15 novembre 2006

TIPP intervention : Eric DURAND

Assemblée Plénière du 13 novembre 2006

Justifier une augmentation d’une taxe ou d’un taux d’imposition n’est jamais facile pour les élus d’une collectivité. Le choix de faire porter sur telle ou telle catégorie d’usagers ou de contribuables les répercussions financières d’une augmentation fiscale n’a rien d’anodin.
Se pose rapidement le souci de l’équité, de la justesse de la pression fiscale par rapport à une population dont les revenus et les usages sont si différents.

Pour notre collectivité, la marge de manœuvre est extrêmement faible.
Si en tant que Verts nous sommes favorables au principe de la décentralisation, nous regrettons que l’Etat ne nous donne pas les moyens d’accomplir nos missions, ou tout du moins les outils fiscaux nous permettant de le faire.
On se rapproche plus de la notion de déconcentration de services que de celle de décentralisation proprement dite, sans même en avoir les moyens à minima.
Le gouvernement semble prendre les collectivités territoriales pour des chambres consulaires, ou des services déconcentrés. Il nous donne des missions avec des dotations minimums et occulte notre faculté à délibérer.
Les verts sont attachés à la décentralisation, mais une véritable décentralisation implique une responsabilité des élus locaux, et donc la possibilité de gérer les recettes comme les dépenses.

Qu’est ce que l’autonomie des collectivités sans l’autonomie de leurs revenus ? Quel sens cela peut-il avoir de transférer des compétences aux régions et de plafonner leur capacité d’augmenter leur taux d’imposition, avec par exemple le bouclier fiscal, le plafonnement de la Taxe Professionnelle à 3.5% de la valeur ajoutée, ainsi que la création d’une fourchette pour les taux de la TIPP ?
Nous sommes devant une attitude de néo-jacobinisme, qui au delà de la posture d’arrière garde qu’elle représente, entraîne une inégalité de nos concitoyens selon les régions où ils résident.

Nous n’avons pas non plus la possibilité de lever un impôt dépendant du revenu. Une Région, dont les citoyens ont fait appel à des élus de gauche pour les administrer, est donc contrainte d’augmenter ses impôt de manière unilatérale, sans pouvoir corriger par l’impôt, les fortes inégalités qui existent sur son territoire.
Impossible donc de pouvoir user du levier le plus noble de l’impôt sur le revenu qu’est celui de la solidarité.

Il existe une autre vertu de la fiscalité, celle de l‘incitation. Inciter, c’est-à-dire utiliser une taxe comme vecteur d’un nouveau comportement vital pour la société, et profiter de ses recettes pour conduire des politiques allant dans ce sens. Un exemple récent : nous avons déjà pris une option dans cette direction, lors des orientations budgétaires avec l’exonération de la taxe sur la carte grise pour les véhicules propres.

Avec la TIPP, et malgré la faible marge que nous laisse l’Etat, pour faire varier les taux, nous avons là, à notre modeste portée, un levier nous permettant d’agir pour faire évoluer les comportements. Un automobiliste peut trouver un avantage financier à utiliser une alternative à la voiture, l’ère de la voiture pas chère est terminée. On peut marcher pour aller chercher sa baguette de pain, prendre le bus, le vélo pour ses déplacements en ville, et le train pour les déplacements interurbains.
Pour l’automobiliste, l’impact financier de la part régionale de la TIPP (taux actuel + diminution de la réfaction votée ce jour) est certes faible. Considérant, une personne prenant sa voiture chaque jour pour acheter sa baguette de pain à 500 m de son domicile, il lui en coûtera en frais d’essence globaux 43 € par an dont 78 centimes pour le conseil régional (un surcoût donc de 37 centimes par rapport à maintenant).
D’ou le caractère hautement symbolique de cette mesure, mais qui doit être prise au sérieux.
Du point de vue des finances régionales, la mesure, n’est pas neutre, puisqu’elle permet de doubler nos recettes venant de la TIPP, de 10M€, nous passons à 20 M€/an.
Ainsi presque 5% de nos recettes seront issues de la part régionale de la TIPP.

Je n’exclues pas de mon propos une grande partie de la population que je qualifierais de « automobilo-captive », qui, pour des raisons géographiques ou d’horaires, n’a que très peu d’alternatives à la voiture, notamment dans les déplacements domicile - travail. C’est aussi pour eux que des efforts doivent être faits par les collectivités pour augmenter l’accessibilité aux transports en commun, au système de co-voiturage, aux parkings d’entrée de ville, aux locations de vélos etc.

Les taxes, si elles ne permettent pas de moduler la pression fiscale en fonction des revenus, ont un mérite en plus de celui que je viens d’exposer, c’est celui de faire peser les coûts sur celui qui les engendre le plus. C’est à dire que sur la thématique énergétique, et devant les enjeux des bouleversements climatiques, il nous faudra bien appliquer une sorte de taxe du type « pollueur - payeur », qui existe d’ailleurs pour les pays signataires du protocole de Kyoto avec les droits d’émissions de carbone.
Plus on consomme du pétrole, plus on produit de CO2, plus notre bilan carbone est élevé, plus on doit contribuer financièrement à la collectivité pour qu’elle développe des stratégies et moyens pour enrayer cette mécanique fatale.

Je terminerais mon propos, comme je l‘ai commencé, sur la justification d’une augmentation d’une taxe, en disant que celle-ci, est à nos yeux, vous l’aurez compris, parfaitement utile, même indispensable. Si cette mesure n’amenuise pas le caractère fiscalement non vertueux de la TIPP (je le rappelle : plus la collectivité fera des efforts pour réduire la consommation de pétrole moins elle percevra de recettes), de part sa portée symbolique, elle donne un message clair aux franc-comtois, celui de prendre leurs responsabilités face au réchauffement climatique, et peut être celui, plus douloureux, d’expliquer que l’effort colossal qui nous attend dans ce domaine, aura un coût, que nous devrons tous partager.(calculer votre empreinte écologique).
Je vous remercie

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