BUDGET PRIMITIF 2012 – INTERVENTION GENERALE : « LE TEMPS DES SOLUTIONS NOUVELLES EST LA ! »
Lors de la session plénière du 26 janvier 2012, consacrée au Budget Primitif 2012, Jean-Philippe Magnen, président du groupe EELV au Conseil Régional des Pays de la Loire a prononcée une intervention générale relative à l’ensemble du budget.
« Le taux de chômage avoisine la barre des 10% a augmenté deux fois plus en 2011 qu’en 2010. Le secteur industriel décroit, à la mesure du secteur automobile qui a chuté de 40% en 5 ans…
Depuis des années le taux de croissance n’a fait que baisser pour atteindre en 2011 0,6%, démontrant ainsi chaque jour davantage les limites du système capitaliste financier, de l’approche à dominante libérale de l’économie.
Le temps des solutions nouvelles est là. Il nous faut créer, imaginer, expérimenter, oser une autre voie…les inégalités toujours grandissantes, l’incapacité de ce système à partager équitablement les richesses, nous obligent à passer à autre chose. Il ne s’agit donc pas « d’éviter à tout prix les choix susceptibles de pénaliser le retour à cette fameuse croissance forte et durable » mais bien de faire d’autres choix plus équitables et humains et pour autant pas moins efficaces économiquement. Pour la majorité des habitants de cette planète, l’intérêt est de vivre mieux et décemment, et non d’avoir plus, toujours plus. Et vivre mieux, ce n’est pas consommer toujours plus, c’est s’épanouir, c’est vivre ensemble, c’est grandir sereinement, participer au monde, et surtout travailler tous et moins.
Certains l’ont dit avant nous : la prospérité (au sens du bien être) est possible sans croissance. Depuis quelques années maintenant, le PIB n’est plus synonyme de qualité de vie.
Pour parer à cette crise majeure, Nicolas Sarkozy, obsédé par le triple A des agences de notation, a imposé une austérité mal placée : il offre des cadeaux fiscaux aux plus riches, diminue le pouvoir d’achat des plus fragiles. Et, dans une logique de concentration des pouvoirs et des responsabilités, qui n’appartient qu’à ce gouvernement, il coupe les vivres des collectivités, premiers investisseurs publics, faisant peser sur la population les économies nécessaires.
Face à l’irresponsabilité gouvernementale, la région des Pays de la Loire maintient la barre, avec prudence mais ambition. Le groupe Europe Ecologie Les Verts approuve la stratégie financière que Yannick Vaugrenard a su mettre en œuvre et que son collègue Patrick Delpech reprend : rester prudents quand à notre capacité de désendettement en la maintenant à un niveau relativement bas de 5 années, chercher la transparence vis-à-vis des financeurs, jouer sur le dernier levier fiscal que sont les cartes grises ( ce que nous faisons cette année avec la hausse de 4 euros appliquée dès ce budget 2012). Tout en maintenant une indépendance minimum nécessaire, c’est aussi un début de fiscalité écologique qui incite à l’achat de plus petits véhicules.
Prendre nos responsabilités d’élu-e-s vis-à-vis des ligériens, c’est à la fois veiller à ne pas vivre au-dessus de nos moyens mais c’est aussi explorer de nouvelles pistes. Il s’agit alors très certainement de maintenir le cap des investissements mais aussi d’orienter nos politiques publiques dans le sens des défis à relever :
• Le défi énergétique au travers d’une politique transversale qui avec ses 114 478 000 € représente près de 10% de notre budget, ma collègue Emmanuelle Bouchaud aura l’occasion de vous présenter l’esprit et le contenu de ce budget cet après-midi.
• le défi de l’emploi et des solidarités humaines et territoriales, j’y reviendrai, mais est déjà à noter un engagement fort pour la lutte contre toutes les discriminations qui fera d’une présentation spécifique lors de cette session.
Les voies que nous avions dessinées en 2011 à travers l’élaboration et le vote des schémas régionaux et du plan contre la crise et d’accompagnement des mutations vont se concrétiser dans ce budget 2012.
