Création d’un Pacte mondial finance-climat pour donner un cadre juridique à l’accord de Paris

« S’il aboutit, le Pacte mondial pour l’environnement constituera le premier traité mondial sur l’environnement« , résume Laurent Fabius, cheville ouvrière du projet. Après avoir porté l’Accord de Paris en 2015 lors de la COP21, il va un cran plus loin en défendant cette fois un texte qui serait juridiquement contraignant et pourrait dès lors être invoqué devant les tribunaux.

Rédigé par 80 juristes de 40 pays, l’avant-projet de texte doit faire l’objet d’une résolution procédurale de l’ONU « dans les prochains jours », assure l’ancien Premier ministre. Une fois cette résolution adoptée, un groupe de travail intergouvernemental sera constitué pour entrer dans le dur du sujet. « Si le texte me paraît réaliste, les négociations avec les différents États vont être tendues sur plusieurs points », prévient-il.

Le Pacte avait officiellement été lancé à Paris en juin dernier en présence de Ban Ki-Moon, Jean Jouzel, Nicolas Hulot ou encore Arnold Schwarzenegger. Trois mois plus tard, Emmanuel Macron l’a vivement soutenu lors de l’Assemblée générale des Nations unies. Puis le ministre de la Transition écologique et solidaire a plaidé pour la mise en place de ce « cadenas juridique à l’Accord de Paris » à l’occasion de la 3e Assemblée de l’ONU pour l’environnement.

Que contient le texte ?

La version actuelle du texte, d’une dizaine de pages, comprend 26 articles. Les deux premiers reconnaissent les droits de l’Homme à un environnement sain, et les devoirs de protéger celui-ci. Puis un certain nombre de principes généraux, tels que les principes de prévention, de précaution, de pollueur-payeur ou encore de réparation des dommages causés à l’environnement, sont repris.

« Il s’agit essentiellement d’un travail de codification afin de regrouper dans un seul texte ‘parapluie’ les principes généraux du droit de l’environnement, tels qu’ils ont été notamment énoncés dans la Déclaration de Stockholm en 1972 ou dans la Déclaration de Rio en 1992. Ces textes ont une grande valeur symbolique et politique, mais en tant qu’avocat, je ne peux pas les invoquer devant un juge », explique Yann Aguila, président de la Commission environnement du Club des Juristes, et co-auteur du Pacte.

D’autres principes plus innovants ont également été intégrés comme celui de non-régression des normes législatives et réglementaires qui va plus loin, par exemple, que ce qui existe actuellement en France. Un article consacre également le rôle des acteurs non-étatiques, tels que les entreprises, la société civile, les villes et les régions, dans la protection de l’environnement. « C’est la première fois qu’ils sont mentionnés dans un texte de droit international », soulève Yann Aguila.

Qu’est-ce que ça va changer ?

« Pour les entreprises par exemple, le Pacte va constituer un véritable avantage car il va leur apporter plus de sécurité juridique ainsi qu’un cadre clair et harmonisé au niveau mondial », résume Yann Aguila. « Et pour les citoyens, très concrètement, ils pourront faire valoir leur droit à un environnement sain devant les tribunaux, poursuit l’avocat. Pour d’autres principes comme celui de la participation du public, il faudra attendre une loi de transposition. »

Le projet est officiellement soutenu par une soixantaine de pays tels que l’Inde, le Bangladesh, les Fidji, le Maroc et de nombreux États africains ou sud-américains. Sans surprise, la Russie et les États-Unis y sont opposés. La Chine est encore indécise. « Ce Pacte est une vieille idée. Il y a eu beaucoup d’ébauches, beaucoup d’échecs. Mais jamais nous n’avons été aussi proches d’aboutir. La fenêtre d’opportunité est exceptionnelle et cela va permettre de relancer une dynamique au niveau international », espère Yann Aguila.

Pour Laurent Fabius, ce pacte, s’il est adopté, « s’inscrira dans la lignée des pactes fondamentaux adoptés par l’ONU dans les années 60 » sur les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Le traité définitif pourrait aboutir au mieux en 2020. Ce serait de nouveau une bien victoire pour celui qui, de son aveu propre, a découvert le sujet de l’environnement à l’occasion de la COP21. Et une réelle avancée pour la planète.

Pour aller plus loin : climat-2020.eu

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