La reconquête des paysages et la place de la nature en ville
La ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Ségolène Royal, a présenté en conseil des ministres une communication relative à la reconquête des paysages et la place de la nature en ville.
« La France est riche de paysages d’une exceptionnelle diversité. Monuments de la nature, jardins et parcs, perspectives façonnées au fil des siècles par le travail humain ont construit, dans les campagnes et dans les villes, les singularités locales et l’identité commune de la France. Leur beauté et leur cachet contribuent à la réputation internationale du pays, première destination visitée au monde, et au dynamisme de l’économie touristique, qui représente 7% du produit intérieur brut et 8% des emplois. »
« Les Français sont très attachés à ce patrimoine terrestre, marin et même sous-marin et nombreux sont ceux qui se mobilisent pour l’inventorier ou le défendre. Ils sont sensibles à la qualité paysagère de leur environnement, critère dont 7 Français sur 10 tiennent compte pour choisir leur lieu de résidence. Gisements précieux d’activités et d’emplois non délocalisables, les paysages sont des éléments déterminants du cadre de vie, de la santé et du bien-être de chacun, et la condition d’un art de vivre ensemble. Ce capital paysager, qui constitue un bien commun, mérite d’être préservé, réparé, plus équitablement distribué et mis en valeur. »
La loi du 8 janvier 1993 a accéléré la prise de conscience de l’importance de la ressource paysagère et créé de nouveaux outils pour que l’urbanisme, l’aménagement et les politiques sectorielles l’intègrent davantage. Elle a ouvert la voie à la ratification par la France en 2005 de la Convention européenne du paysage.
Une vingtaine d’années après cette impulsion fondatrice, le temps est venu de relancer une action vigoureuse qui mette l’accent, au-delà des sites remarquables, sur les paysages du quotidien et les lieux de vie de tous les Français. Car les paysages sont aujourd’hui au cœur d’enjeux majeurs : la lutte contre le réchauffement climatique et la transition énergétique vers une croissance verte ; la création de « territoires de l’après-pétrole », à énergie positive entièrement renouvelable ; la protection et la valorisation de la biodiversité ; la requalification des espaces dégradés par le mitage, la banalisation, les destructions paysagères, la désorganisation aux abords des villes et des bourgs ; l’invention nécessaire de nouvelles relations entre ville et nature, de nouveaux équilibres entre urbanité et ruralité.
« Ni le vieux modèle fonctionnaliste avec sa prolifération de zones spécialisées privées de paysages, ni le laisser-faire et ses inégalités paysagères ne permettent de relever les défis économiques, écologiques, culturels et sociaux du temps présent. Les textes législatifs et réglementaires fixent des obligations, mais seule la mise en mouvement conjointe des citoyens, des entreprises, des territoires et de l’État peut donner à la reconquête des paysages l’élan d’une mobilisation partagée. »
C’est pourquoi le Plan d’action lancé met en place une politique nationale volontariste, incitative, partenariale et cohérente avec les objectifs du volet « Paysage » du projet de loi sur la biodiversité. Pour multiplier, valoriser et diffuser les initiatives les plus créatives et les plus efficaces, il actionne 9 leviers :
1) Le lancement du Printemps des Paysages et des Jardins en mai 2015, en partenariat avec les collectivités territoriales, avec la création d’un palmarès de « 1000 projets pour les paysages » (dans cinq domaines prioritaires : éducation et sensibilisation ; planification urbaine et paysagère incluant la participation des citoyens ; réalisations remarquables de professionnels du paysage en milieu rural, urbain et péri-urbain ; actions d’entreprises conjuguant transition énergétique et conception paysagère ; agro-écologie et gestion paysagère) et avec l’intégration des aménagements paysagers dans la démarche « Terre saine, commune sans pesticides » lancée en mai 2014.
2) Le soutien à 10 chantiers-laboratoires de restauration paysagère et requalification de territoires péri-urbains dégradés.
3) L’intégration du rôle des paysages et de son évaluation dans le 3ème Plan national santé-environnement (barrière contre les agents pathogènes, influence des espaces verts sur les convalescences post-opératoires, la santé psychique et les apprentissages scolaires).
4) La rénovation du Grand Prix national du Paysage (qui n’était plus attribué depuis 2012) autour du thème « les paysages de la transition énergétique et de la croissance verte ».
5) La généralisation des Plans de paysage pour la réalisation de projets de territoires partagés définissant des objectifs locaux de qualité paysagère et les moyens de les atteindre.
6) La pérennisation de l’inscription du patrimoine naturel dans les journées annuelles du patrimoine.
7) L’appui à la reconnaissance pleine et entière du métier de paysagiste, et la valorisation de ses compétences avec la réforme du diplôme d’État de paysagiste.
8) Le parrainage de la création d’une chaire d’entreprise « Paysage et Energie » au sein de l’École nationale supérieure du paysage de Versailles, centrée sur la conjugaison des enjeux énergétiques et paysagers.
9) La constitution d’un réseau de territoires d’exception, afin de soutenir leurs demandes de classement, d’obtention du label Grand Site de France et d’inscription de biens naturels au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Enfin, la reconquête des paysages est l’affaire de tous : chacun peut y contribuer. Le ministère chargé de l’écologie lance un appel national à projets : « un habitant, un arbre » afin que soient plantés plus de 60 millions d’arbres en dix ans.
Le partenariat est proposé à toutes les collectivités territoriales et toutes les associations pour que chaque habitant, en milieu rural, urbain ou péri-urbain, puisse améliorer son lieu de vie et les paysages de notre pays.
Rapport Une nouvelle approche sur l’aménagement de notre cadre de vie
Ségolène Royal s’est vu remettre, le 8 septembre, le rapport « Paysage et aménagement : propositions pour un plan national d’action ». Elaboré par le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), il vise à donner les contours d’une nouvelle politique des paysages et des jardins associant attractivité des territoires et #croissanceverte.
Ce rapport fait suite à la mission sur le paysage, réalisée en 2011, avec l’objectif de connaître le paysage et d’en reconnaître sa valeur. Ségolène Royal a réuni les auteurs du rapport : Denis Clément, Jean-Luc Cabrit et Marie-Pierre Doizelet ainsi que de nombreux experts du paysage et de l’urbanisme pour définir les axes de la relance de la politique du paysage et des jardins, près de 20 ans après la loi du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages.
Faisant le constat que :
o le paysage n’est pas considéré comme un axe à part entière des démarches d’aménagement de l’espace.
o le paysage du quotidien connaît une tendance régulière à la banalisation, voire à la dégradation.
L’enjeu est de faire évoluer les pratiques vers une meilleure valorisation du paysage et, par exemple, d’encourager les municipalités à penser l’espace public, le jardin et les paysages avant la création architecturale ou les opérations d’aménagement. Cette réunion de travail a permis de partager les constats, d’envisager les solutions et les propositions qui pourraient nourrir une nouvelle politique des paysages et des jardins, pour une croissance verte.