Session du 12 mars - Discours de Pierre Pommarel
Par nicole rouaire le mardi 12 mars 2013, 14:51 - Voeux, discours, communiqués - Lien permanent
« La fiscalité sur l’énergie se caractérise par de nombreuses dépenses fiscales qui répondent davantage au souci de préserver certains secteurs d’activités qu’à des objectifs environnementaux. Afin de favoriser la transition énergétique, la réorientation des dépenses fiscales relatives à l’énergie paraît donc nécessaire ».
Voici donc le constat amer et la conclusion sans détour dressés par la Cour des Comptes qui fustige à son tour l’incohérence de la fiscalité écologique française dans un référé rendu public adressé aux Ministères de l’Ecologie et de l’Economie.
A l’instar des écologistes qui dénoncent depuis de nombreuses années le maintien de privilèges anachroniques à des secteurs d’activités appelés nécessairement à évoluer, la Cour des Comptes pointe elle aussi du doigt plusieurs aberrations qui vont à l’encontre de la transformation écologique de notre économie :
- En 1er lieu, la détaxation du kérosène qui profite au mode de transport le plus polluant, et qui grève les finances publiques de 3,5 milliards d’euros chaque année, dont 3 à 400 millions d’euros pour les vols intérieurs de métropole. En plus d’être anti-environnementale, cette niche est tout à fait inéquitable d’un point de vue de justice sociale, puisque ce sont bien les milieux aisés qui profitent majoritairement de la diminution artificielle du prix des billets d’avion.
- Deuxième niche décriée par la Cour des Comptes, le différentiel de taux de TIPP en faveur du gazole qui ampute chaque année les recettes fiscales de l’Etat à hauteur de 7 milliards d’euros auxquels il convient d’ajouter les coûts sanitaires (42000 décès prématurés) et même les coûts socio-économiques pour la France. En effet, l’inadaptation structurelle de l’outil de raffinage français qu’alimente l’accroissement de la consommation du gazole en France contribue grosso modo pour 1 milliard d’euros au déficit de la balance commerciale de notre pays. Alors que les exportations de voitures diesel françaises ne cessent de diminuer, continuer d’encourager le diesel en France est donc un véritable pied de nez aux ouvriers et aux salariés de l’industrie automobile pour qui la reconversion industrielle est la seule garante de leur emploi. Le gouvernement ne peut pas, ne doit pas entretenir la fiction du redémarrage ou de la continuation sous perfusion d’activités caduques.
A ces deux principales dépenses fustigées par la Cour des Comptes, qui vont à l’encontre du principe pollueur payeur, il faut également ajouter :
- la sous-taxation du charbon qui est le combustible fossile le moins taxé
alors qu’il est pourtant le plus émetteur de CO2 ;
- la TVA à taux réduit sur les engrais ;
- ou encore cette année le nouveau cadeau à 250 millions d’euros de l’Etat aux
transporteurs routiers suite au énième report de la taxe poids lourd.
La liste est évidemment bien trop longue pour pouvoir citer l’ensemble des balles que l’Etat se tire dans le pied depuis des années. Delphine Batho déclarait d’ailleurs lors de la mise en place du comité pour la fiscalité écologique en décembre dernier, que « La France est avant-dernière en Europe en matière de fiscalité environnementale. C’est dire si nous avons des marges de progression très grandes ! ». Difficile de lui donner tort effectivement !
En cette période de vache maigre, il faut accepter d’ouvrir enfin les yeux et de mettre progressivement un terme à de telles inepties économiques, sociales et environnementales, en s’orientant enfin vers une fiscalité juste, équitable et écologique. Les milliards d’euros de recettes engendrées par la suppression de toutes ces niches fiscales permettraient non seulement de contribuer à la maîtrise des dépenses publiques, mais aussi de financer des mesures d’accompagnement des ménages, des territoires, et des entreprises vers la reconversion écologique de notre pays, dans un souci d’équité et de justice sociale.
Les solutions sont à portée de main, il suffit d’avoir le courage de les saisir. Ceux qui disent, comme Arnaud Montebourg, « ne changez rien » pour des motifs de courte vue, ne préparent ni le redressement productif de l’économie française, ni l’avenir de notre pays.
L’avenir, ce n’est, malheureusement, pas sur lui que le gouvernement a décidé de parier fin janvier pour la première action de soutien de la Banque Publique d’Investissement.
La Banque publique « doit être capable d’investir dans les secteurs les plus porteurs ». C’est ce qu’avait déclaré François Hollande le 31 août 2012 à l’occasion de la Foire de Châlons-en-Champagne, lui qui s’est engagé à réduire la part du nucléaire de 75 à 50% dans la production d’électricité d’ici 2025.
