[Logement] Une crise de l’offre

L’engagement présidentiel était de 500 000 logements par an. Avec la crise, l’objectif a été repoussé à 2017, fin du quinquennat. Face à la croissance soutenue de la demande de logements, l’offre a du mal à suivre. Elle doit en fait répondre à trois exigences simultanées :
– combler le retard accumulé depuis le début des années 1990
– répondre à la hausse constante du nombre de ménages
– répondre à la demande de rénovation du parc.
Les experts estiment les besoins annuels à près de 500 000 logements neufs, chiffre atteint une seule fois au début des années 1970 ; le pic de construction de logements neufs est enregistré en 1972 à la veille de la première crise pétrolière. Depuis, malgré une reprise de la construction au début des années 2000, le seuil des 500 000 n’a plus été atteint (450 000 en 2007 ; puis 360 000 en 2010). En 2012, on a compté 346 500 mises en chantier.

Pour Michel Mouillart, professeur d’économie à l’université de Paris-X, qui ne voit «pas de signe d’une remontée des mises en chantier dans les mois qui viennent», l’année 2013 devrait s’achever par «un petit 330.000 mises en chantier». Sur douze mois, entre août 2012 et juillet 2013, le nombre de logements neufs mis en chantier continue à afficher une baisse marquée (-13,4%), à 301.626 unités.
Si l’on construisait 89 000 logements sociaux en 1994 contre 43 000 en 1999 et 2000, on atteint aujourd’hui difficilement les 100 000 quand il en faudrait 150 000.
Pour le secteur privé, le mouvement semble difficile à relancer dans le contexte économique actuel. Le fort taux de chômage et les incertitudes quant à l’avenir ne contribuent pas à rassurer les investisseurs potentiels, tant dans l’acquisition que dans le locatif.

Aussi, l’ensemble des aides à la pierre – toutes les aides destinées à la construction et au logement, soit près de 40 milliards d’euros – semble-t-il particulièrement inefficace en termes d’incitation et de soutien à l’offre de logements. Pire, nombre d’experts estiment qu’outre leur inefficacité économique, elles jouent un rôle inflationniste sur le marché du logement et de la construction, le montant des aides étant pris en compte dans la détermination des prix par les promoteurs et les bailleurs. Quant aux formules d’accès au crédit de type prêt à taux zéro, elles donneraient lieu à de fortes dépenses fiscales pour de non moins massifs effets d’aubaine : le PTZ n’aurait déclenché l’accession à la propriété que dans seulement 14% des cas ; les 86 % restants auraient eu lieu même sans existence de ce prêt.
Par-delà l’utilité des aides, se pose également la question de leur pertinence selon les territoires : ces aides à la pierre ne devraient-elles pas être concentrées sur les zones les plus tendues en termes d’offre de logement ? La question du ciblage et du zonage de ces dispositifs est donc incontournable (c’est d’ailleurs la raison pour laquelle le dispositif d’aides au prêt pour le logement locatif, Scellier, a fait l’objet d’un zonage, A, Abis, B1, B2, C en 2009).

Mais au-delà de la seule conjoncture économique, les principaux blocages auxquels on doit cette atonie de la construction de logements neufs sont de deux ordres :
– la question de la disponibilité et de la maîtrise du foncier.
– celle des coûts de construction.
[A suivre]

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