Eric Alauzet : « Il s’agit maintenant de faire la preuve en acte d’une réelle ambition pour l’écologie ».

La question du groupe écologiste au Premier Ministre – Mercredi 3 juillet

Eric Alauzet a réagi au départ de Delphine Batho du Gouvernement. Il regrette ce départ et la façon dont cela s’est passé mais il pense que, paradoxalement, cette situation peut renforcer l’écologie ainsi que  les liens entre la gauche et les Verts. Il faut maintenant des actes  et les projets écologiques pourraient même être mis en avant dans les semaines à venir.

« J’ai souhaité réagir au sujet du limogeage de la ministre de l’écologie, Delphine Batho.

Sur le fond, le message est néfaste, apparaissant comme un symbole de remise en cause de l’engagement écologique de ce Gouvernement.

Delphine Batho était aussi très contestée par les associations environnementales et EELV. Il y a quelques jours, elle l’a été par Corinne Lepage sur la question de constitutionnalité concernant l’interdiction de forage pour la recherche par fracturation hydraulique…

Mais comme toujours, les choses sont plus complexes et plus nuancées.

La baisse de 7% du budget de l’écologie est heureusement en réalité limitée à 3,5 % – comme pour les autres budgets… non prioritaires ! – en raison d’un financement des infrastructures de transports par la taxe poids lourds (800 000 euros à terme) qui soulage budget de l’écologie d’environ 350 000 euros, ces montants n’étant pas intégrés dans le budget de l’Etat car s’agissant de taxes affectées. Autrement dit, ce n’est pas une baisse de 500 millions d’Euros qu’il faut constater mais de 150 millions.

Le plus gros problème se situe au niveau des moyens affectés aux agences telles l’ADEME (captation des recettes de la TGAP déchets par l’Etat à hauteur de 14%) et agences de l’eau (suppression de plus de 500 postes).

Sur le fond, le signal n’est pas bon,  l’amputation du budget de l’écologie comme celui des agences est réel, mais :

– la politique écologique ne se résume pas à cette mission et à ce ministère : il y a le logement, l’énergie, les transports (cf rapport Duron sur les infrastructures de transport qui privilégie désormais la rénovation et la performance des transports existants, les transports du quotidien et de proximité), etc. Il y a également dans ce budget des politique qui ont peu à voir avec la transition écologique (météo France, la sécurité civile, la sureté nucléaire…)

– le travail sur la fiscalité écologique et la taxation des pollutions pour moderniser notre économie qui a avancé et  aboutira dès le budget 2014, le Premier Ministre s’y est engagé ce jour devant l’hémicycle suite à une question du groupe Ecolo (ci-dessous).

– les conclusions du travail sur la transition écologique qui sont attendues pour l’automne, …

Reste également posée la question des taux de TVA pour des services élémentaires taxés aujourd’hui à 7% que nous voulons ramener demain à 5% contrairement aux annonces faites à 10%. Il s’agit des transports, de l’eau, des déchets, de l’énergie bois. La TVA peut aussi donner un signal écologique et dynamiser les secteurs vertueux de notre économie.

Enfin, notre premier regard ira sur le choix des investissements d’avenir qui devraient être annoncés la semaine prochaine et pour lequel le premier ministre sera semble t-il attentif au contenu écologique des projets retenus

Quoiqu’il en soit, il faut prendre cette situation comme une opportunité. De la même façon que l’affaire « Cahuzac » a permis de relancer la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, l’affaire « Batho » va doper l’écologie. Cette situation oblige le Parti socialiste et le Gouvernement, pas seulement vis à vis des écologistes mais surtout de l’opinion. Il s’agit maintenant pour eux de faire la preuve en acte d’une réelle ambition pour l’écologie.

En tout cas, depuis quelques heures, les ouvertures du Gouvernement vers le mouvement ou les parlementaires écologistes se multiplient. Comme l‘a déclaré Pascal Durand, le Secrétaire national d’EELV, le Gouvernement devra apporter « des engagements clairs, des actes ».

C’est justement au moment où l’écologie va reprendre de l’importance qu’il faut participer à l’action gouvernementale. Bref, le contraire de la démission. L’enjeu est donc bien de montrer dans cette séquence que les écologistes peuvent co-construire et orienter les choix du Gouvernement pour faire de notre « nation, une nation d’excellence environnementale » comme le souhaitait François Hollande lui-même et le « fer de lance » d’une économie solide et moderne.

On va le faire… et on le fait déjà. Alors mettons en valeur nos avancées passées et à venir, notre ténacité et notre obstination, si on ne veut pas désespérer ceux qui peuvent ou veulent nous faire confiance.

