L’après Xynthia

Un mois après leurs débuts au Conseil Régional, les éluEs Europe Ecologie ont tenu à donner une conférence de presse durant laquelle ils sont revenus sur certains grands dossiers. La tempête Xynthia et ses conséquences en sont un.

 

Le traitement de l’après Xynthia appelle de notre part un certain nombre de commentaires quant aux conséquences que nous pouvons tirer.

 

Vous avez dit transparence ?

Le zonage des habitations à détruire a beau être noir, il n’en reste pas moins flou. Quelle a été la méthode pour déterminer ces zones noires ? Il semble que la précipitation, l’arbitraire et la non concertation furent les règles. Les maires n’en ont été destinataires que la veille de la présentation à la population. Du fait de cette précipitation, de nombreuses questions demeurent en suspend.

 

Comment le zonage fut-il instruit ? Est-ce que ce sont les zones déterminées dans les plans de prévention des risques d’inondations antérieurs, non encore appliqués ou bien est ce que ce sont les maisons inondées lors du passage de Xynthia qui ont été prises en compte. Dans ce cas, pourquoi certaines maisons inondées n’ont pas été introduites dans ces zones noires quand d’autres voisines y étaient ? Pourquoi telle maison ou hôtel plus inondés qu’un autre bâtiment n’est pas dans le zonage ? Deux poids deux mesures ? Beaucoup d’aberrations constatées sur le terrain que ne comprennent pas, à juste titre, les sinistrés. Nous demandons la transparence et des règles compréhensibles par tous.

 

Les habitants ont le droit à une certaine considération. S’ils ont pu s’installer là, c’est que les autorisations leur ont été données en bonne et du forme. Si les élus Europe-Écologie sont d’accord pour arrêter ce massacre et éviter que d’autres Français ne rêvent d’une maison les pieds dans l’eau, avant que cela ne se transforme en cauchemar, nous souhaitons que cela se fasse en toute transparence, équité et avec un minimum de compassion pour les sinistrés. Avant la catastrophe, l’État, par la voix du Président de la République (avril 2009), parlait de déréglementer et d’assouplir la « Loi littorale », après Xynthia c’est à un activisme tout azimut que nous faisons face, avec des annonces incohérentes et impossibles à mettre en oeuvre.

 

L’urgence pas là où l’on veut nous le faire croire.

Au-delà de ce zonage nécessaire, l’urgence est encore plus économique qu’urbanistique. Le zonage définitif peut attendre un mois ou deux mais quid des aides d’urgence promises ? Qui dit d’urgence, comme leur nom l’indique, dit qu’elles doivent arriver vite. Ou alors laisse-t-on encore une fois les collectivités territoriales se substituer à l’état ? L’urgence est aussi dans la réparation de certaines digues et là nous pensons particulièrement au secteur des marais de Guérande dont les communes semblent bien être les grandes oubliées de l’histoire. L’urgence, c’est aider les ostréiculteurs à se remettre en marche, pour ceux qui veulent repartir, et accompagner dans leur reconversion ceux pour qui ce fut, excusez l’image, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

Cependant, là aussi les dégâts ne sont pas les mêmes selon les pratiques de travail. Ceux qui attachaient ensemble les tables en fixant dessus les sacs d’huitres, n’ont eu que des dégâts sur leurs bâtiments et leurs matériels, ce qui n’est déjà pas rien. Par contre ceux, qui pour gagner du temps et donc un peu d’argent, ne fixaient rien, ont perdu leur huitres et leurs tables. Il ne faudrait pas que ceux qui travaillent le mieux soient pénalisés par rapport à ceux qui travaillent moins bien. Là aussi, les aides, de quelques natures qu’elles soient doivent être attribuées dans la transparence.

 

Urgence pour certains agriculteurs dont les pertes en bêtes furent énormes et dont les terres ne sont actuellement plus utilisables pour des semis traditionnels de blé, dans « la petite Beauce de Vendée » notamment. Peut-être l’occasion de repenser aussi l’agriculture pour ces exploitants en s’orientant vers un élevage extensif sur prairies artificielles d’herbages tolérant à la salinité du sol. En tout cas, une nécessité d’accompagnement là aussi.

