Point de vigilance et de controverse : Vidéo audience
Adopté en séance publique le dimanche 22 avril dernier, le projet pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie développe l’utilisation de la vidéo-audience. Eric Alauzet souhaitait revenir sur cette modification et expliciter sa position.
- Dans quel contexte s’inscrit la thématique ?
De nombreuses inquiétudes ont été formulées, aussi bien en commission que durant les séances publiques, concernant la vidéo-audience suspectée de remettre en cause la garantie des droits en matière de jugement (publicité des débats, respect du contradictoire et des droits de la défense).
La vidéo-audience préexistait à la loi votée. Elle était ainsi utilisée devant la CNDA pour examiner des recours venant de Cayenne, Mamoudzou, Point-à-Pitre et Fort-de-France. Elle est ouverte au public et nécessite que le requérant dispose de l’intégralité de son dossier à l’endroit où il est auditionné.
- Quelles modifications la présente loi apporte-t-elle ?
La vidéo-audience est étendue à plusieurs procédures dont le jugement du Tribunal administratif sur la mesure d’éloignement pour un étranger placé en rétention (articles 6 et 16).
- Pourquoi de telles modifications ?
La vidéo-audience répond à une exigence d’efficacité et de modernisation de la justice face à la lourdeur des déplacements que subissent aussi bien les requérants que les personnes retenues qui doivent se se rendre devant le juge des libertés et de la détention accompagnés d’une escorte policière.
Je reste profondément attaché à la nécessité de garantir une justice humaine auquel ce texte attache une attention toute particulière. En effet, il faut préciser que le recours à cette méthode se fera au cas par cas selon une exigence de « qualité » de la liaison qui s’ajoute à celle de confidentialité. Si le juge fait état d’un dysfonctionnement dans le dispositif de nature à impacter la qualité de la liaison, il n’y aura pas recours. La vidéo-audience est d’ailleurs déjà utilisée outre-mer devant la CNDA et cela dans des conditions matérielles optimales : salle d’audience visible et huit-clos possible. Une étudie du GISITI (Groupe d’information et de soutien aux immigrés) a par ailleurs conclu à l’absence relative de difficultés dans la possibilité pour le requérant de transmettre son récit dans la sérénité.
En outre, le dispositif sera largement encadré. Il est conditionné par la présence d’un conseil et d’un interprète. Ainsi, l’avocat et l’interprète doivent être présents aux côtés du demandeur et, en cas d’impossibilité, l’interprète est présent pendant toute la durée de l’audience auprès de la cour.
- Quelle est ma position sur ce sujet ?
Gageons que dans nombre de cas, la vidéo-audience sera bénéfique au requérant du fait d’une moindre fatigue et d’un moindre stress par le filtre de l’écran. Les dispositions ont été prises pour que la vidéo-audience ne porte pas préjudice aux droits des requérants : présence de l’avocat et d’un interprète, liaison confidentielle et de qualité.
Pour autant je suis tout naturellement réceptif à la critique faite à l’endroit de l’alinéa 8 de l’article 16 aux termes duquel le consentement du requérant ne sera pas obligatoire dans l’hypothèse du recours à un tel dispositif. L’avis du Conseil Constitutionnel de 2003 jugeait d’ailleurs que ce consentement était nécessaire au risque que le dispositif soit frappé d’inconstitutionnalité.