Eric ALAUZET – 4 juillet 2013

Extraits de sa réaction audio sur France Bleu :

La question du groupe écologiste au Premier Ministre ce mercredi 3 juillet :

« Après une première année de mandat nos électeurs demandent des engagements clairs et un calendrier »

Monsieur le Premier ministre,

Vous avez, hier, décidé de faire acte d’autorité en mettant fin aux fonctions de Delphine Batho, ministre de l’écologie qui avait déploré dans la matinée la forte baisse annoncée des crédits de son département ministériel.

La ministre est partie, mais les questions soulevées, notamment sur la baisse envisagée des moyens du ministère de l’écologie demeurent.

Pour les écologistes, participer à la majorité est la conséquence d’un choix stratégique qui s’appuie sur des engagements communs.

Après une première année de mandat dont le moins que l’on puisse en dire est que sur les questions environnementales et de développement durable, beaucoup reste en suspens, nos compatriotes, nos électeurs demandent sinon des comptes, du moins des éclaircissements et des engagements clairs.

Le budget 2014 verra-t-il enfin les prémices concrètes d’une réforme profonde de la fiscalité ? Saurez-vous rendre l’impôt écologiquement plus intelligent et socialement plus juste ? Saurez-vous enfin mettre fin à des niches fiscales anti écologiques, engager une taxation réelle des activités polluantes, et procéder à la réduction des taux de TVA pour accompagner les mutations technologiques et comportementales indispensables à la transition écologique ?

Saurez-vous concentrer les financements des investissements d’avenir sur la rénovation thermique des bâtiments, les énergies renouvelables, les transports du quotidien ?

Le débat sur la transition énergétique débouchera-t-il rapidement sur une loi cadre : confirmez-vous les engagements présidentiels sur la réduction de la part du nucléaire et la fermeture de Fessenheim ?

Confirmez-vous l’interdiction de l’’exploitation des gaz de schistes et la priorité donnée au développement des énergies renouvelables ?

Sur chacun de ces points, monsieur le premier ministre, oui, sur chacun de ces points, nous attendons des réponses.

Nous voulons savoir si, enfin, la majorité et le gouvernement seront au rendez-vous de l’écologie.

Barbara POMPILI

 

Réponse du Premier ministre :

Madame la présidente du groupe écologiste, je ne crois pas que vous soyez vraiment inquiète, mais je comprends que vous me posiez ces questions. Je vais donc y répondre clairement.

L’environnement n’est pas une contrainte pour moi, contrairement à ce que certains peuvent dire ou écrire. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) La transition écologique, c’est un nouveau modèle de développement que nous devons construire. Loin d’être une contrainte, c’est une chance pour la France. Mais c’est aussi un défi. En effet cela implique des changements, y compris dans notre manière de concevoir les choses.

Sur la fiscalité, par exemple, vous m’avez posé une question précise.

Y aura-t-il une réforme de la fiscalité pour la rendre plus écologique et plus incitative ? La réponse est oui. Nous n’attendrons pas la fin du quinquennat de François Hollande : avec le ministre de l’économie, le ministre du budget et le nouveau ministre de l’écologie, Philippe Martin, nous tiendrons les engagements qu’il a pris.

Dès 2014, nous amorcerons cette réforme en profondeur, qui permettra de mobiliser les Français et de leur faire comprendre qu’il y va de leur intérêt économique, social, écologique, mais aussi en termes de santé. C’est le défi auquel nous sommes confrontés, et nous allons nous y attaquer ensemble !

En même temps, il nous faut faire preuve d’une grande pédagogie. Rien n’est simple, et il convient de prendre en compte les habitudes de pensées et les pratiques ; il faut aussi veiller à ne pas aggraver les inégalités sociales. Telle sera la ligne de conduite du Gouvernement.

S’agissant des choix budgétaires, je vais, le 9 juillet prochain, annoncer des investissements, dont vous verrez qu’ils sont ambitieux, qu’ils concernent le domaine des transports préservant l’environnement, l’efficacité énergétique, l’innovation et la recherche, ou encore l’organisation d’une filière industrielle de l’écologie.

Oui, madame la présidente, je le répète ici : les engagements du Président de la République seront tenus, malgré les contraintes budgétaires, qui s’imposent à toutes et à tous. Chaque budget fait des efforts, et je vous demande de juger sur pièces nos priorités. Qu’avons-nous déjà décidé l’an dernier et cette année ?

Nous avons agi en faveur de l’efficacité énergétique dans le logement et, dès la rentrée, une nouvelle loi relative à l’urbanisme et au logement visera à limiter l’usage du foncier en concentrant davantage les constructions, pour éviter l’étalement urbain et préserver les terres agricoles. Parallèlement, une loi d’orientation agricole ira exactement dans le même sens, privilégiant les alternatives à une agriculture ultra-productiviste.

C’est un nouveau modèle, conforme aux engagements du Président de la République et aux convictions que je défends depuis des années. Je vous demande de me juger sur les actes et non sur les paroles !

Je compte sur vous et sur le concours de toute la majorité !

Jean-Marc AYRAULT

 

 

 

 

 

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