Lors de la conférence de presse du lancement de la BPI, Pierre Moscovici allait même encore plus loin en annonçant que la banque avait même été conçue « comme un outil permettant de structurer le soutien financier aux filières stratégiques pour l’économie du pays : conversion numérique, transition écologique et énergétique, économie sociale et solidaire, développement des entreprises dans les zones urbaines défavorisées ». Des déclarations qui ne pouvaient que ravir les écologistes à l’époque.
Néanmoins, quelques mois plus tard, Delphine Batho et Arnaud Montebourg, en véritables VRP du nucléaire, annonçaient fièrement la création d’un groupement d’intérêt économique pour le soutien du nucléaire français à l’export, ainsi que la mise en place d’un fonds pour la modernisation des entreprises nucléaires financé notamment par la Banque Publique d’Investissement à hauteur de 50 millions d’euros. Cherchez l’erreur…
Le nucléaire français, qui a déjà bénéficié de plus de 228 milliards d’euros depuis les années 50, avait-il besoin des nouvelles largesses de l’Etat, quand dans le même temps, les artisans et les entreprises du bâtiment et des énergies renouvelables poursuivent leur traversée du désert en attendant, bon an mal an, des signaux positifs et durables de l’Etat ? Certains d’entre eux étaient d’ailleurs présents à nos côtés, ce week-end à Paris, pour dresser une chaîne humaine contre le nucléaire, en mémoire aux victimes de la catastrophe de Fukushima.
Monsieur le Président, mes chers collègues, « l’affaire du cheval » n’est pas une simple affaire d’étiquette et de traçabilité. Elle illustre les fraudes et les scandales de notre système productiviste, mais aussi et surtout ses fondements les plus délétères.
La réduction de la part de l’alimentation dans les budgets des ménages, la compression des paysans par la grande distribution, l’explosion des distances entre les lieux de production et de commercialisation des produits alimentaires, et la spéculation sur les matières premières menacent notre santé, notre environnement et nos emplois. Il est temps de sortir de ce cercle vicieux et de considérer l’alimentation, tout comme le logement, l’éducation, et la santé, comme les biens élémentaires les plus précieux, dont l’accès à tous doit être la priorité absolue de tous les gouvernants.
Il est urgent d'agir pour favoriser le commerce de proximité, encourager les circuits courts, donner la priorité à l’agriculture biologique, aider les agriculteurs sur des critères de qualité et non de quantité, réserver les espaces périurbains à l’agriculture maraichère, à la transformation … Le ministre de l’agriculture a fait quelques pas en ce sens. Il peut bien évidemment compter sur les écologistes pour l’appuyer dans un changement de cap bien plus radical encore.
Enfin, Monsieur le Président, mes chers collègues, l’avenir des élèves, du personnel et des formations du lycée professionnel de Romagnat nous interpelle fortement, et c’est pour cette raison que nous avons rencontré hier les organisations syndicales et plusieurs professeurs de ce lycée. Nous irons également visiter le lycée et son Internat lors des portes ouvertes organisées les 22 et 23 mars.
De plus, afin que nous nous prononcions en juin en toute connaissance de cause, le groupe écologiste souhaite que le Conseil régional d’Auvergne commandite un audit indépendant permettant d’évaluer précisément :
- Premièrement, les coûts réels d’un éventuel maintien du Lycée Vercingétorix à Romagnat et des travaux à engager, car sur ce point les nécessités et les montants annoncés ici et là varient très fortement.
- Deuxièmement, les coûts réels de ce transfert, non seulement financiers mais aussi pédagogiques. Il est indispensable pour nous de pouvoir répondre à plusieurs questions avant de prendre une quelconque décision, parmi lesquelles :
1) A combien pouvons-nous estimer par exemple le transfert vers un autre lycée des plateaux techniques de l’imprimerie et de l’électro-technique ?
2) Nos lycées de l’agglomération clermontoise ont-ils réellement la place pour accueillir les équipements techniques et pédagogiques du lycée Vercingétorix ?
3) Quid de l’Internat de ce lycée et du transfert des élèves ?
Pour terminer, Monsieur le Président, tout comme pour le projet de transfert du lycée Vercingétorix, nous avons pris connaissance par voie de presse de vos intentions sur le budget 2013 de notre collectivité et je dois bien avouer que nous avons été très surpris de lire que le Conseil régional allait, je cite : « geler certains crédits 2013 pour éviter une situation en fin d’année difficile dans la perspective de l’année 2014 » et que « des interventions de la Région seront arrêtées ». Comme quoi il est très utile pour un conseiller régional d'être abonné à un journal ! Nous préférerions cependant une association préalable de l'ensemble de la majorité, dans l'esprit de ce que nous avions l'habitude de faire jusqu'ici pour la construction de nos budgets régionaux.
Cela dit, notre groupe est très conscient des difficultés budgétaires et il est prêt, comme toujours, à vous proposer des réorientations et la suppression de dépenses contraires au développement durable.
Je vous remercie.