Quartier numérique ? Oui, mais au service du territoire

Le conseil communautaire de Clermont Communauté s’est prononcé le 16 octobre dernier sur la création d’un quartier numérique à Clermont-Ferrand. Pensé comme un incubateur d’activités numériques innovantes, il est censé mettre notre agglomération au niveau d’innovation des autres métropoles françaises en créant un écosystème d’entreprises dans ce secteur. S’abstenant sur la gouvernance du projet, les écologistes ont posé un certain nombre de conditions.

Si le numérique peut être une source de progrès potentiels pour notre société, il est cependant nécessaire de savoir ce que l’on veut en faire. Aussi sur ces questions, prendrons-nous position en faisant une série de propositions destinées à cibler un peu mieux nos engagements. Il est souvent trop commode de s’en tenir aux notions convenues d’innovation ou excellence ; mais cela ne dessine ni un projet, ni une politique.

Pour les écologistes, le quartier numérique clermontois doit offrir une série d’opportunités au territoire et à ses habitants :

1- Implanter – Au-delà des liens réaffirmés avec les seules grandes entreprises, il y aurait grand intérêt à veiller aux liens avec les initiatives existantes dans les secteurs voisins des Fablabs et de l’économie collaborative avec notamment l’Acolab, ou l’Epicentre coworking. Et ce, afin d’en nourrir et d’en élargir les retombées pour la population de l’agglomération.

2- Optimiser – L’innovation et l’excellence pourraient se mettre au service de la transition écologique et notamment énergétique du territoire. La révolution numérique est aussi grande consommatrice d’énergie et il serait sans doute intéressant de veiller à sa sobriété et à son efficacité énergétique, en veillant notamment à la récupération de chaleur fatale (perdue) des serveurs de proximité. C’est toute la problématique des green data centers, ou serveurs écolos.

3- Utiliser – Au- delà de l’innovation pour l’innovation, l’innovation numérique pourrait également se mettre au service des usages quotidiens et domestiques afin d’en garantir l’optimisation, c’est-à-dire le plus grand confort et le moindre impact écologique. Ce sont par exemple toutes les applications liées à la mobilité, censée faciliter la fluidité et l’intermodalité des parcours de chacun.

4- Libérer – Condition sine qua non du point précédent, l’open data ou libération des données est un autre impératif. Développer le numérique sur notre territoire et au service du territoire nécessite d’en capter et d’en activer le vivier de données et le mettre à disposition des acteurs du territoire. Dans l’autre sens, il serait nécessaire de demander aux porteurs de projets appelés à être soutenus publiquement dans le cadre du quartier numérique d’adopter eux-mêmes une démarche d’open data afin qu’ils remettent leurs données – voire une partie de leurs codes – dans le domaine public et que de nouvelles applications puissent voir le jour à partir de ce qu’ils auront produit.

Il nous semble donc nécessaire de définir dans le même temps une véritable stratégie d’ouverture des données à l’échelle de notre agglomération, voire du Grand Clermont ou de la future Métropole.

5- Associer – Lier la création de nouvelles activités dans ces secteurs à la politique de développement économique des quartiers Politique de la Ville en veillant aux possibilités d’implantation des entreprises qui sortiront de cet incubateur de jeunes pousses que sera le quartier numérique.

6- Évaluer – Il nous semble essentiel qu’il puisse y avoir une évaluation de ce quartier numérique de façon à avoir une vision globale des projets soutenus et de leur pérennité.

7- Piloter – Projet principalement porté par des fonds publics, il est légitime que les collectivités publiques soient décisionnaires. Cependant cette gouvernance au service du territoire aurait été plus efficace si elle avait profité d’une gouvernance délibérative : Clermont Communauté disposera de 5 voix dans cette instance (à égalité avec le Conseil régional) ; cinq voix qui ne seront portées que par une seule personne. Le débat aurait permis de mieux nourrir et définir la stratégie numérique de ce futur quartier qui se doit d’être au service concret de notre territoire, et pas seulement sur les plans bien abstraits de « l’excellence et de l’innovation ».

Le futur quartier numérique présente un visage intéressant. Mais c’est un outil coûteux qu’il convient d’utiliser de façon optimale pour notre territoire. Et ce, sans céder à une sorte de passion aveugle pour l’innovation numérique dont les effets sur la croissance et l’emploi suscitent de plus en plus de réserves parmi les le monde académique (voir les positions de Patrick Artus ou de Daniel Cohen)

 

 

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