Je le disais en préambule, les derniers chiffres du chômage sont catastrophiques au niveau national et consacrent l’échec de la politique gouvernementale. Cette année le nombre de chômeurs a explosé, +16% chez les seniors, +6% globalement. 2,4 millions de chômeurs de catégorie A. C’est très inquiétant!
Même si les Pays de la Loire ont l’un des taux de chômage les plus bas de France avec 8%, C’est bien sûr encore trop. 20% des demandeurs d’emploi ont plus de 50 ans, 14 moins de 25 ans. Des chiffres qui à eux seuls démontrent que même dans l’ouest, la priorité de l’emploi doit être au cœur de nos politiques publiques et c’est ce que nous faisons chaque année un peu plus alors que l’emploi n’est pas une compétence des régions.
Après un sommet social devenu sommet de la crise, le 18 janvier, tout le monde s’accorde à dire, et notamment les partenaires sociaux, que le compte n’y est pas au vu de l’urgence, pire, certaines mesures annoncées continuent de mettre gravement en cause le service public de l’emploi et ce n’est pas l’annonce des 1000 CDD à Pôle Emploi qui va « régler l’affaire ».
Et faut-il le rappeler ? Le projet de loi de finances 2012 acte une baisse de 14% des crédits travail-emploi-formation. L’effet sur la Region est immédiat dès ce budget 2012, puisque ce sont 3,7 millions d’euros en moins sur notre budget prévus dans les conventions financières qui nous lient à Pôle Emploi et Agefiph…est-cela monsieur Sarkozy faire de l’emploi et de la formation des chômeurs une priorité ? Sans compter, que vos propos récents semblant remettre en cause la compétence formation des régions sont plus qu’inquiétants et incohérents par rapport aux actions menées sur les territoires.
Malgré cela, N’en déplaise à nos collègues de l’opposition, le conseil régional Pays de la Loire prend ses responsabilités et agit et je suis fier de piloter un certain nombre de ces politiques primordiales pour nos concitoyens : 3,5 millions € pour l’emploi des jeunes, en partenariat avec le réseau des missions locales, et l’annonce du pacte régional pour l’emploi des jeunes, + 75% de budget pour la VAE (700 000 €) dont nous venons de fêter les 10 ans de la loi. Le dispositif d’acquisition des compétences clés, indispensable pour certaines personnes afin de lever des obstacles dans leur parcours de réinsertion professionnelle et acquérir les savoirs de base devient une ligne à part entière de notre budget et représente ainsi 2,6 millions €. Enfin, l’investissement croissant de la Région dans le plan de continuité professionnelle à destination des salariés des entreprises ligériennes, pour lequel nous avons passé à ce jour douze conventions avec les OPCA. Former plutôt que licencier, former plutôt que chômer, ce n’est pas qu’une intention ou un slogan en pays de la Loire, c’est concret et bien réel sur les territoires. Ce sont plus de 150 millions d’euros pour la formation professionnelle dans ce budget 2012.
Du point de vue de l’action économique et de l’innovation, là aussi la région fait preuve d’ambition avec 224 014 000 € d’autorisations. Et l’annonce de la création d’une banque régionale d’investissement, que j’appelais moi-même de mes vœux dès le premier tour des élections régionales, montre que la Region dans beaucoup de domaines a décidé malgré les contraintes financières dues au contexte de crise et au désengagement de l’Etat de garder la main et de prendre ses responsabilités au bénéfice des ligériens qui entreprennent. Cette banque peut devenir à terme un véritable outil de soutien à l’économie réelle et ancrée territorialement. Dans le même esprit, on notera également l’appui chaque année un peu plus affirmé à l’économie sociale et solidaire pourvoyeuse d’emplois non-délocalisables, innovante socialement, finalement qui est une économie qui résiste mieux à la crise que l’autre économie dite traditionnelle.
Enfin, et ce sera un projet phare de 2012, la diversification industrielle avec la création d’une véritable filière des énergies marines renouvelables sur notre territoire en est à une étape décisive, projet qui tout en maintenant et créant de l’emploi (2500 créations nettes), relève le défi de la transition énergétique, au cœur des enjeux des années à venir en France et dans le monde.
Pour mettre en œuvre ces projets ambitieux, nous avons décidé de passer un cap en matière de démocratie sociale.
