Semaine des ecolodéputés : Lutte contre le gaspillage alimentaire
Retrouvez chaque semaine l’actualité des députés écologistes à l’Assemblée nationale : Projets et propositions de loi, questions au gouvernement, initiatives, communiqués de presse.
Et une des interventions en fonction de l’actualité est sélectionnée sur le site du député du Doubs.
Semaine du 2 au 6 février 2015 :
https://storify.com/ECOLODEP/ecolodepstory-du-2-au-6-fevrier
Des transports adaptés au besoin du quotidien, une solidarité européenne indispensable avec la Grèce, la défense des associations qui mettent en exergue les failles de sécurité des centrales nucléaires, la lutte contre le gaspillage alimentaire, la citoyenneté en actes… c’est l’actu des écolodep.
Lutter contre les gaspillages alimentaires dans les circuits de distribution
Lutter contre les gaspillages alimentaires dans les circuits de distribution, et assurer la mise à disposition des invendus aux associations caritatives : la proposition fait l’objet d’un large consensus politique, même si la proposition de loi UMP débattue cette semaine demande à être replacée dans une démarche plus complète et plus efficace, estime Barbara Pompili :
Lutte contre le gaspillage alimentaire par Pompili
Madame la Présidente, Monsieur le Président de la commission des affaires économiques, Monsieur le rapporteur, Monsieur le Ministre, Chers collègues,
Nous discutons aujourd’hui une proposition de loi sur un sujet qui, je crois met tout le monde d’accord : la lutte contre le gaspillage alimentaire.
Cela fait plusieurs années – plusieurs dizaines d’années – que les écologistes travaillent sur les territoires à la réduction des déchets, avec la sobriété comme ligne de conduite.
En septembre dernier, à l’occasion de la journée nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire, alors que ma collègue écologiste Brigitte Allain annonçait travailler sur une proposition de loi sur le sujet « de la fourche à la fourchette », le Premier Ministre missionnait un député socialiste, ancien ministre de l’agroalimentaire sur le sujet, Guillaume Garot que je salue. Et aujourd’hui le groupe UMP – emmené par Jean Pierre Decool –inscrit à l’ordre du jour dans sa niche cette nouvelle proposition.
Le gaspillage alimentaire, sans reprendre les chiffres précédemment cités, constitue un vrai fléau, en France comme dans partout dans le monde. Dans les pays en voie de développement, c’est d’autant plus criant que de nombreuses personnes meurent de faim. Nous épuisons nos ressources naturelles par nos surproductions. Nos circuits de consommation sont seulement guidés par les marchés. Notre population s’accroît et le coût économique, écologique et social du traitement de nos déchets et de leurs pollutions devient plus élevé que celui de nos productions. Cela n’est plus tenable.
La prise de conscience générale de tous les élus est donc un très bonne chose tout comme le fait que se dessine sur cet enjeu une politique publique nationale et européenne forte.
Car à ce jour, force est de constater que les plans successifs nationaux ou européens, n’ont pas été à la hauteur de l’enjeu ni des objectif fixés : ils ont été bien trop axés sur la communication. Or, sur ce sujet – comme sur tous ceux qui touchent de façon universelle à nos droits de base et à nos responsabilités d’êtres humains – il est indispensable de prendre des mesures concrètes, urgentes et efficaces.
D’où la nécessité d’un volontarisme clair et déterminé, associant l’ensemble des acteurs. Tous les citoyens – des plus jeunes aux plus âgés – peuvent agir concrètement, et il en va de même pour les chef-fe-s d’entreprises ou les élu-e-s.
C’est grâce à de vastes projets territoriaux alimentaires et d’économie circulaire, associant l’ensemble des parties prenantes, que la réduction de nos déchets deviendra réalité. Et il ne s’agit pas seulement de mieux les gérer. Il faut inventer des systèmes moins générateurs de déchets.
La proposition de loi de M. Decool – présentée en commission et étoffée par rapport au texte initial – a été saluée.
Elle comportait la mise en place de programmes de sensibilisation dans les écoles, le don des invendus par les supermarchés aux associations caritatives via une convention, ainsi qu’un rapport sur la suppression de la « fameuse » DLUO – date limite d’utilisation optimale –… incomprise par les consommateurs. Autant de pistes qui ont montré leur efficacité dans d’autres pays européens ou sont préconisés par les experts.
C’est sur la base des déclarations du président de la commission des affaires économiques et de Guillaume Garot – proposant un travail commun et concerté dans les prochains mois – que nous avons décidé d’attendre la sortie de son rapport pour faire des propositions législatives complètes, portées dans une proposition de loi rassemblant les signatures conjointes des différents groupes de cette assemblée . C’est également sur les bases de cette confiance renouvelée, que nous soutiendrons le renvoi en commission ce jour.
