La place nécessaire du monde rural dans cette élaboration du SRADDT
Intervention de Michelle Rivet.
La Région Centre est en effet caractérisée par l’importance de son espace rural et par une grande disparité de ses territoires en particulier en terme économique et démographique.
Si rien n’est fait pour modifier les tendances lourdes. Les statisticiens de l’INSEE prédisent à trente ans l’expansion de l’axe ligérien mais aussi l’effondrement démographique du sud régional très rural et un vieillissement important de sa population. On peut supposer également que dans le même temps l’écart économique se creusera.
Nous sommes ici à Bourges dans ce que les démographes se plaisent parfois
à appeler la « diagonale du vide ». Souvenez vous au siècle dernier , il n’y a pas si longtemps, on parlait aussi de « Paris et du désert français ». L’émergence de pôles régionaux avec les lois sur la décentralisation a fait mentir cette vision des années 60 et ça nous rappelle que les choix d’aménagement sont des choix politiques déterminants.
Les prévisions statistiques doivent donc nous alerter et non nous inciter à baisser les bras. L’élaboration du SRADDT va donc nous permettre de partager avec les habitants de la Région une réflexion sur son avenir et de nous interroger sur les équilibres que nous voulons à l’intérieur du territoire régional.
La place des territoires ruraux, leur évolution économique et démographique ne peut que constituer un pan important de cette réflexion...
L’espace rural c’est d’abord l’agriculture qui le modèle. Elle a forgé, elle forge les paysages que nous connaissons. L’aménagement du territoire régional est corrélé à l’évolution de l’agriculture et donc aux choix en matière de Politique Agricole, nationale et européenne.
Les incitations de la PAC ont accentué les effets de la mécanisation et de l’industrialisation de l’agriculture . L’agriculture régionale est caractérisée par l’extension des surfaces en grandes cultures et par l’agrandissement démesuré des exploitations. La richesse agronomique de notre région la met en bonne place en terme de production. Mais à quel prix? Une disparation massive des paysans, le délitement des structures villageoises et des emplois locaux perdus
d’un côté , des impacts négatifs sur l’environnement de l’autre. J’évoquerai
surtout l’état de la ressource en eau. très préoccupant autour de Bourges par
exemple mais aussi l’impact sur la biodiversité.
Les enjeux sont aujourd’hui importants et multiples pour l’agriculture : elle doit rester nourricière(et j’exclue a priori la production d’agrocarburants
ou d’autres forme d’énergie sur les terres qui doivent produire notre alimentation) tout en tenant compte des enjeux environnementaux. Mais il faut aussi qu’elle redevienne source de développement dans les territoires ruraux.
La grande faiblesse de l’agriculture régionale tient au fait que ses productions principales sont des productions de matières premières (les céréales, les oléagineux, les bovins maigres) et qu’elle engendre insuffisamment de valeur ajoutée sur ces productions.
Pour nous écologistes qui prônons la relocalisation de l’économie, l’agriculture est une source d’emplois non délocalisables fondamentale.
La transformation des productions, l’utilisation de ressources agricoles et forestières renouvelables sont un moyen de développer l’emploi quand la valeur ajoutée se fait sur place. Les transports des produits agricoles sur de longues distances représentent des frais supportés par la collectivité et des nuisances pour notre environnement qui devraient être intégrés aux prix des denrées.
Même s’ils ne peuvent concerner toutes les productions, nous souhaitons des circuits de commercialisation plus courts, qui permettent un approvisionnement local des habitants du territoire ou de la restauration collective.
Nous souhaitons un développement de l’agriculture biologique dont la demande de produits continue à augmenter. Outre son impact positif sur l’environnement et la santé, l’agriculture biologique utilise en moyenne 30% de main d’oeuvre de plus que l’agriculture conventionnelle.
L’impact de l’agriculture sur les paysages qui caractérisent notre région doit conduire à nous interroger sur leur maintien. Le bocage berrichon, 2ème bocage français par son importance, est fortement dépendant de l ‘élevage. Les difficultés que rencontrent les éleveurs, la non reconnaissance de leurs bonnes pratiques fragilisent ce paysage. Garder nos paysage signifie favoriser ces pratiques.
Enfin la région Centre perd 1800 exploitations agricoles par an, et 1 seul jeune s’installe pour 4 à 5 départs. L’installation d’agriculteurs et la transmission des exploitations sont des problématiques majeures pour l’avenir. Il est important de travailler sur l’accès au foncier, le devenir des très grandes comme des petites exploitations pour trouver des solutions pérennes au maintien d’exploitations assurant un maillage suffisant du territoire.
Mais L’agriculture n’est pas seule à à modeler l’espace rural. Les villages et bourgs qui les composent doivent aussi, tout comme les villes, s’interroger sur l’urbanisation et la revitalisation des centre bourg. Les petites communes doivent résister à l’abandon de les centres-bourg, appuyer les activités et commerces qui y maintiennent une vie. Elles sont tentées d’enrayer la baisse de leur population par des constructions qui mangent les espaces cultivables pour attirer de nouveaux habitants.
Or s’installer à la campagne ne doit plus être consommateur d’espace naturel ou agricole. Un des enjeux de l’aménagement rural est de pouvoir proposer un milieu rural attractif , permettant d’avoir un cadre de vie agréable tout en prenant en compte ses nouvelles contraintes.
A ce moment je ne peux qu’indiquer les limites de l’exercice que nous allons faire: force est de constater le désengagement croissant de l’Etat dans les territoires ruraux : l’abandon des services publics,la privatisation de la poste, les fermetures des services hospitaliers.
Cette situation dégradée fait des ruraux des habitants de seconde zone. Nous affirmons au contraire leur droit à un accès correct à des services suffisants en nombre et qualité, à un accès correct à la culture, aux loisirs, aux soins.
Le maintien des habitants en milieu rural c’est d’abord le maintien du milieu rural pour ses habitants. Et par milieu rural il faut entendre à la fois de l’espace, des paysages, mais aussi un maillage suffisant de service.
La réforme territoriale en cours ne prend pas le chemin d’améliorer la situation bien au contraire . C’est une recentralisation rampante que le gouvernement Sarkozy porte aujourd’hui, à l’inverse du projet d’aménagement que nous appelons de nos voeux.