La charte en faveur de la démocratie sociale que nous examinons lors de ce budget révèle bien un changement d’état d’esprit général de nos fonctionnements vers une co-responsabilisation, promouvant les complémentarités et reconnaissant pleinement l’«expertise» citoyenne et territoriale. Il faudra bien sûr mettre en pratique tout cela, que ce ne soit pas un vœu pieux, un document au fond d’un tiroir. A ce titre, les premières réunions avec les partenaires sociaux, un premier chantier de travail ouvert sur l’emploi des jeunes et la première conférence régionale pour l’emploi durable le 9 février sont déjà des premières pierres importantes d’un nouvel édifice de la démocratie sociale en Région.
Dans le sens de ce rapprochement citoyen, il nous semble encore que certaines thématiques peuvent aller un peu plus loin. Je pense par exemple à la recherche et l’innovation. Elles sont des leviers fondamentaux de la transformation écologique et sociale, elles sont au cœur de la transition. Mais si les objectifs de la techno-science peuvent être louables, il est plus que nécessaire de la contrôler, de la partager pour qu’elle réponde non pas seulement au développement des profits des entreprises mais bien qu’elle réponde aux attentes des citoyens. Plutôt que de suivre le diktat de la concurrence à l’excellence imposé par le gouvernement, pourquoi ne pas proposer de nouvelles pistes, plus ouvertes, plus directement en lien avec un véritable changement : à l’instar des PICRI (programmes institutions-citoyens pour la recherche et l’innovation) en Ile de France et Nord Pas de Calais. On redonnerait ainsi la place au lien entre recherche et citoyens.
Parce que le projet de société est au centre des crises que nous traversons, nous devons trouver les moyens de revaloriser les sciences humaines et sociales, valoriser la recherche pluridisciplinaire pour faire émerger une véritable démocratie scientifique et un sain regard critique. Dans ce cadre, nous espérons que la réflexion sur le futur schéma régional de la recherche, réflexion qui doit démarrer cette année, intégrera plus encore cette dimension transdisciplinaire et citoyenne : conférences de citoyens, conditionnalités des aides, éco-campus, lanceurs d’alertes… autant de pistes à réfléchir pour tenter de réconcilier les citoyens avec la science et la technologie. Car l’innovation, qu’elle soit technologique ou sociale, doit avant tout être partagée.
Enfin, je voudrais terminer, encore une fois, sur l’application de la conditionnalité des aides. En ces temps de restrictions budgétaires, l’intérêt général doit absolument primer. Rien ne doit nous détourner de cet objectif. La conditionnalité est donc un élément incontournable pour prioriser et hiérarchiser l’attribution des aides publiques à partir des orientations politiques définies dans les schémas régionaux. Nous serons extrêmement vigilants à sa mise en application et la formalisation d’un guide référentiel adossé au contrat de progrès signé avec les entreprises. En ce sens, nous continuons et continuerons à trouver incohérent et contre-productif d’investir sur des projets inutiles et notamment le nouvel aéroport de Notre Dame des Landes et tous les investissements routiers, autoroutiers et ferroviaires qui l’accompagnent comme illustré dans le rapport transports avec les études lancées pour une nouvelle ligne Nantes – Rennes alors que le besoin aujourd’hui est d’optimiser l’existant sur cette ligne pour que le train soit concurrent de la voiture sur ce trajet ce qui pas le cas aujourd’hui.
En conclusion, cher-e-s collègues, je dirais donc ceci : les investissements et les orientations prises par ce BP 2012 marquent un véritable changement et surtout une grande responsabilité vis-à-vis des ligériens. Je pense notamment aux chômeurs, aux jeunes et aux anciens, à toutes les personnes qui subissent de plein fouet l’irresponsabilité de nos dirigeants nationaux et la mainmise des financiers. Le groupe EELV, malgré quelques réserves exprimées, votera le budget primitif 2012, à l’exception des études sur la ligne ferroviaire Nantes Rennes, mais nous en reparlerons demain matin. »
Jean-Philippe MAGNEN,
vice-président du Conseil Régional des Pays de la Loire, président de la commission Emploi – Formation continue et métiers de demain.