Le nouveau plan contre le racisme et l’antisémitisme : une lutte « plus efficace » contre le « déferlement » de haine sur Internet

Le nouveau plan contre le racisme et l’antisémitisme vise à mener une lutte « plus efficace » contre le « déferlement » de haine sur Internet, en contraignant les opérateurs à « prendre leurs responsabilités ».

Edouard Philippe a dévoilé lundi 19 mars à Paris, au Musée national de l’histoire de l’immigration, un nouveau plan contre le racisme et l’antisémitisme pour la période 2018-2020. Ce dispositif fait suite à celui lancé après les attentats de 2015, dans un contexte de flambée des actes antisémites et anti-musulmans.

Il est très attendu car, si le nombre de faits haineux a reculé en 2017 pour la deuxième année consécutive (-16 %), le nombre d’actions violentes est en augmentation. « Les statistiques ne rendent pas compte du déferlement de haine qui s’exprime de manière quotidienne sur Internet », écrit le Premier ministre en préambule de ce plan national.

 

La lutte contre la cyberhaine constitue le premier et principal volet du dispositif. Si le gouvernement entend « proposer une initiative législative européenne pour imposer un retrait plus rapide des contenus illicites et renforcer le régime de responsabilité des opérateurs », il va aussi modifier « sans attendre » la loi française.

Une mission sur ces modifications législatives sera confiée à l’enseignant franco-algérien Karim Amellal, à la députée LREM Laetitia Avia et au vice-président du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France) Gil Taïeb. Avec pour exemple l’Allemagne, qui menace les réseaux sociaux d’amendes allant jusqu’à 50 M€ s’ils ne retirent pas sous 24 heures les propos haineux.

« On ne me fera jamais croire que les réseaux sociaux seraient des espaces hors-sol. Pour moi, tout ce qui est publié et diffusé en France, est publié et diffusé en France. Et doit donc répondre aux lois de la République », a souligné Edouard Philippe dans son discours. « Ce qui m’énerve, c’est que de nos jours, il semble plus facile de retirer la vidéo pirate d’un match de foot que des propos antisémites », a-t-il insisté.

Parmi les autres pistes envisagées figure la « fermeture des comptes ayant diffusé de manière massive et répétée » des messages de haine. L’exécutif veut également « permettre l’enquête sous pseudonyme » : en s’invitant dans des espaces de discussion en ligne, les cyberenquêteurs pourront plus facilement identifier les auteurs de propos haineux. Cette mesure sera incluse dans le projet de loi sur la justice qui doit être présenté en Conseil des ministres le 18 avril.

 

  •  Renforcer les effectifs de la plateforme Pharos

En matière de lutte contre la cyberhaine, le gouvernement prévoit :

  1. de renforcer les effectifs de la plateforme de signalement de contenus illicites Pharos. Des personnes condamnées à des travaux d’intérêt général pourraient être affectées, dans des associations, à des tâches de modération et de signalement de propos haineux.
  2. Pour mieux prendre en compte les victimes et réduire le « chiffre noir » – phénomène selon lequel beaucoup d’actes racistes ne sont pas déclarés -, l’Etat va expérimenter dès septembre la création d’un réseau d’enquêteurs et de magistrats spécifiquement formés à la lutte contre la haine.
  3. L’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) étudiera la possibilité de permettre à un plaignant de qualifier lui-même le mobile raciste ou antisémite de son agression, comme c’est le cas au Royaume-Uni.
  4. En outre, une expérimentation visant à étendre le champ d’application de la pré-plainte en ligne aux discriminations et aux infractions de provocation à la discrimination, diffamation et injure racistes sera lancée à la fin de ce premier semestre.

 

  • Éduquer contre les préjugés

Quant au volet éducatif, le plan propose un travail de prévention et de formation dans le cadre de l’éducation nationale. Il prévoit notamment :

  1.  la création d’une « équipe nationale de réaction » afin d’assister enseignants et acteurs de terrain confrontés à des situations conflictuelles ;
  2. de renforcer la formation de l’ensemble des personnels des établissements à la prévention et la gestion des faits et propos à caractère raciste et antisémite ;
  3. de renforcer le réseau des référents racisme antisémitisme dans les établissements d’enseignement supérieur ;
  4. et de créer deux bourses de thèse pour financer des travaux sur le racisme et l’antisémitisme.

 

  •   Investir des nouveaux champs de mobilisation

Objectif affiché dans ce chapitre : renforcer les réseaux territoriaux et améliorer le dialogue avec la société civile. Les élus locaux, les milieux sportifs, la culture et la communication seront ainsi l’objet d’actions particulières. Parmi les mesures avancées :

  1. développer le maillage territorial par la réalisation d’au moins cinquante plans territoriaux de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations ;
  2. créer un portail d’information et d’aide aux victimes de haine ou de discrimination raciste et antisémite.

 

Le gouvernement précise par ailleurs que ce plan triennal fera l’objet d’une évaluation indépendante croisée de la part de la Commission nationale consultative des droits de l’homme et des missions d’inspection de l’Etat, et un point d’étape sera effectué dix-huit mois après son lancement.

Retrouvez l’intégralité du plan national contre le racisme et l’antisémitisme (2018-2020) : 

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