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Transition écologique

Portrait Gilles Deguet

Conclusion de Gilles Deguet

 

Premièrement, est-il pompeux de parler de transition ? Pendant que j’y suis, transition énergétique, cela fait partie de la transition écologique mais pas l’inverse. L’un est dans l’autre, pas l’autre dans l’un, mais il y a les deux. Est-ce pompeux ? Ou plus précisément cela a-t-il du sens d’être pompeux ? Je pense que cela a absolument du sens de montrer que nous sommes en train de changer des choses de façon assez fondamentale.

Si vous regardez la trajectoire sur laquelle nous avons travaillé, par exemple vis-à-vis des logements : pendant 30 ans, nous avons pris un retard considérable sur l’isolation parce que nous avions de l’énergie abondante. Il faut redresser complètement la trajectoire, donc nous sommes bien sur une transition forte. Peut-être même est-ce plus qu’une transition : c’est peut-être tellement violent que ce sera un peu au-delà d’une transition. En tout cas, c’est notre travail d’arriver à en faire une transition acceptable et faisable, mais elle nécessite vraiment des changements.

Reprenons la question de l’économie circulaire. Vous êtes plusieurs à avoir dit que beaucoup de choses se faisaient : des éléments sur l’économie de la fonctionnalité, sur la réutilisation, etc. Il y en a un peu partout.

 

Qu’est-ce qui est intéressant dans le concept de l’économie circulaire ? Voici dix ans, quand quelqu’un disait : «Il faut aller vers une stratégie zéro déchets», tout le monde lui riait au nez. C’était complètement impossible, on avait un tas de déchets, il fallait bien en faire quelque chose, je vous passe les incinérations, les enfouissements, etc. ! Maintenant, le terme même de «déchets» va disparaître. C’est un changement
suffisamment radical pour que même Jean Delavergne parle de «réutilisation des déchets», alors que vous avez vu que nous avions soigneusement écarté le terme «déchets», sauf pour dire qu’il fallait les éviter. Il y a bien une modification absolument fondamentale de la façon dont nous travaillons ; il faut l’indiquer et la donner comme telle.

Je n’explique pas l’économie circulaire, Anne Leclercq l’a fait de façon absolument remarquable, mais ce concept de boucle a les intérêts qu’elle indique. Je voudrais vous en donner un autre. La question porte sur la longueur de la boucle : plus elle est courte, mieux cela vaut. C’est la raison pour laquelle la réutilisation est mieux que le recyclage, etc. De plus, il faut que la boucle soit reconductible. Or, elle ne l’est pas forcément. Prenez l’exemple du papier recyclé : c’est très bien. Le seul petit inconvénient est que les
fibres se raccourcissent chaque fois car il est haché, etc., donc, à la quatrième ou cinquième
utilisation, il devient un peu dur et il faut remettre de l’amidon et autres.

 

Nous serons obligés de réfléchir comme suit : il ne s’agira pas de dire que l’on recycle, il faudra étudier le processus de recyclage. Nous entrons donc dans une mode de réflexion absolument différent ; nous en sommes aux prémices, mais ce changement de conception est fondamental.

 

Quelques éléments supplémentaires : le changement est tel qu’il faut plus de transversalité. Pour autant, Isabelle Gaudron l’a très bien dit, cela porte sur des politiques existantes, donc je vais me concentrer sur les nouvelles mesures. Un mot de réponse à Gisèle Quérité, qui est entrée très en détail sur les questions
de rénovation thermique. Je ne suis pas complètement en accord sur trois des points qu’elle a
soulevés.

Premier élément : la réglementation thermique désavantage-t-elle l’électricité ? Ce n’est pas complètement vrai. La réglementation thermique désavantage l’électricité utilisée par effet joule, c’est-à-dire avec des radiateurs car on applique le coefficient 2,58 qui correspond à l’efficacité actuelle de la production d’électricité. De fait, cela décourage l’effet joule. Cela décourage-t-il la pompe à chaleur mise sur géothermie ? Non, parce que ce coefficient de 2,58 est compensé par ailleurs par un coefficient d’efficacité qui est de l’ordre de 3 ou 4. Grosso modo, on retombe sur nos pieds. Il est faux que l’actuelle réglementation désavantage ces éléments de travail par pompe à chaleur. Pour parler un peu plus clairement, bien sûr, ce qui doit être favorisé, c’est tout ce qui est strictement renouvelable, c’est-à-dire la géothermie, les éléments solaires thermiques et le bois, dans la mesure où il est sur un cycle relativement court.

Deuxième élément : faut-il baisser les exigences ou les relativiser ? Nous avons déjà eu cette expérience avec le logement social. On est venu nous dire : «Attention, nous n’y parviendrons pas.» Nous avons maintenu les clauses et nous y sommes parvenus. Je vous rappelle que nous avons été submergés de demandes. Il nous semble, de façon très claire, qu’il faut maintenir un niveau d’exigences élevé et obtenir que les coûts baissent. Ne commençons pas à réduire ces exigences ; sinon, nous entrerons dans des processus où il faudra intervenir deux ou trois fois sur des bâtiments. Or, c’est très dépensier. Il est difficile de recommencer très rapidement parce que les gens y habitent et cela coûte cher.

Troisième élément : la maîtrise d’ouvrage. Précisément, les plateformes que nous mettons en place tiennent au fait qu’en France, la rénovation, pour les maisons individuelles, ne se fait pas en maîtrise d’ouvrage. Il est tout à fait important qu’il y ait de la maîtrise d’ouvrage mais il faut aussi être capable d’intervenir quand il n’y en a pas. Pour cela, le concept que nous développons est d’avoir une action concertée par groupement d’artisans. Dans les plateformes, nous voulons créer le groupement d’artisans cohérent, en mettant dans un premier temps des accompagnateurs. C’est cette formation que nous vous demandons d’autoriser et que nous allons faire avec d’autres Régions.

Nous sommes bien sur un secteur où nous cherchons à permettre à l’artisanat de répondre à une offre. Vous avez parfaitement raison de dire que les contre-références sont dramatiques, de ce point de vue. Il faut que l’artisanat soit capable de répondre. C’est un enjeu extrêmement important, puisque c’est un modèle d’intervention sur le bâtiment par l’artisanat, auquel nous tenons particulièrement. Pour cette raison, nous avons mis en place Envirobat et nous ne voulons pas que ce marché soit pris par de grands groupes qui peuvent débarquer d’un seul coup et proposer des solutions standardisées, probablement de mauvaise qualité mais attractives directement. C’est extrêmement important, la question des plateformes est fondée là-dessus.

Un point sur la stabilité, Monsieur Novelli : quand on a un dispositif et que l’on pense qu’il plafonne, ce qui est le cas pour Isolaris – pour lequel nous nous posons la question depuis deux ans –, il faut s’interroger sur son évolution et il est légitime de le faire. Le garderons-nous ? Oui, parce qu’il est identifié. À la limite, nous aurons probablement deux dispositifs sur Isolaris, mais il est important de garder cette continuité et j’insiste sur le fait qu’Isolaris, dans notre esprit, est complémentaire des dispositifs existants. S’ils s’unifiaient tous, ce serait bien, mais nous pensons que cela ne pourra pas se faire tout de suite, donc nous créons un dispositif conçu comme étant le complément de dispositifs existants. C’est bien en ce sens que nous voulons aller.