Question orale relative à l’ESCEM
Question orale posée par le groupe EELV
Le 22 mai 2012, l’ESCEM, école de commerce de Tours/Poitiers, fusionnait avec les écoles de commerce de Clermont-Ferrand, Brest et Amiens pour devenir « France Business School » (FBS), un nouvel établissement privé qui ambitionnait d’entrer dans le top 5 français des écoles de commerce françaises, afin de former des « managers entrepreneuriaux ». «L’idée serait d’arriver à un ensemble de 100 millions d’euros de budget et de 10 000 étudiants », avançait alors le président du conseil d’administration de l’ESCEM et initiateur du projet.
Trois ans plus tard, le constat est plus qu’amer. « France Business School » a implosé. L’ESCEM retrouvée a perdu 90 % de ses effectifs. Elle pourrait licencier a minima 60 % de son personnel (130 postes) et plusieurs millions d’euros seraient nécessaires pour la remettre à flot, sans aucune garantie de pérennité, l’école n’ayant pas obtenu du Ministère le label de master. Ce qui a fait dire à Bruno BELIN, président UMP du Conseil départemental de la Vienne le 5 juin dernier que « ce dossier est proche du naufrage » et que « nous sommes face à une institution en grande difficulté, avec aujourd'hui pas de prévisionnel, pas de budget et de financements visibles, et surtout zéro étudiant inscrit pour la prochaine rentrée. A un moment donné, les collectivités comme nous qui sommes partenaires (engagement à hauteur de 25 %), nous devons nous poser la question concernant l'avenir, le portage, l'endossement de ce dossier ».
Pourtant, cet « accident industriel », comme l’appelle la presse, ne sort pas de nulle part. En juin 2014, la CFDT-CCI évoquait déjà dans une lettre ouverte le risque d’un « cataclysme historique » et quelques jours plus tard le directeur de FBS depuis son lancement était débarqué. La direction a toujours nié les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre du projet, parlant « d’entreprise de déstabilisation », alors même que de lourds questionnements ont été posés régulièrement depuis la création, tant sur la réussite du modèle que sur sa gestion. Le bilan déjà très contrasté du directeur de FBS lorsqu'il était à la tête de l’école de management de Lyon (pour laquelle il justifiait un traitement annuel de 263 935 € en 2008, selon la Chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes) n'aurait-il pas dû, à l’époque, alerter les administrateurs de FBS ? On aurait pu également attendre de ces spécialistes du management une plus grande vigilance quant à l'utilisation des fonds publics.
On peut aussi s'interroger sur ce que ce dossier révèle de l’échec d’un système : la fuite en avant dévastatrice induite par l’obsession du classement de Shanghai, une logique de compétition mondiale totale entre établissements, de classement permanent, de course au gigantisme par fusion/acquisition, où au final tout le monde est perdant, en premier lieu nos territoires.
Face à cette faillite, on va maintenant se retourner une nouvelle fois vers les collectivités locales pour financer un redémarrage. D'autres collectivités concernées ont fait part de leurs réticences ou au moins de la nécessité de faire toute la lumière sur ce dossier. C'est ainsi par exemple que la ville de Poitiers a demandé au préfet, en octobre dernier, de saisir la Chambre régionale des comptes de Poitou-Charentes pour réaliser un audit.
Aussi, avant toute décision d'engager de nouveau des financements publics, le groupe EELV demande qu’une analyse des causes et des responsabilités de ce cuisant échec économique ainsi que le bilan des sommes engagées et de leur utilisation soient présentés à notre assemblée.