L’immigration concentre toutes les idées reçues. Et les récentes initiatives gouvernementales ne facilitent ni la clarification ni la pacification du débat.
Rappelons un acte récent du gouvernement avant de prendre connaissance d’une analyse extraite d’un article d’Alternatives Economiques :
Dimanche 17 avril, le Gouvernement français a demandé à la SNCF, sur injonction orale, d’interrompre toutes les circulations ferroviaires à la frontière italienne entre Vintimille et Menton.
Ce sont 23 TER qui ont été supprimés entre Vintimille et Menton et 2 TER entre Nice et Vintimille entre 11h00 et 19h00.
La Préfecture n’a pas jugé utile de demander son avis au Conseil régional de cette décision pour le moins scandaleuse, ni même de l’informer, alors que le Conseil régional est l’autorité organisatrice des transports régionaux.
Retour à l’analyse :
Du débat sur l’identité nationale à celui sur la laïcité et l’islam, le gouvernement alimente dangereusement l’idée selon laquelle l’immigration serait un « problème ». Ce faisant, il attise la peur d’un afflux massif d’immigrés et l’idée selon laquelle ils seraient la source de nombreux maux (chômage, insécurité…). Outre qu’il légitime une partie des thèses de l’extrême droite, ce discours est erroné. Si la France est bien une vieille terre d’immigration, elle est loin d’être submergée. On peut même dire que l’Hexagone a cessé d’être un pays d’immigration massive depuis un quart de siècle.
L’imaginaire et la réalité
En 2010, la France comptait 6,7 millions d’immigrés, soit 10,7 % de sa population, selon une projection de l’Institut national des études démographiques (Ined). Or, depuis dix ans, cette proportion reste stable : elle était déjà de 10,6 % en 2000. D’autre part, quand on compare la France à d’autres démocraties industrielles occidentales, elle se distingue par un nombre d’immigrés rapporté à sa population totale plus faible qu’ailleurs : 13,5 % aux Etats-Unis, 14 % en Espagne, 13 % en Allemagne, 15,6 % en Autriche…
Une accumulation d’obstacles
Ce n’est donc pas le flux actuel de migrants qui est préoccupant, mais bien davantage les problèmes d’intégration que rencontrent les enfants ou les descendants d’immigrés. Autrement dit, l’héritage des migrations passées. Entre la ségrégation urbaine, les discriminations au faciès ou au patronyme, les difficultés d’accès au marché du travail ou encore l’échec scolaire, les deuxièmes et troisièmes générations cumulent les obstacles.
Une récente enquête réalisée par l’Insee et l’Ined a apporté de nouveaux éclairages sur ces injustices [2]. Les enfants d’immigrés sortent plus souvent que les autres sans diplôme du système scolaire (13 %, contre 8 % pour le reste de la population). Ils décrochent également moins fréquemment que les autres le baccalauréat et sont moins souvent orientés vers les filières générales.
Ces inégalités de niveaux scolaires sont avant tout liées à l’origine sociale des jeunes issus de l’immigration qui, dans leur majorité, appartiennent à des familles dont le père est ouvrier. Sur le marché du travail, les immigrés et leurs descendants rencontrent également de nombreuses difficultés, surtout s’ils sont non européens : un taux de chômage plus élevé, une surreprésentation dans les métiers délaissés et précaires, aux conditions de travail pénibles et aux salaires plus faibles. C’est bien là que se situe le vrai défi : faire tomber ces obstacles à l’intégration économique et sociale.