Evasion fiscale : Eric Alauzet : « A quand le reporting public pour toutes les entreprises ? »

Le CCFD – Terre solidaire, OXFAM et le Secours catholique, en partenariat avec la plateforme « Paradis fiscaux et judiciaires (PPFJ) » ont présenté ce mercredi leur rapport d’analyse détaillée des informations concernant les cinq plus grande banques françaises.

Article : http://ericalauzet.eelv.fr/rapport-dong-sur-la-piste-des-banques-francaises-dans-les-paradis-fiscaux/

Pour le député du Doubs : « Cette étude confirme les forts soupçons qui pèsent sur la manière dont les banques utilisent les paradis fiscaux aux mêmes fins que l’ensemble des entreprises multinationales : le transfert artificiel de bénéfices depuis le pays où elles exercent réellement une activité pour réduire leurs contributions fiscales. Ce travail de fourmi permet de disséquer l’évasion fiscale, de savoir dans le détail où et comment ça se passe. Ainsi, cela parait incroyable mais, aux Iles Caïmans, aux Bermudes et à Malte, le résultat peut être égal au chiffre d’affaire, en moyenne dans les paradis fiscaux, le profit est supérieur de 60% avec un résultat qui passe de 22% à 36%. Rien d’étonnant quand le personnel y est 2,6 fois moins nombreux et 2,6 fois plus productif. Une productivité seize fois plus importante en Irlande qu’en France avec une pointe d’un facteur 31 ».

La publication en 2015 a pu être possible après l’amendement qu’Éric ALAUZET qui a été porté avec le groupe ECOLO à l’Assemblée nationale * et destiné à lutter contre l’évasion fiscale, les banques ont rendu publiques les informations financières sur leurs activités et leurs impôts qu’elles paient dans tous les pays où elles sont implantées.

« Ce travail considérable et précieux réalisé par les associations met en lumière des pratiques qui sont devenues intolérables et auxquelles il doit et il peut être mis fin grâce au programme BEPS proposé par l’OCDE et que la France a commencé à mettre en œuvre dans la loi de finances 2016** » souligne le membre de la commission des finances. Ce rapport montre le rôle décisif de ces associations et de la société civile dans son ensemble qu’ils peuvent jouer pour combattre ces dérives.

Aussi, le député a interpellé ce même mercredi le gouvernement, dans le cadre de la séance des Questions au Gouvernement, sur la question du « reporting public » en France et en Europe : « La question est maintenant de savoir comment l’Union Européenne, ses états membres et les administrations vont utiliser ces informations pour mettre fin à cette situation insensée et intolérable qui ruine les comptes publics et fait porter la charge fiscale sur les ménages et de nombreuses entreprises qui restent loyales ? ». Et de demander de savoir « Comment l’Union européenne et la France vont traiter la question de l’extension du reporting public à l’ensemble des entreprises. En prenant garde que ce reporting ne reste pas réserver à l’administration et qu’il concerne bien toutes les entreprises et toutes les filiales à travers le monde ? »

« Les faits présentés dans ce rapport doivent conduire notre pays et la communauté internationale à étendre le système de « reporting public » à l’ensemble des entreprises multinationales dès la prochaine loi Sapin sur la transparence économique et financière afin de solder l’épisode malheureux au cours de laquelle le Gouvernement avait demandé une seconde délibération pour repousser le reporting public généralisé, pourtant adopté par les députés ». En effet, le Gouvernement avait demandé une seconde délibération lors de la fin de l’examen de la loi de finances 2016 pour revenir sur l’adoption de l’amendement d’Éric ALAUZET voté dans l’hémicycle à son initiative.

Pour le député : « La transparence est la mère de toutes les batailles ».

 

*Amendement sur le « reporting » bancaire pays par pays dans le cadre de la loi sur la séparation et la régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013 qui a mis la France en pointe sur le sujet avant que l’Union européenne n’adopte le même dispositif quelques mois plus tard.

