Loi « secret des affaires » : les droits des citoyens et la liberté d’information sont garantis
« Secret des affaires », liberté d’information, droit d’alerte et représentation du personnel : des objectifs compatibles
De nombreux citoyens se sont inquiétés de l’adoption de la loi de « protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicite », dite loi « secret des affaires », transposant la directive 2016/943/UE du 8 juin 2016. Les motifs de cette inquiétude sont compréhensibles : il est essentiel de s’assurer que les droits des citoyens soient protégés et que la révélation d’actes dangereux et répréhensibles se fassent sous la protection des autorités françaises et non dans la crainte de sanctions. L’importance de cette exigence a encore été soulignée par la révélation de nombreux scandales dans lesquels les lanceurs d’alertes ont protégé les intérêts des citoyens contre l’action néfastes de grandes entreprises.
Cependant, l’objectif de la loi adoptée, c’est-à -dire sanctionner la divulgation d’informations confidentiels, de savoir-faire et d’innovation, appartenant à une entreprise, est compatible avec cette exigence. Lors des débats européens autour de la directive, des dispositifs spécifiques avaient été prévus pour protéger journalistes et lanceurs d’alerte. Attentif aux alertes des associations, le député Eric Alauzet s’est assuré que ces dispositifs accordent une protection réelle, efficace et effective. A l’issue des débats parlementaires, ils ont été clarifiés et renforcés. La loi intègre des dérogations notables au secret des affaires pour les journalistes, pour les personnes révélant des informations pour un motif d’intérêt général mais aussi pour les représentants du personnel.
Contrairement au discours de certains, l’examen de la loi n’a pas été effectué « en catimini » ou de manière « expéditive ». Le calendrier choisi a permis de respecter la date limite de transposition de la directive européenne fixée au 9 juin 2018. L’examen a tiré parti des débats européens antérieurs tout en aménageant les dispositions au cadre légal français, notamment à celui établit par la loi Sapin II en terme de protection des lanceurs d’alerte et auquel le député Eric Alauzet avait fortement contribué.
Ainsi, le texte permet de garantir une saine concurrence entre entreprise, de lutter contre les pratiques déloyales (espionnage industriel…) et, en définitive, de favoriser l’investissement des entreprises dans la recherche et le développement.
La protection des lanceurs d’alerte dans le texte définitif : des clarifications et ajouts qui assurent la pérennité du droit d’alerte
Un élément, lié à la définition du lanceur d’alerte, a particulièrement été débattu en Commission des lois comme en Séance Publique et mérite d’être relaté. En effet, la loi utilise concomitamment deux définitions du lanceur d’alerte : la définition de la loi Sapin II et celle de la directive. Les associations et certains parlementaires ont craint que ce double emploi ne se transforme en une définition unique combinée qui serait bien plus restrictive et remettrait en cause la protection des lanceurs d’alerte avec un écrasement de la définition Sapin II. Le Député Eric Alauzet a alors co-signé un amendement avec le Député Paul Molac examiné en Commission des Lois afin d’éclaircir et de sécuriser ce point.
Le rapporteur Raphaël Gauvain a alors clairement indiqué que la loi visait à permettre l’emploi des deux définitions. Il a notamment insisté :
« Nous débattons ici de l’alternative entre « y compris » et « ou », mais la question se posera surtout devant le juge qui, de son côté, devra interpréter la loi. Il pourra se poser cette question et, pour que son interprétation lui permette de déterminer s’il y a bien cumul entre la définition européenne et celle de la loi Sapin II, il pourra prendre connaissance de nos travaux qui donnent lieu à des comptes rendus. Les échanges que nous avons eus résoudront toute ambiguïté concernant l’expression « y compris », qui inquiète certaines ONG comme Transparency International. Tout doute sera donc levé. Encore une fois, nous souhaitons cumuler les deux régimes. ».
Le juge a constamment le souci de se référer à la volonté du législateur pour statuer. Le choix fait dans la loi permet donc d’obtenir une utilisation large du droit d’alerte, le contenu des débats fourni une base solide au juge pour interpréter le texte dans ce sens (l’intention du législateur est manifeste). A noter, l’ajout de la définition européenne à celle de la loi Sapin II permet d’étendre le droit d’alerte à des personnes morales.
Deux amendements complémentaires ont été adoptés en séance pour clarifier les dérogations applicables au droit d’alerte :
- Amendement 55 : introduction de la notion de « comportement répréhensible » au lieu de simplement « acte répréhensible » qui étend la portée de l’exception et assure l’intégration de comportements non-illégaux. L’amendement insiste indirectement sur le maintien de la définition Sapin II.
- 56 : clarification du motif « protection de l’ordre public » avec le remplacement par « empêcher ou faire cesser ».
En complément des réponses apportées lors des débats, ces amendements répondent aux craintes des associations sans remettre en cause l’utilisation de la double définition.
De plus, un amendement renforçant la protection des journalistes et lanceurs d’alerte face aux tentatives d’acharnement judiciaire a été adopté. Il accroît les sanctions pour procédures abusives et demandes de dommages et intérêts disproportionnés, avec une compensation qui pourra désormais atteindre 20% du montant de la demande de dommages et intérêts ou 60 000 euros en l’absence de demande (contre 10 000 euros maximum auparavant).
En parallèle, le gouvernement a posé un projet de loi pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscale. Ce projet devra être l’occasion de s’assurer que les entreprises, qui voient la protection de leurs propriétés renforcée, se conforment à la loi et contribuent de manière appropriée à la solidarité nationale en payant régulièrement les impôts dus. Le député Alauzet, engagé de longue date sur ce sujet et qui a poursuivi son travail de proposition lors de l’examen du projet de loi de finances, continuera de porter des solutions ambitieuses pour remplir cet objectif.