manière positive alors que les grands enjeux mondiaux sont ceux de l’adaptation au changement climatique, de la lutte contre la pollution atmosphérique, de la transition vers la société post-pétrole et des régions décarbonées, ne peut que laisser pantois.
Tout comme le contour de la « Marque Alsace » laisse songeur. Est-il imaginable, à l’heure de la mondialisation et de la relocalisation, de concevoir la promotion d’une région sans associer les grandes villes qui en forment un élément moteur et sans l’inscrire dans un territoire plus pertinent.
A Shanghai, la différence de perception et projection territoriale entre l’Alsace et la Ville de Fribourg était symptomatique. Grâce à l’initiative de quelques architectes un Pavillon Alsace a été construit à l’exposition universelle. Bonne idée. Sauf que l’iconographie de l’exposition à l’intérieur du bâtiment donnait une image un peu folklorisante de la région, mais surtout la photo principale montrait la centrale nucléaire de Fessenheim. Comme innovation, cela se pose là !
La Ville de Fribourg, qui avait réalisé un pavillon dans la partie « énergies renouvelables » montrait les nouveautés de ce secteur et territorialement inscrivait la ville dans l’environnement du Rhin supérieur.
C’est un autre point de vue et une autre vision du monde.
Ce n’est pas avec nos vieilleries comme Fessenheim et le GCO que nous allons « faire de l’Alsace un modèle du monde meilleur de demain « ‘ je vous cite, p.4. D’ailleurs, faut-il se penser en modèle ?
On peut s’interroger sur le brutal arrêt des investissements dans le domaine du photovoltaique, lors qu’on donne une subvention importante ( 5 000 euros) aux acquéreurs de véhicules électriques – qui peut se permettre une voiture électrique ? ( il est vrai que ce dispositif ne marche pas très bien, heureusement, et qu’il a été étendu, sous notre impulsion, aux acquisitions de véhicules électriques achetés par les collectivités… )
Les dispositifs sont nombreux, et beaucoup d’entre eux utiles. Néanmoins on peut s’interroger sur l’efficacité de certains, notamment d’aides individuelle à l’entreprise par manque de pro-activité de la Région, et sur la pertinence de certains dispositifs. Nous ne pouvons pas garder les mêmes types d’intervention depuis plusieurs années alors que le contexte régional et général est bouleversé. Selon nous, ce n’est pas le moment de réduire la voilure : si les dispositifs ne sont plus à la hauteur, à nous d’aller de l’avant (notamment en développant l’éco-conditionnalité).
Il manque souvent la mise en réseau régional, avec les entreprises des régions voisines, notamment suisses et allemandes. Alors que nous avons eu un Congrès le 1er décembre, vos projets pour 2012 n’intègrent toujours pas la fusion des agences de développement !
On ne peut pas se penser alsaco-centrés. Nous partageons la proposition du Ceser Alsace d’un exercice prospectif régional sur l’évolution des différents secteurs de l’économie, associant l’ensemble des acteurs du territoire.
Ce à quoi il nous faut réfléchir maintenant, c’est à la mise en œuvre de la transition vers la société post –carbone. Avec un focal important sur l’économie numérique, mais sans oublier qu’elle est fortement consommatrice d’énergie et qu’il s’agit de réfléchir à un développement qui nous autorise à faire beaucoup plus et beaucoup mieux avec beaucoup moins.
C’est possible.