Fermeture des mosquées : clarification

Des citoyens m’ont interpellé à propos de mon vote sur des amendements concernant la fermeture de lieux de cultes, discutés en 1ère lecture du projet de loi de prolongation de l’état d’urgence de six mois, le 20 juillet dernier.

L’interprétation politicienne de ce vote, relayée et manipulée par de nombreux sites d’extrême droite, comme « un refus de fermetures des mosquées salafistes », est déplacée et ne prend pas en compte de l’arsenal législatif et juridique déjà existant et mis en application.

 

Le ministre de l’intérieur, pour l’ensemble du territoire où est institué l’état d’urgence, et le préfet, dans le département, peuvent ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature, [en particulier des lieux de culte au sein desquels sont tenus des propos constituant une provocation à la haine ou à la violence ou une provocation à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes] dans les zones déterminées par le décret prévu à l’article 2. Peuvent être également interdites, à titre général ou particulier, les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre.

 

Aussi, l’état de notre droit en matière d’état d’urgence fait que ces amendements sont déjà totalement satisfaits. En effet, l’article 8 de la loi de 1955 et le code de la sécurité intérieure autorisent la fermeture provisoire des lieux de culte, et plus généralement de tout lieu de réunion, pendant la durée de l’état d’urgence. C’est d’ailleurs sur ce fondement que de nombreuses mosquées ont été fermées depuis le début de l’état d’urgence. Pour la dissolution des associations ou des groupements de fait responsables des lieux, l’amendement fait également doublon avec l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, la seule différence proposée étant que la décision ne serait plus prise en conseil des ministres, mais par le ministre de l’intérieur ou le préfet.

 

Depuis 2012, le Gouvernement a prononcé 80 mesures d’expulsion de « prêcheurs de haine » ou de pseudo-imams autoproclamés. Dix mosquées ou salles de prières radicalisées ont été fermées sur le fondement de l’article 8 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence. Trois associations prétendument vouées à l’exercice du culte ont fait l’objet d’une dissolution en conseil des ministres sur le fondement des alinéas 6° et 7° de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. Les dispositions proposées par les amendements LR sont donc redondantes avec le droit existant et n’apportent pas plus d’efficacité.

 

Cependant, par souci de clarification, un amendement comparable relatif à la fermeture « des lieux de culte au sein desquels sont tenus des propos constituant une provocation à la haine ou à la violence ou une provocation à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes » a été voté au Sénat et maintenu en Commission Mixte Paritaire (également par les députés du groupe SER). Il modifie l’article 81 de la loi de 1955 sur l’Etat d’Urgence. Le projet de loi comprenant cette mesure a été adopté à l’Assemblée Nationale le 21 juillet.

 

La dissolution de l’association ou du groupement de fait responsable de ce lieu de culte reste du ressort du Conseil des ministres et de l’application du code de la sécurité intérieure.

 

Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, a rappelé le 1er août dernier lors de sa réunion avec le Conseil français du culte musulman qu’une vingtaine de mosquées et salles de prières jugées radicales avaient été fermées depuis décembre 2015.

 
Des fermetures administratives vont se poursuivre. Le ministère de l’Intérieur a listé 120 lieux de culte liés à la mouvance salafiste concernés.

 

 

Amendement finalement voté par le Sénat et par l’Assemblée en lecture post CMP :

Article 1er ter A

L’article 8 de la même loi est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après les mots : « de toute nature », sont insérés les mots : « , en particulier des lieux de culte au sein desquels sont tenus des propos constituant une provocation à la haine ou à la violence ou une provocation à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes,» ;

 

Les actes terroristes successifs revendiqués par Daesh ont plongé les Français dans l’effroi. Oui, nous pouvons être touchés n’importe où, n’importe quand, n’importe comment.

La France résistera dans l’unité comme à chaque fois dans son histoire en regardant les problèmes en face, sans tabous. Elle le fera à la condition d’éviter deux écueils, la simplification et la surenchère. La période électorale fait craindre le pire.

Nous avons autant de défis à relever : laïcité et hiérarchie des valeurs (République/religion), ghettos et injustices sociales,  financement des mosquées et formation des imams,  départs et retours du Jihad, loi pénale appliquée aux terroristes, prisons, sites internet, interventions militaires extérieures, etc. Des problèmes de courts termes, d’autres de long terme ; tous doivent être traités.

Il faut également développer auprès de nos concitoyens une culture du risque. Une vigilance accrue pour déjouer les menaces et adapter les comportements en cas d’agression.

Cette action est complémentaire au renforcement des services de renseignement et des moyens pour la sécurité (Police, Gendarmerie, Armée) et la justice.

Entre 2012 et 2017, 9 341 postes auront été créés pour les forces dont 5 744 pour la police et 3 199 pour la gendarmerie, alors que  13 700 postes ont été supprimés par le précédent gouvernement sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy.

Face au terrorisme, la responsabilité politique est d’agir avec efficacité, mesure, justesse, fermeté et dans l’unité nationale.

Éric Alauzet

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