** Amendement d’application du plan, dit BEPS, de l’OCDE (Loi de finances 2016 – article 47).

Question et réponse :

Éric Alauzet, député du Doubs. Monsieur le Président, Monsieur le Ministre des Finances,

Pour la première fois, grâce à la plateforme « Paradis Fiscaux et Judiciaires » des ONG, nous disposons d’un rapport d’analyse relatif aux informations financières concernant les cinq plus grandes banques françaises.

Dévoilé aujourd’hui, ce travail concrétise, deux ans plus tard, l’adoption d’une directive européenne dite CRD IV précédée par un amendement parlementaire dans la loi bancaire française qui validait le reporting financier – public – pays par pays.

Ce travail de fourmi permet de disséquer l’évasion fiscale, afin de savoir dans le détail où et comment ça se passe. Ainsi, cela parait incroyable mais entendez bien chers collègues, aux Iles Caïmans, aux Bermudes et à Malte, le résultat peut être égal au chiffre d’affaire. En moyenne, dans les paradis fiscaux, pour un même chiffre d’affaire, le profit est supérieur de 60%, avec un résultat qui passe de 22% à 36% pour le même chiffre d’affaire. Rien d’étonnant quand le personnel y est 2,6 fois moins nombreux et 2,6 fois plus productif. La productivité est seize fois plus importante en Irlande qu’en France avec une pointe d’un facteur 31.

La question est maintenant de savoir comment l’Union Européenne, ses états membres et les administrations vont utiliser ces informations pour mettre fin à cette situation insensée et intolérable qui ruine les comptes publics et fait porter la charge fiscale sur les ménages et de nombreuses entreprises qui restent loyales ?

Puisque l’on a, avec ce rapport, fait la démonstration du rôle décisif que revêt la publication des  informations, il importe de savoir comment l’Union européenne et la France vont traiter la question de l’extension du reporting public à l’ensemble des entreprises. En prenant garde que ce reporting ne reste pas réserver à l’administration et qu’il concerne bien toutes les entreprises et toutes les filiales à travers le monde.

Monsieur le ministre, nous comptons pour cela sur votre futur projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, afin de concrétiser cette nouvelle avancée en matière de lutte contre l’évasion fiscale.

 

Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le député, votre question est bienvenue parce qu’elle permet de souligner le travail important, utile, effectué par les ONG qui, parfois depuis longtemps, luttent avec efficacité contre la fraude et l’optimisation fiscale. Votre question, qui évoque la publication de la situation des banques françaises dans d’autres pays, permet aussi de rappeler l’importance de ce qui a déjà été fait au niveau national comme au niveau européen.

Votre assemblée a voté une disposition qui s’applique depuis cette année, la publication des situations des entreprises internationales, même si elles peuvent avoir une origine française, dans l’ensemble des pays européens. Dans le cadre de l’OCDE, nous cherchons à faire en sorte que la transparence sur la situation fiscale des entreprises soit mondiale. C’est ainsi que nous pouvons lutter plus efficacement, y compris en France, contre les optimisations fiscales invraisemblables et insupportables auxquelles se livrent de très grandes entreprises, en particulier dans le domaine du numérique.

Vous demandez si la France est favorable à ce que, au-delà des administrations fiscales, directement concernées, tout un chacun puisse avoir accès à ces informations. J’ai déjà eu l’occasion, ici même, d’exprimer la position de la France. La France est favorable à la publication des informations dans le cadre européen. C’est la raison pour laquelle nous soutenons la position de la Commission, qui entend mettre en place un reporting pays par pays, public, dans l’ensemble des pays de l’Europe.

Un commentaire pour “Evasion fiscale : Eric Alauzet : « A quand le reporting public pour toutes les entreprises ? »”

  1. Il est là le « poignon » qu’on cherche à récupérer dans la poche des ouvriers

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