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Orientations budgétaires: intervention principale du groupe EELV

Portrait Jean Delavergne

Intervention de Jean Delavergne

Monsieur Le Président, Mesdames, Messieurs,

L’année 2013 s’annonce comme une année pleine de graves dangers. 
En Europe, que ce soit dans les pays de la zone Euro où dans les pays comme la GB qui ont gardé l’intégralité de leur souveraineté monétaire, la récession menace. Le niveau de chômage a d’ores et déjà dépassé les niveaux les plus hauts atteints en 2009-2010.
Il faut rappeler d’abord comment on en est arrivé là.  Rappeler que c’est, en septembre 2008, 4 ans déjà !, que la faillite de la banque d’affaires Lehman Brothers a entrainé le monde dans une crise d’ampleur sans précédent depuis les années 1930. Rappeler que ce qui nous a précipités dans cette crise c’est la dérégulation financière, soutenue avec constance  par toutes sortes de politiques libérales depuis les années 1980. Rappeler que pendant les années 2000, en particulier, banquiers, fonds spéculatifs et autres financiers en ont profité pour s’enrichir grassement en nourrissant une spéculation d’ampleur historique.
Une fois la crise declenchee, en 2009,  pour éviter l’effondrement des institutions financières et de certaines grandes entreprises, les gouvernements ont alors cru necessaire de mobiliser des milliers de milliards d’€, aggravant ainsi fortement les déficits et les dettes publics.
Il faut être clair : c’est donc bien une crise du capitalisme financier qui a entrainé l’économie  vers l’abime et non pas la soit disant « crise des dettes souveraines » dont on ne cesse de nous rabattre les oreilles.
Cela ne veut pas dire qu’aujourd’hui, il ne soit pas extrêmement difficile pour les Etats de faire face à cet endettement, surtout lorsqu’on a laissé les marchés financiers devenir les seuls juges du bien fondé des politiques publiques, en leur abandonnant la possibilité d’imposer à leur gré des taux d’intérêt usuraires. Mais il ne faut pas confondre l’effet (la crise de la dette) avec la cause (la crise du capitalisme financier).

Malheureusement, comme si cela ne suffisait pas, à partir de 2010, les gouvernements européens à commencer par le couple Merkel-Sarkozy n’ont rien trouvé de mieux  que d’imposer une cure drastique d’austérité. Là où il aurait fallu une véritable relance européenne, permettant en particulier d’assurer la nécessaire transition écologique, on a prétendu au contraire  administrer au malade un remède qui risque bien de le tuer ou du moins de le plonger durablement dans la dépression.

Pour ce qui concerne la France, les cadeaux fiscaux distribués par M Sarkozy particulièrement aux plus riches ont aggravé considérablement les inégalités et les problèmes de finances publiques. Rappelons que selon les sources, ces cadeaux fiscaux sont estimés entre 50 et 75 milliards d’€… ce qui représente tout de même pas loin du tiers de la dette publique !
Le nouveau président de la République a donc hérité de deux cadeaux empoisonnés, un déficit public représentant 4,5% du PIB, associé à une dette de 90% du PIB.
Dans une telle situation la nouvelle  majorité a donné la priorité à la justice sociale et nous ne pouvons que nous en réjouir. Nous soutenons notamment le fait d’aller vers une taxation plus équitable entre les revenus du capital et ceux du travail. 
Et ce ne sont pas les piaillements de quelques bêtes à plumes, qui ressemblent à vrai dire plus à des « vautours » qu’à des « pigeons », qui nous ferons changer de point de vue.
Nous soutenons l’effort de redressement des comptes publics sans lequel nous risquerions effectivement demain de passer totalement sous la coupe des marchés financiers. Nous soutenons aussi le fait que la priorité soit donnée à la fiscalité pour assurer ce redressement, à la condition que chacun contribue bien selon ses facultés – comme le disait la déclaration des droits de l’homme de 1789- et que la contribution soit donc bien répartie de façon équitable.

