[C-PRESSE] RETENUES D’EAU : LES ELUS EELV REAGISSENT AUX PROPOS DU PRESIDENT DE LA FNSEA
Les élus écologistes membres du Comité de Bassin de l’Agence de l’Eau Loire Bretagne souhaitent réagir aux récentes déclarations de Xavier Beulin, Président de la FNSEA demandant la création de retenues d’eau qu’il présente comme une réponse pérenne à la sécheresse en se plaignant de « tracasseries administratives » et de « l’écologie punitive ».
Notre système agricole est confronté à un double défi : il faut d’une part produire de l’alimentation pour nourrir la population, et d’autre part il faut le faire dans un contexte où les facteurs de production (eau, sol, énergie fossile…) sont et seront de plus en plus rares.
Depuis les années 60 l’agriculture a augmenté sa productivité, mais le modèle qui a été utilisé repose sur une forte consommation d’eau, de produits phytosanitaires (néfastes pour la santé et le bon état des écosystèmes) et d’engrais de synthèse produits à partir d’énergie fossile. La Politique Agricole Commune a largement contribué à l’adoption de ce modèle de production.
Aujourd’hui, ce modèle n’est clairement plus adapté: les ressources fossiles s’épuisent, les ressources en eau qui sont déjà largement surexploitées risquent de diminuer du fait du changement climatique. Les consommateurs qui achètent les produits et les citoyens qui paient pour la PAC veulent une agriculture qui préserve leur santé et leur environnement et non l’inverse. C’est malheureusement très loin d’être le cas. Ainsi, Le Commissariat Général au Développement Durable évalue le coût complet du traitement annuel des excédents en nitrates et pesticides d’agriculture et d’élevage dissous dans l’eau entre 54 et 91 milliards d’euros par an ! Soit cinq fois plus que le solde positif de notre balance agroalimentaire !
Le rôle d’un responsable politique est de préparer l’avenir. Ce n’est pas en s’arc-boutant coûte que coûte aux solutions du passé que nous prépareront l’agriculture de demain. La rareté des facteurs de production doit au contraire nous pousser à inventer des modèles de production économes en eau, en engrais de synthèse et utilisant le moins possible de produits phytosanitaires.
Depuis des années, le gouvernement et les lobbys de l’agro-industrie tentent de faire construire des retenues artificielles pour fournir encore plus d’eau à l’irrigation. Récemment les Ministres Borloo et Kosciusko-Morizet ont fait pression sur les Agences de l’eau pour qu’elles portent leur taux de subvention à ces retenues à 70%. Malgré cela très peu de projets ont vu le jour. Ces projets presque entièrement subventionnés sont destructeurs de l’environnement et de la ressource en eau. C’est sans doute pourquoi avec sa démagogie habituelle, le candidat-président Nicolas Sarkozy, qui intervenait juste avant Eva Joly au congrès de la FNSEA a annoncé une procédure plus expéditive. Pour faire baisser le prix du carburant on tape dans les stocks, pour régler les problèmes de sécheresse on crée des retenues… et la fuite en avant continue, sans que l’on ose s’attaquer à la racine des problèmes, jusqu’à ce que notre société aille dans le mur.
Il ne s’agit pas de punir une profession, selon des dogmes, mais plutôt de regarder le monde tel qu’il est et de préparer l’avenir, en utilisant les dernières découvertes scientifiques et technologiques. Il est malheureusement plus facile d’user de démagogie en tentant de réduire les positions écologistes à la défense de « grenouille à ventre jaune ou je ne sais quelle libellule » comme le fait le Président de la FNSEA dans sa déclaration. Fort heureusement, nous savons que la profession agricole est beaucoup plus sensible à la défense de la biodiversité que ne le sont ses porte-paroles.
Au contraire, nous sommes persuadés, comme Eva Joly, que c’est en dépassant les postures caricaturales que les élus, les citoyens et les agriculteurs pourront inventer les systèmes agricoles qui permettront de nourrir durablement les populations.