P. Canfin : Un nouveau cap pour la politique française de développement

Les nouvelles priorités françaises en matière de développement ont été définies par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement le 31 juillet. Enjeux : rendre plus efficace, cohérente, lisible et transparente la politique de développement et de solidarité internationale.

Le CICID définit les axes prioritaires de la politique française de développement et de solidarité internationale. Il n’avait pas été réuni depuis juin 2009. Après les Assises du développement et de la solidarité internationale, pilotées de novembre 2012 à mars 2013 par le ministre délégué chargé du Développement, et clôturées par le président de la République, cette réunion du CICID témoigne de la volonté du Gouvernement de fixer un nouveau cap à la politique française de développement, engagée depuis le début du quinquennat pour répondre aux défis du siècle que sont, en particulier, la lutte contre la pauvreté et la préservation de la planète.
Dans cet esprit, le CICID a adopté plusieurs décisions favorisant l’efficacité, la cohérence, la lisibilité et la transparence de notre aide (ci-dessous le relevé de décisions).

 

Un projet de loi pour le développement

Le premier projet de loi d’orientation et de programmation sur la politique de développement et de solidarité internationale de la Ve République sera présenté au Conseil des ministres en novembre prochain, pour un débat au Parlement début 2014.

Il permettra d’inscrire dans la loi les nouvelles orientations de la politique française de développement actées par le CICID. Cette loi affirmera la nouvelle vision française du développement. La politique de développement de la France est une dimension importante de notre diplomatie. Elle s’inscrit dans un nouveau cadre, reposant sur la lutte contre la pauvreté et le développement durable dans ses trois composantes : économique, sociale et environnementale. Cette politique vise à participer à l’effort international de réduction des inégalités en favorisant un développement économique équitable et riche en emplois, en préservant les biens publics mondiaux, en luttant contre le changement climatique et en promouvant la paix, la stabilité et les droits de l’homme. Elle promeut l’égalité entre les femmes et les hommes. Elle concourt au rayonnement culturel, diplomatique et économique de la France.
Concentrer notre aide pour qu’elle soit plus efficace

Afin de renforcer l’efficacité de l’aide au développement, le Gouvernement décide de redéfinir les priorités géographiques et de concentrer son aide en dons en direction des pays les plus pauvres. À partir de 2014, la France concentrera la moitié de ses dons et les deux tiers de ceux de l’AFD vers les pays pauvres prioritaires (PPP). Les pays en crise, sortie de crise ou en situation de fragilité bénéficieront d’une attention particulière.

85 % de l’effort financier en faveur du développement seront dirigés vers les pays de l’Afrique subsaharienne et les pays voisins du sud et de l’est de la Méditerranée.

  • Dans ce cadre, les pays d’Afrique subsaharienne demeurent la priorité de la France. L’ensemble des instruments: dons, aides budgétaires, prêts bonifiés ou non bonifiés, souverains ou non souverains, prises de participations, garanties, financements innovants y seront mobilisés, dans tous les secteurs opportuns.
  • Dans les pays voisins du sud et de l’est de laMéditerranée, la France interviendra prioritairement sous forme de prêts, complétés par des actions dans les domaines culturels, scientifiques et de formation. L’engagement de la France ciblera la gouvernance démocratique, le renforcement des secteurs agricoles et industriels, la création d’emplois et l’aménagement durable du territoire.

Dans le reste du monde, notamment les pays d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes, rassemblant majoritairement des pays à revenus intermédiaires à croissance rapide ou émergents, l’aide française visera à promouvoir une croissance verte et solidaire, en y favorisant notamment des partenariats économiques. La coopération avec les grands émergents ne mobilisera pas de coût financier pour l’État.
Des politiques publiques en cohérence avec la politique de développement Parce que de nombreuses politiques sectorielles ont un lien avec la politique de développement, le CICID réaffirme le principe de cohérence entre la politique de développement et l’ensemble des politiques pouvant affecter les pays en développement partenaires, telles que les politiques commerciales afin de favoriser leur insertion dans les échanges commerciaux mondiaux. Le CICID souligne certaines priorités :