Mais nous nous interrogeons sur le rythme de ce redressement des finances publiques. Ne risque-t-on pas en soumettant toute la construction budgétaire à l’objectif de 3% d’étouffer le peu d’activité qui demeure, entrainant par là non seulement de graves conséquences sociales mais aussi des recettes fiscales moindres et au final des déficits inchangés voir aggravés.
Pour nous, disons le clairement, même si la voie est étroite, il serait possible de faire mieux.
Nous pensons par exemple que l’on devrait s’attaquer aux niches fiscales anti-écologiques (kérosène, pesticides détaxés, avantages pour le diesel, etc.). D’après Guillaume Sainteny, directeur de la chaire « développement durable » à l’école Polytechnique, 50 milliards de subventions sont ainsi accordées chaque année à des activités polluantes en France, soit selon les calculs de cet auteur de trois à cinq fois plus que celles dédiées à la protection de l’environnement.
Pour illustrer cette nécessité de revisiter ces niches fiscales anti-écologiques nous vous soumettrons ce soir un vœu proposant de remettre enfin en cause les centaines de millions d’€ d’argent public investis dans la filière agro-carburants en pure perte… du moins pour l’intérêt général.
Dans une situation aussi grave, nous nous interrogeons plus généralement sur le sens,  l’orientation stratégique choisie pour assurer le redressement productif.

Nous ne ressortirons pas de la crise comme nous y sommes entrés : ceux qui rêvent de voir reprendre un mode de développement et de croissance du type « 30 glorieuses » sont totalement à côté de la plaque. Ils ne prennent pas en compte le fait que depuis les années 60, décennies après décennies le taux de croissance moyen n’a jamais cessé de diminuer mais surtout que pour la 1° fois, une profonde crise économique et sociale se combine avec une crise écologique mondiale tout aussi profonde. Il suffit par exemple d’étudier un peu le marché des matières premières pour comprendre qu’on ne pourra pas faire croitre éternellement leur consommation alors même qu’on a affaire à des ressources naturelles limitées.
Quand on entend que d’après M Gallois l’avenir de la France serait dans le nucléaire et les gaz de schistes on ne sait s’il faut le plus s’interroger sur son état de santé… ou admirer la force des lobbys !
Parier sur des secteurs dépassés, sur des modes de développement archaïques, c’est gaspiller outre les ressources naturelles, les rares ressources financières qui nous restent.  A l’inverse pour nous le seul choix « rigoureux », au bon sens du terme, c’est de faire entrer notre pays avec détermination et volontarisme dans la transition écologique et sociale. Transition Sociale parce que seul un développement plus juste, plus équitable, plus respectueux des hommes, permettra de traverser les épreuves qui viennent en maintenant  la cohésion sociale. Transition Ecologique parce qu’il s’agit là réellement de l’avenir : pour ne reprendre que le problème des matières premières, seules les économies qui sauront réduire drastiquement leur utilisation, seules celles qui sauront donner beaucoup plus de place qu’aujourd’hui à la sobriété, au recyclage, à la réutilisation, à la réparation… seules ces economies seront demain réellement demain les plus compétitives. Ceux qui veulent rester sur des modèles de croissance basés sur le gaspillage des ressources ne visent en fait qu’à préserver les intérêts à courte vue de certains lobbys mais ils nous font prendre un retard dramatique.
Il nous semble beaucoup plus porteur d’avenir de travailler comme le fait la ministre du logement à un grand plan de rénovation thermique des logements anciens : c’est bon pour la planète, c’est bon pour le pouvoir d’achat des ménages et c’est bon pour l’emploi.

Mmes, Mrs
C’est dans ce contexte bien incertain mais plein aussi de possibilites, que nous devons examiner les Orientations Budgétaires. Nous verrons d’abord quelles sont les priorités que nous devons retenir avant de revenir sur les conditions de l’équilibre budgétaire.

