Intervention de Jacques Fernique
pour le Groupe Europe Ecologie Alsace
Monsieur le Président, chers collègues,
dans cet échange, ce temps impromptu de politique générale, Antoine WAECHTER a dit l’essentiel de nos sentiments.
J’ai deux points.
Sur l’Euro 2016. Nous avons entendu votre phrase. Celle-ci laissait entendre que, pour ces investissements considérables prévus, vous auriez l’intention d’y aller tête baissée.
Je crois que la façon dont les promoteurs de cette opération envisagent leurs relations aux responsables des finances publiques, les coûts, les conditions qui se profilent dans cette affaire font qu’il faut que nous regardions les choses avec circonspection. Dans les différentes collectivités concernées, qui seraient concernées par l’Euro 2016, il y a du débat, de la discussion. Les choses ne sont pas évidentes.
Je voulais surtout évoquer, dans la conjoncture actuelle du travail législatif, la question importante pour l’Alsace qui est celle de la réforme territoriale. Vous l’avez dit, vous avez échangé et vous nous avez rencontrés. Vous saviez, parce que nous nous étions exprimés dessus lors de la campagne, notre profond désaccord avec une liquidation complète du scrutin proportionnel régional et de la parité. Vous saviez que nous étions contre la déstructuration de la Région dans de multiples circonscriptions. Nous avons combattu et continuons à combattre la remise en cause des leviers d’action financiers politiques des régions.
Il ne s’agit pas simplement d’une affaire de montage institutionnel. Si ces régressions nous inquiètent c’est car nous, écologistes, nous savons que le temps est compté à l’égard des enjeux de l’énergie, de la cohésion sociale, de la biodiversité et du climat. Il l’est aussi à l’égard – il faut le dire et nous le ressentons, Adrien ZELLER le disait – d’une détermination jacobine à casser en quelque sorte l’espace politique régional, tant pour ses compétences que pour ses finances.
Vous avez engagé auprès du Gouvernement, des Assemblées, une démarche en vue de permettre un régime plus avancé pour l’Alsace mais plus globalement pour certaines régions dont les collectivités territoriales seraient résolues à fusionner en une collectivité unique. Nous allons voir comment cela se passe. Pour l’instant, la Commission des lois du Sénat a retoqué l’amendement qui permettrait cela. C’est provisoire puisque ce n’est pas la Commission des lois qui décide, en bout de course,.
Vous ne pouviez pas être dans deux endroits à la fois. Je crois que la démarche dans laquelle vous vous engagez part d’un constat que nous partageons. Le projet gouvernemental, Antoine HOME le disait, qui va devenir le régime commun de la réforme territoriale n’est pas celui qui nous convient, à savoir l’effacement politique des régions. Celles-ci se verraient privées de leurs élections politiques pour n’être plus qu’une simple addition des conseils généraux. Cela ne va pas. Le morcellement territorial ne va pas non plus. Le recul sur la parité est inadmissible. De plus, il faut le dire, la feuille de route de la Commission Balladur était la simplification du millefeuille. Nous n’y sommes pas du tout, il y a même une aggravation de la complexité administrative. Que la Région Alsace mette en question ce régime commun dessiné par l’UMP national nous parait illustrer de façon manifeste l’inadaptation de celui-ci au regard des enjeux.
La volonté d’une collectivité régionale unique par un processus de fusion est quelque chose que nous partageons. Les niveaux qu’il faut renforcer au plan territorial, particulièrement en Alsace, sont la Région, les intercommunalités. C’est aussi le niveau de synergie transfrontalier et interrégional. Cela ne veut pas dire que les départements sont à rayer d’un trait mais plutôt à envisager de façon transitoire sous l’angle de la proximité, de la gestion administrative mais pas – car à ce jour il faut des coulées franches pour agir politiquement – de la définition de la conduite de politique publique efficiente susceptible de changer véritablement le cours des choses.
Ceci dit, je ne sais pas ce qu’il arrivera de cet essai de régime particulier pour les collectivités qui acceptent de fusionner pour l’ensemble de leurs compétences. Nous prenons acte des intentions décentralisatrices qui motivent cette démarche. Ceci dit, il faut s’y engager de façon claire, lisible et cohérence car il nous faut l’adhésion publique sur ce point.
Il faut donc s’engager franchement et résolument vers une modernité démocratique équilibrée. Je vous l’ai dit, il serait désastreux de prêter le flanc à l’idée que ce serait tout simplement les élus actuels qui chercheraient la reconduite du volume des postes électifs actuels.
L’idée du syndicat des élus qui défendrait ses seuls intérêts ne passerait pas. Il serait mauvais de passer pour des bricoleurs échafaudant une espèce de construction hétéroclite avec des élus de natures et vocations différentes et contradictoires. Je crois que si nous parvenons à ce que les élus soient élus de façon différente, cela ne peut pas se justifier par le seul maintien d’un statut quo pour plaire à tout le monde. C’est parce que la légitimité démocratique régionale doit s’appuyer – vous l’avez dit en partie dans votre discours – à la fois sur la spécificité des différents territoires représentés en tant que tels et aussi sur la cohésion fédératrice d’un projet politique validé par le scrutin de liste à l’échelle régionale. Nous sortons d’un débat régional électoral. Le moins que nous puissions dire c’est que les uns et les autres ont bien senti que ce débat était utile, que c’était important. La réforme territoriale de régime commun, si nous y passions, nous en priverait. Il s’agit donc de garantir la force de la solidarité citoyenne, la nécessaire coordination des politiques tout en respectant la force de la diversité et le désir de pilotage de proximité.
Nous ne savons pas ce qu’il en adviendra. Le contexte politique est en effet difficile parce qu’il n’y a guère qu’ici, en Alsace, que des élus UMP ont véritablement, parce qu’ils sont dans l’exécutif régional, le souci concret de l’avenir régional. J’ai peur que les autres parlementaires qui forment à ce jour la majorité au Sénat et à l’Assemblée nationale aient plus un souci politicien dans cette affaire. J’espère que vous pourrez leur faire entendre raison.
Je vous remercie.