Plan d’économies sur les dépenses publiques : Eric Alauzet : « répondre à la dette et relancer notre économie, mais jusqu’à quand et avec quelle garantie de justice ? »

Le Premier ministre, Manuel Valls, a présenté mercredi 16 avril devant la presse le détail d’un plan d’économies sur les dépenses publiques entre 2015 et 2017. Voir ci-dessous l’ensemble de la déclaration prononcée.

 

Eric Alauzet a souhaité réagir à ces annonces.
Pour le député du Doubs, « les mesures prises depuis 2012 n’ont pas produits d’effets suffisants pour répondre à la priorité absolue de la majorité présidentielle qui est  la création d’emplois. »

Pour atteindre cet objectif, le gouvernement pense essentiel de soutenir les entreprises françaises en difficultés dans la concurrence internationale (notamment nombre de TPE/PME/ETI)  alors que les prélèvements obligatoires (PO) sur les entreprises ont diminué partout en Europe sauf en France, même si cette réponse conforte le  dumping social à l’œuvre en Europe (vis à vis des pays en développement c’est le cas depuis longtemps) diminué.

« Mais il faut s’assurer que les marges de manœuvre retrouvées par les entreprises ne nourriront ni les dividendes ni les revenus élevés. Pour cela, il faut des garde-fous, des contreparties qui restent pourtant difficiles à préciser et surtout à mettre en œuvre. D’où l’importance du dialogue social au sein de l’entreprise pour empêcher que les marges financières nouvelles aillent nourrir les dividendes ou les hauts revenus. Ce dialogue social qui doit être renforcé car il est indispensable à tout pacte ».

Le financement de ces baisses de prélèvement se fera sans recourir à des impôts nouveaux alors qu’ils ont augmenté de 80 milliards entre 2010 et 2014, et que le « le ras le bol fiscal » est très présent.

La baisse de la dépense publique, confirmée ce mercredi par le Premier ministre, ne sera pas accentuée par rapport aux cinquante milliards déjà annoncés dès novembre 2013 pour assurer le remboursement de la dette. « En fait, il n’y a pas d’aggravation récente de la pression sur la dépense publique si ce n’est une déclinaison concrète avec les mesures présentées par Manuel Valls. Le financement  de ces avantages serait assuré par la relance de l’activité et l’augmentation des recettes. C’est un pari. »

« Le Gouvernement sait parfaitement que la réduction trop brutale et trop importante de la dépense publique peut avoir des effets contreproductifs sur l’emploi public et sur l’économie elle-même. »

Très concrètement, les annonces (gel des retraites, du point d’indice du salaire des fonctionnaires, des prestations sociales, report de l’augmentation des minimas sociaux) sont brutales et déstabilisantes pour la population qui ressent devoir faire encore des efforts pour répondre à la dette et relancer notre économie, mais jusqu’à quand et avec quelle garantie de justice ?

La dureté de la situation et des solutions proposées exige une fois encore de recenser toutes les alternatives possibles. Et le député du Doubs de les évoquer :

– « Annuler tout ou partie de la dette ou des intérêts de cette dette ? La France ne peut pas le faire seule et ce ne peut être qu’une mesure prise en cas d’extrême gravité. Si les créanciers étaient raisonnables ils y consentiraient avant de peut-être perdre plus. L’histoire en rapporte quelques précédents. J’y suis favorable d’autant que les créanciers ont largement bénéficié de la situation. Mais il ne faut pas non plus dissuader tout prêteur de s’engager »

– « Faire payer les entreprises – particulièrement les multinationales qui pratiquent l’évasion fiscale ? la France ne le peut pas seule. Mais j’y suis également favorable et j’œuvre avec détermination dans ce sens. L’Europe et l’OCDE s’y emploient vraiment. L’évasion fiscale des ménages a été traitée énergiquement avec la loi contre la fraude et la grande délinquance économique et financière (loi Cahuzac). Elle a vu le retour de 18 000 contribuables avec un potentiel de ¾ Milliards d’Euros. ». Pour les multinationales, c’est une autre paire de manches car nous avons face à nous des monstres, qui savent faire appel aux plus grandes compétences juridique et financières.