Nous sommes globalement en accord avec les priorités définies dans le rapport
Nous apprécions qu’ici « l’emploi » ne soit pas bêtement opposé à « l’exigence environnementale » comme cela est encore fait trop souvent. La nécessaire transition écologique est bien présentée comme une opportunité à saisir pour promouvoir les emplois de demain. 
2013 verra l’entrée en fonction du prêt bonifié négocié avec la Banque Européenne d’Investissement pour favoriser le développement d’activites locales, en particulier dans les énergies renouvelables et les économies d’énergie. Doté de 300 M d’€ ce dispositif devrait avoir un réel impact économique
Nous attendons aussi avec impatience que soit créée la Banque Publique d’Investissement, en espérant que celle-ci sera bien au service des territoires et qu’elle sera axée en particulier sur l’économie verte et plus largement les nécessités de la conversion écologique des PME.
Nous croyons également que tout ce qui concerne la rénovation thermique des bâtiments que ce soient par exemple les lycées ou encore les logements peut être un formidable facteur de créations d’emplois non délocalisables.
Nous souhaiterions aussi que la région Centre initie sur son territoire une réflexion sur l’économie circulaire (appelée aussi écologie industrielle). Il y a là une piste de développement économique dont nous avions souvent parlé pendant la campagne des régionales et qui nous a été présentée dans cette enceinte  par le directeur d’Alternatives Economiques lors du forum  du SRADDT consacré à l’économie. Il s’agit d’agir sur un territoire pour développer de nouvelles activités utilisant les sous-produits ou les déchets des activités existantes.  Une quarantaine de projets de ce type seraient déjà en cours de  réalisation dans l’Hexagone et nous proposons d’agir pour que cette nouvelle voie de création d’activité  émerge aussi en région Centre.
Enfin, dans un autre domaine, nous pensons nécessaire de réfléchir aux conditions de recrutements par la région d’emplois d’avenir. Par exemple certains se sont demandés si on ne pouvait pas en profiter pour améliorer encore la prise en charge des petits travaux d’entretien dans nos lycées. 

Les lycées justement sont la principale compétence des régions. 
L’effort conséquent que consent la région pour les politiques éducatives doit bien entendu être maintenu. Rappelons notre attachement particulier au dispositif Lycéens Citoyens et bien sûr au nouveau dispositif Cité Lycées initié cette année par Chantal Rebout, comme à tout ce qui est fait en faveur de la promotion de la santé des lycéens.
En ce qui concerne l’investissement, nous devons maintenir l’effort de 15M d’€ par an engagé depuis deux ans en matière d’efficacité énergétique : c’est le minimum pour espérer se rapprocher de l’objectif adopté dans le Plan-Climat-Energie régional.
Mais plus généralement les lycées nécessitent des investissements lourds. Pour ne prendre que deux exemples certains internats ne sont pas vraiment adaptés aux jeunes de notre époque et il ne faudrait pas qu’un sous-investissement dans les grosses réparations entraine demain des dépenses encore plus lourdes.