  • Convaincu que la politique française d’aide au développement doit contribuer à la lutte contre le changement climatique, et dans le cadre de la préparation de l’accueil par la France en 2015 de la conférence des Nations unies sur le climat, le CICID confirme l’objectif de l’Agence Française de Développement (AFD), acteur principal de la politique française, d’intégrer un co-bénéfice climat dans 50 % des projets qu’elle finance.
  • Le CICID adopte une nouvelle « stratégie genre et développement » pour la période 2013-2017. D’ici 2017, 50 % des projets et programmes de l’aide française au développement devront comporter un objectif d’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes.
  • Le CICID rappelle que l’accès à l’éducation, à la santé, le développement du capital humain et la recherche sont au coeur des processus de développement et partie intégrante des objectifs du millénaire pour le développement.
  • Parce que l’agriculture et la pêche sont des outils importants dans la lutte contre l’insécurité alimentaire et la préservation de la biodiversité au Sud, la promotion de l’agriculture familiale, riche en emplois et respectueuse des écosystèmes est placée au coeur de l’action de la France.
  • La politique de développement doit favoriser la responsabilité sociale et environnementale (RSE) des organisations et des entreprises oeuvrant dans les pays en développement. La France engagera un plan d’action de l’AFD en ce sens pour la période 2014-2016. Le Gouvernement lance en outre cette année les travaux de concertation pour une meilleure responsabilisation des entreprises multinationales françaises, vis-à-vis de leurs filiales et de leurs fournisseurs dans les pays en développement. La France soutient enfin un renforcement des exigences sociales et environnementales dans le cadre des réformes en cours au sein des institutions financières internationales.
  • Le CICID réaffirme l’attachement de la France aux financements innovants pour le développement. La France est le 1er pays aumonde à avoirmis en place une Taxe sur les Transactions Financières et à en avoir affecté une partie des revenus au développement. Jamais actualisée depuis sa création en 2006, la taxe de solidarité sur les billets d’avion sera revalorisée de 12,7 % (correspondant au rattrapage de l’inflation) au bénéfice de la lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose.

Une politique de développement qui privilégie l’efficacité et la transparence Alors que la France est la 4e contributrice mondiale de l’aide publique au développement (9,4 milliards d’euros par an), cette politique reste mal connue d’une majorité de français. De plus, la transparence sur l’avancée des projets, les flux d’aides, les bénéficiaires permet de renforcer l’efficacité des actions et leur appropriation. Le Gouvernement souhaite donc agir pour plus de transparence :

  • D’ici fin 2015, et pour la première fois, des données chiffrées de plus en plus complètes et actualisées concernant les projets d’aide au développement en cours seront publiées sur la plateforme nationale data.gouv.fr.
  • Un site internet sera mis en ligne dans les prochaines semaines afin de donner des informations précises sur les projets financés dans le cadre de l’aide française au développement au Mali. Plus largement la France s’efforcera de publier les informations requises par le standard IITA (Initiative internationale pour la transparence de l’aide) dans les pays pauvres prioritaires en 2014.
  • Enfin, dans le but de favoriser la lisibilité et la transparence de l’aide vis-à-vis du Parlement et de la société civile, le CICID adopte pour la première fois une grille d’indicateurs de résultats de l’aide bilatérale et multilatérale (par exemple : nombre d’enfants scolarisés, nombre de passagers empruntant les transports en commun sur les tronçons financés…).

Une politique de développement coordonnée avec l’ensemble des acteurs

Parce que les Françaises et les Français sont particulièrement actifs dans le domaine du développement et de la solidarité internationale, soit par leur adhésion à des ONG (plus de 3 300 ONG de solidarité internationale sont présentes en France), leur générosité (entre 1,5 et 2 millions de donateurs), les actions de leurs élus nationaux ou locaux, la question de la coordination des acteurs du développement et de la solidarité internationale, pour plus d’efficacité de l’aide, est un enjeu central. Depuis la dissolution en 2008 du Haut Conseil de la Coopération Internationale (HCCI), aucune instance de concertation ne se réunissait. Le CICID a décidé la création d’un Conseil National du Développement et de la Solidarité Internationale (CNDSI) (création accompagnée de la suppression du conseil stratégique pour la coopération non gouvernementale). Paritaire, le CNDSI sera chargé de maintenir une concertation régulière entre l’État, les élus et la société civile.

Alors que l’Union européenne est le premier bailleur de fonds mondial pour l’aide au développement et qu’elle représente donc un levier financier très important dans la lutte contre la pauvreté, la France encourage la programmation conjointe entre l’Union européenne et les États membres. Plus largement une stratégie pour l’aide multilatérale, incluant les grandes familles d’institutions (onusiennes, européennes, financières internationales) sera élaborée d’ici fin 2014. Elle mettra en lumière

 

Le relevé de décisions :

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