 

Pour répondre à ces questions et être force de proposition, les élus Europe-Écologie des Régions Pays-de-la-Loire et Poitou-Charentes ont mis en place un groupe de suivi interrégional. Ce groupe ira à la rencontre des acteurs locaux sur le terrain : élus, acteurs économiques, association environnementale… lors d’une visite courant mai. Par ailleurs, François de Rugy, député de Loire-Atlantique et membre de la mission d’information parlementaire sur Xynthia qui se met en place. Il participera bien entendu à ce groupe de suivi.

 

Responsabilités

La tempête de décembre 1999 ne semble pas avoir laissé suffisamment de traces dans les esprits pour éviter les constructions intempestives en zones de risques majeurs vis-à-vis des inondations. Elle avait pourtant montré aussi la nécessité d’avoir des digues qui tiennent puisqu’à l’époque, à Aytré, Châtelaillon, Esnandes, la mer s’était engouffrée suite à la rupture de digues. Une rupture de digue avait également eu lieu à la Faute-sur-Mer lors de cette tempête.

 

Le souvenir et la culture du risque semblent oubliés. Et pourtant, les dégâts étaient prévisibles et prévus dès 2005 par la DDE de Vendée comme rappelé par Stéphane Raison1 lors des Xe Journées Nationales Génie Côtier à Sophia Antipolis en 2008. Alors, pourquoi ?

 

Les plans de prévention des risques d’inondations sont prêts depuis 2001, et périodiquement mis à jour par les services de la DDE. Cependant, le blocage des maires des communes les plus concernées n’a pas permis leur mise en place. Quand leur démarche n’est pas appuyée par des députés ou des sénateurs qui interviennent auprès du préfet afin d’empêcher en 2001 et 2004 la fermeture du camping de La Faute décidée par l’État (Canard Enchaîné du 31 mars 2010). Un « Atlas de l’aléa submersion marine sur le littoral vendéen », datant de 2002, sur lequel s’appuie le préfet pour prendre ces décisions existe.

 

Ainsi, l’État prenait enfin ses responsabilités, via le préfet, qui dès 2007, refusait des permis de construire ou d’extension, mais un peu trop tard. L’urbanisation était faite, prétextant que des protections via les digues étaient en place.

 

Mais justement, qu’en est-il de ces digues, dernier barrage contre la mer et ses colères. Dans le dernier Contrat de Projets État-Région 2007-2013, il n’y avait pas de ligne budgétaire sur le volet « défense contre la mer » et donc sur la réparation des digues existantes, alors que certaines d’entres-elles nécessitaient un renforcement. C’est à la demande de la Région, qu’une convention triennale (2007, 2008,2009) portant sur ce sujet a été mise en place. Nous pensons qu’il faut, certes, plutôt ne pas construire en zones inondables, laisser des zones d’expansion des eaux ; mais quand des constructions ont été autorisées, il est de la responsabilité de ceux qui ont donné les autorisations, de protéger les personnes qui en ont bénéficié.

 

Malheureusement, ce n’est pas nécessairement ceux qui sont prescripteurs de permis de construire dans ces zones inondables qui sont les payeurs. C’est là que le bât blesse, parce qu’ils en sont parfois même les bénéficiaires. Comme l’a raconté le Canard Enchaîné (31 mars 2010), il est possible de découvrir des liens entre certains adjoints à l’urbanisme des communes concernées et les agents immobiliers propriétaires de terrain. Ces permis accordés n’ont, pour autant pas été bloqués par la préfecture. On voit bien là la chaine complexe des responsabilités. Doit-on pour autant jeter l’anathème sur ces maires de communes littorales qui répondent à la demande, notamment de nombreux retraités venus passer leurs vieux jours sur la côte. Pas nécessairement.