Le ferroviaire  est  aussi au cœur de nos compétences. Et là aussi la charge financière est très lourde pour la région, mais contrairement aux dépenses en faveur des lycées celles-ci augmentent chaque année un peu plus. Il y a d’une part des investissements dont nous nous réjouissons comme ceux consacrés à Chartres-Voves. Mais il y a aussi les dépenses liées à la convention TER. Il était certes prévu dès le départ que les contributions dues à la SNCF augmenteraient tous les ans, mais en 2012 le CR a du  intervenir au delà pour tenter d’amoindrir les dégâts provoqués par la mise en place du soi-disant cadencement. Et puis il y a les dépenses supplémentaires nécessitées par exemple par notre intervention sur Mobilico : rappelons que nous avions prévu qu’il y aurait un bilan de la mise en œuvre de cette mesure pour pouvoir si nécessaire en infléchir le cours. 
Retenons surtout que l’année 2013 devrait être surtout celle de la négociation d’une nouvelle convention avec la SNCF : nous devrons  tirer toutes les leçons des limites de la convention qui s’achève. Nous reviendrons demain matin sur les problèmes du ferroviaire.
En ce qui concerne la politique territoriale nous nous sommes déjà largement expliqués sur ce sujet ce matin et il n’est donc pas nécessaire d’y revenir sauf pour redire que compte tenu de la situation de très forte contrainte financière, il ne saurait être question pour nous de connaitre de nouveau des surconsommations sur ce chapitre comme cela a été le cas en 2011. De même, en période de raréfaction de l’argent public, nous réaffirmons notre opposition aux dépenses somptuaires injustifiées que ce soit par exemple pour l’ARENA à Orléans ou pour Ozans à Châteauroux.
Pour ce qui concerne l’environnement, enfin, il s’agit maintenant de donner leur pleine mesure aux orientations adoptées aussi bien dans la stratégie régionale pour la biodiversité que dans le Plan-Climat-Energie. Dans ce dernier domaine, en particulier en ce qui concerne la rénovation thermique des  logements, 2013 verra aboutir un projet exemplaire de rénovation de logements sociaux répondant à une initiative régionale : la démonstration sera faite que ceux qui defendent des objectifs tres ambitieux sont aussi  capables de faire bouger réellement les choses sur le terrain. Gilles Deguet reviendra  sur ce thème dans le débat.

Mesdames,  messieurs
Comme le dit le rapport, 2013 devrait être une année de transition en attendant l’acte 3 de la décentralisation, et nous l’espérons, le rétablissement de l’autonomie fiscale et financière des régions.
En attendant, nous devons encore nous contenter de recettes en grande partie gelées par l’Etat Central. On peut dire que « c’est mieux que si c’était pire » : si M Sarkozy avait été élu n’annonçait-on pas une baisse de 2 Milliards d’€ des concours aux collectivités ? Mais disons le là encore clairement ce gel ne nous parait pas satisfaisant alors même que nos dépenses contraintes, elles, vont nécessairement augmenter.

Nous ne voyons pas comment dans ces conditions on pourrait cette année encore se passer de la seule marge de manœuvre que nous ayons, celle qui consiste à utiliser la possibilité offerte par le gouvernement Sarkozy, pour financer les travaux d’infrastructures ferroviaires.
Pour avoir un peu plus de marge, compte tenu de la bonne situation financière  de notre Région, nous pensons aussi que nous pourrions être un petit peu plus souple sur l’emprunt : en période de crise économique le maintien des possibilités d’intervention publique est essentiel pour le maintien de l’activité économique et la cohésion sociale. Mais avouons-le cette possibilité d’emprunter un peu plus reste tout de même limitée.
Nous sommes aussi partisans d’utiliser si les conditions en sont réunies le recours à l’emprunt direct auprès des particuliers. Nous l’avions dit dès le BP 2012. L’avantage de mettre en œuvre ce circuit court de l’épargne est assez évident : cela nous libèrerait quelque peu de la mainmise des institutions financières et donnerait la possibilité à des citoyens d’investir dans des projets locaux, donnant ainsi du sens à leur épargne. Cette option ne nous parait cependant réellement envisageable que si l’écart entre le coût financier d’une telle opération et le recours au circuit classique de financement reste modéré. De même nous restons très réservés sur une émission de titres sur le marché financier qui nécessiterait de devoir recourir aux services d’une de ses trop fameuses agences de notation.

Mmes, Mrs
Au total de toute façon même si nous pouvons peut-être desserrer un peu la contrainte financière, il n’en faudra pas moins être très rigoureux dans la définition de nos priorités et  les écologistes y sont prêt.
 A la condition de faire de vrais choix à la lumière des stratégies deja définies par notre assemblée,  nous estimons que  malgré les difficultés nous pouvons continuer en 2013 avancer dans notre objectif de construction d’une véritable éco-région.