Dans ces réflexions, plusieurs aspects cruciaux et peu documentés du gaspillage alimentaire devront être traités : celui de la production ou plutôt de la surproduction des aliments et celui de la valorisation déchets.
Concernant la production. Nous produisons beaucoup, parfois trop, et parfois pas assez bien. De nombreux aliments restent dans les champs, sont vendus par lots trop importants aux supermarchés, ou sont sortis des rayons qui débordent de choix.
Nous baignons dans l’opulence alimentaire. La France met à disposition des Françaises et des Français bien plus qu’ils ne consomment : les commerces alimentaires regorgent de quantités de nourriture dont sa population a véritablement besoin !
Les deux étapes de la chaine agroalimentaire qui représentent le plus de pertes sont la production (93kg/hab/an) et la consommation (93kg/hab/an). Alors que les transports (26kg/hab/an), la transformation (31kg/hab/an) et la distribution (17kg/hab/an) produisent moins de déchets.
Le constat est fait, mais peu de solutions sont apportées sur la question de la production alimentaire. Les forces économiques en présence ainsi que la prégnance du droit européen expliquent probablement ce manque de mesures…
Nous pourrions alors faire une gestion plus raisonnable de la production : en définissant nos besoins alimentaires et capacités de commercialisation dans le respect de la souveraineté alimentaire, en évitant la destruction de denrées alimentaires pour cause de surproduction, en récupérant tous les produits non récoltés, en contrôlant d’avantage le ratio entre les produits mis en rayon et jetés… Autant de pistes que nous aurons à creuser.
Et c’est bien toute la chaine qu’il faut étudier. Les pertes et gaspillages ne sont pas liés à un comportement irresponsable des acteurs mais à un changement profond de notre système de production alimentaire et de notre modèle d’alimentation.
La situation actuelle résulte de 40 ans de productivisme et de consumérisme. Les filières sont « standardisées » et rejettent les produits non conformes aux attentes supposées des consommateurs (standard esthétiques ou calibrage). C’est frappant dans le secteur des pommes de terres et plus largement des fruits et légumes, où 20 à 30% de la récolte peut être exclue du système.
En outre, la faible valeur des produits agricoles, entretenue par les subventions de la politique agricole commune, entraine des effet pervers : une faible considération des aliments par les consommateurs qui hésitent moins à jeter, et parfois l’abandon pur et simple des fruits et légumes dans les champs, car la main d’œuvre est plus chère que le produit lui même !
Ainsi seules des mesures structurelles, traitant les causes permettront de guérir les effets désastreux du gaspillage alimentaire.
Une meilleure rémunération des producteurs pour le fruit de leur travail.
Une véritable politique alimentaire sociale, ciblant l’accessibilité des produits aux personnes dans le besoin. Il est, à cet égard, probablement nécessaire de se pencher au niveau européenne, sur le fond européen d’aide aux plus démunis.
Par ailleurs, nous sommes persuadés que l’ancrage territorial – local de la production et l’utilisation de fruits et légumes de saison permet de réduire le gaspillage alimentaire en faisant entrer à travers le lien de proximité et social, une responsabilisation des acteurs de la chaine. Nous confirmerons cela très prochainement lors des auditions de la mission d’information parlementaire sur les circuits courts et la relocalisation des filières agroalimentaires dont ma collègue Brigitte Allain est rapporteure.
Concernant la valorisation enfin. En France, les déchets alimentaires pèsent lourd sur le climat : ils sont encore majoritairement enfouis ou incinérés et sont notamment responsables de 19% des émissions de méthane (principalement lorsqu’ils sont mis en décharge), un gaz avec un pouvoir de réchauffement climatique 23 fois plus élevé que le CO2 !
Ainsi, nous avons des opportunités dès aujourd’hui dans la loi de transition énergétique pour généraliser l’obligation de tri à la source pour les particuliers et les professionnels, et mettre en place une hiérarchie dans la valorisation des produits qui sont destinés à être mis au rebus : d’abord nourrir les humains, puis la transformation les rebus en nourriture pour les animaux, ensuite le compostage ou le juste retour au sols de la matière organique et, enfin, la méthanisation, permettant la production d’énergie.
La dynamique de convergence étant à l’œuvre, nous réussirons, nous en sommes certains, à travailler de concert pour lutter contre le gaspillage alimentaire, et soutenus par le Gouvernement, à faire des propositions législatives, insérées dans une réflexion plus large sur les aspects règlementaires, financiers, européens et internationaux.
Je vous remercie.