–  « Dévaluer l’Euro ? Ce serait bénéfique pour nos exportations.  Mais ce n’est pas la solution miracle non plus. Mais j’y suis encore favorable. Il faut quand même rappeler que, malgré l’Euro fort, la balance commerciale de l’Europe reste positive. Et que ce que l’on va gagner d’un côté, on le perdra en importation, notamment en coût énergétique pour les entreprises énergivores, d’autant plus que notre balance commerciale est déficitaire. Il y a aura les gagnants et les perdants, selon la part énergétique dans les coûts de production. »

– « Relancer les investissements (écologiques) en Europe et la consommation dans les pays européens en bonne santé économique. Bravo ! Faut il trouver une majorité en Europe pour ce faire, sans croire naïvement qu’il suffirait que la France hausse le ton pour que cela advienne. Et quoiqu’il en soit, il faudra trouver les moyens financiers de ces investissements dont rien n’assurent d’ailleurs qu’ils seront « verts ». Il y a de nombreuses années déjà, je mettais en garde face au développement à crédit en précisant que le jour où la prise de conscience environnementale serait majoritaire, nous n’aurions plus les moyens de nos ambitions !

– « Augmenter les impôts, par exemple en réduisant/annulant les niches fiscales anti environnementales ? Quasi impossible en période de « ras le bol fiscal » car cela revient à une augmentation d’impôt et à une diminution de pouvoir d’achat qui touche d’abord les plus modestes. Ou alors il faut restituer cette somme sous forme d’un « chèque vert»t. Mais dans ce cas, il n’y a aucune recette budgétaire et on maintient les déficits. »

– « Renoncer temporairement à stabiliser la dette (elle augmente encore de 75 milliards en 2013…. contre 150 en 2011 quand même) voire l’augmenter s’il faut trouver les moyens financiers d’investir dans la transition écologique ? Cela paraît une solution réaliste, elle est proposée par EELV et la gauche du PS. Elle risque néanmoins de menacer l’Union européenne et les comptes de notre pays. » Mais « Peut-on en attendre un résultat ? » se demande, en poursuivant la réflexion, Eric Alauzet.

« Rien n’est moins sûr. En effet, depuis 30 ans, il y a eu cinq périodes de relance par la demande, la première avec Raymond Barre, elles se sont toutes traduites par une augmentation de la dette deux à trois années plus tard. D’où la situation actuelle.

« Peut-on et doit-on au moins ralentir le rythme de réduction des déficits comme le propose le groupe des 88 députés socialistes ? » « Cela a été la position du groupe écologiste depuis le début du mandat. Au moins ces élus socialistes sont-ils responsables et crédibles puisqu’ils demandent de limiter la réduction de la dépense publique à 35 milliards d’Euros au lieu de 50 sur les trois ans qui viennent.  Pour autant, cette stratégie ne donnerait pas de nouveaux moyens financiers pour réaliser la transition énergétique et écologique. Mais sans doute doit-on aussi envisager cette transition à moyens constants avec des arbitrages et des diminutions de budget sur des postes non prioritaires. Et tout ne coûte pas. »

«  Enfin, il faut se souvenir que la France a déjà bénéficié d’un délai supplémentaire de deux ans pour atteindre les 3%, il y a donc eu assouplissement de la trajectoire et affaiblissement de la parole de la France. Il faut aussi expliquer que 3%, cela correspond en théorie au niveau à partir duquel on n’aggrave plus la dette, mais à condition d’une croissance à 3% et d’un encours de dette à moins de 60% du PIB. Or, dans la situation actuelle, l’équilibre est bien en dessous des 3%. En 2013, avec un déficit à (seulement) 4,3%, on a encore creusé la dette de 75 milliards d’Euros. »

« Il serait bien présomptueux de prétendre détenir la solution et d’assurer le succès d’une voie ou d’une autre » mais le député souhaite que toutes ces pistes soient mises au débat dans les prochains jours pour les choix du gouvernementaux et les votes des parlementaires concernant les différents textes qui traduiront ces orientations. Prochain étape, le pacte de stabilité vis-à-vis de l’Union européenne, le 30 avril prochain.

 

 La déclaration de Manuel Valls :

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