 

« La commune de La Faute-sur-Mer dans le sud-Vendée est une commune jeune. Rattachée à la commune de la Tranche-sur-Mer jusqu’en novembre 1945, elle a été construite sur de vastes espaces gagnés sur la mer, ne tenant pas compte de la mémoire du risque.». Résultat, une commune, La-Faute-sur-Mer n’ayant que les zones inondables pour se développer tant économiquement que pour le bâti, d’où la tentation d’urbaniser à tout prix. A quand une Taxe foncière unique à l’image de la Taxe Professionnelle Unique ? En ce sens, Europe-Écologie soutient la décision de la Commission Permanente du Conseil régional des Pays-de-la-Loire (9 avril 2010) de la mise en place, dès que possible, d’un contrat de territoire pour l’intercommunalité incluant La-Tranche-sur-Mer, La-Faute-sur-Mer et L’Aiguillon-sur-Mer, qui va dans le bon sens. D’autant que ce contrat est conditionné par la création d’un comité de développement réunissant tous les acteurs économiques et sociaux des territoires afin de s’assurer de sa réussite et de son adaptation aux besoins locaux.

 

Il ne faut pas pour autant dédouaner tous les habitants sinistrés de leur responsabilité puisque certains ont obtenu des permis de construire assortis d’une annotation indiquant le risque d’inondation. Voire aussi par exemple, l’Association des propriétaires du Hâvre, à l’extrême sud de la pointe de la Faute-sur-Mer, qui se battaient avant Xynthia, pour pouvoir urbaniser cette zone protégée de l’urbanisation du fait des risques d’inondation justement.

 

En tout état de cause, la chaîne des responsabilités doit être nécessairement déterminée. Non pas obligatoirement pour sanctionner, mais pour pointer les dysfonctionnements et éviter que de telles catastrophes humaines ne se reproduisent.

 

Et la prévention !

On sait malheureusement, que la conjonction de grandes marées, de vents de mer et d’écoulement des eaux de la terre vers la mer (cas de l’estuaire du Lay) peuvent entrainer des catastrophes telle que celle que les habitants de la côte atlantique ont vécu. On oublie simplement une chose qui s’ajoute à cela, c’est la montée inexorable des océans, constaté depuis de nombreuse année qui ne fera qu’amplifier ces phénomènes. Le GIEC nous annonce de 50 cm à 2 mètres d’élévation d’ici 50 ans.

 

C’est pourquoi, au-delà des zones sinistrées par Xynthia, il faut de manière préventive, devancer cette montée des eaux. Le mieux, eu été que la conférence de Copenhague sur le climat, ne soit pas un échec. Mais au niveau de la région, les élus Europe-Écologie feront en sorte de jouer leur rôle. Que ce soit à travers l’Agenda 21 régional qui devra être renforcé, que ce soit à travers le plan climat régional, ou les politiques énergétiques et de transport. Nous pensons par ailleurs, qu’il est de notre responsabilité, en tant que Région, maître d’oeuvre de l’aménagement du territoire, de lancer une étude sur les zones inondables à court, moyen et long terme et ensuite de conditionnées nos aides au respect des zones à risque.

 

Il faudra très rapidement aussi, que le flou, actuellement entretenu par l’État avec le changement de nom des zones noires en zones de solidarité soit levé. Nous ne comprenons plus si dans ces secteurs, même après ajustement de zonage, les maisons devront être détruites ou est-ce que ce sera au bon vouloir des habitants qui accepteront l’indemnisation. S’il y a possibilité de refus de la part de propriétaires, quid de la possibilité d’assurance de ces maisons qui leur sera refusé et alors qui paiera s’il y a de nouveau inondation ?

 

Beaucoup de questions donc, suite au traitement par l’État des conséquences de la tempête Xynthia mais aussi sur la chaîne de responsabilité. Qui paiera, pour quoi et quid de la transparence nécessaire pour que les sinistrés, déjà fort commotionnés, puissent au moins comprendre les décisions de l’État si ce n’est les accepter dans leur fors intérieur.

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