Présentation de « Venez au lycée » : le lycée, une opportunité pour le territoire. Le territoire, une ressource pour le lycée.
Intervention de Charles Fournier.
Monsieur le Président, chers collègues,
Avant d’exprimer un avis sur cette communication, je voudrais évoquer le contexte dans lequel elle se construit, celui d’une éducation nationale mise à mal, celui des coups portés aux fondements d’une éducation de qualité pour tous.
Les réactions quasi unanimes aux projets de cartes scolaire du premier et du second degré soumises aux CDEN dans les départements, indiquent la profondeur du malaise des professionnels de l’éducation mais aussi des élus locaux.
Et il ne s’agit pas là seulement de la question des moyens, bien qu’elle soit centrale, c’est aussi une question de conception de l’éducation, de considération à l’égard des métiers qui en assurent la mise en oeuvre. Sans cesse plus d’élèves dans les classes, la remise en cause des RASED, les ajustements au fil de l’eau des moyens d’enseignement, les réformes de diplômes conçues à la hâte, la mise en concurrence des établissements, le manque de formation proposée aux enseignants et la liste pourrait s’allonger, autant de décisions inappropriés qui ne font qu’aggraver la situation.
Il est donc urgent de rétablir les conditions d’un enseignement de qualité . Il en va de l’avenir de nos enfants mais aussi de la dignité du personnel éducatif.
Nous pouvons comprendre , dans ce contexte que toute mesure nouvelle qui arrive puisse susciter interrogation voir méfiance pour certains, envie pour d’autres.
La région souhaite d’autant plus maintenir son implication dans les lycées en utilisant tous les leviers qui sont les siens et en proposant des innovations au bénéfice des élèves et de l’ensemble de la communauté éducative.
A ce stade, nous est présentée une communication qui vise à ouvrir le débat sur la démarche et qui acte le lancement d’expérimentations et de la concertation voulue la plus large possible. Il n’y a là aucun vice caché, juste des hypothèses de travail qui me semblent tout à fait opportunes pour rendre compte des coopérations d’ores et déjà existantes entre les lycées et leurs territoires d’implantation mais aussi pour leur donner un cadre de progression et d’amplification.
Le choix de recourir à l’expérimentation me paraît d’autant plus pertinent en constatant les réactions parfois positives mais aussi parfois teintées d’inquiétude, voir de méfiance. Ce sera l’occasion pour tout un chacun de contribuer à la définition du contrat qui pourrait lié un lycée et son territoire de vie autour d’objectifs de progrès réciproques et au service de l’amélioration du service public d’enseignement et de l’attractivité et du développement du territoire.
Si le titre de la communication invite à penser le lycée ouvert, le contenu dit bel et bien qu’il s’agit aussi de considérer le territoire ouvert au lycée, aux lycéens et à l’action éducative. Je pense opportun d’envisager de faire évoluer le titre pour mieux rendre compte des ambitions de cette mesure et rassurer celles et ceux qui y verraient une volonté de pénétrer dans les lycées contre la volonté de ceux qui en ont la responsabilité quotidienne !
Au-delà des dispositifs existants, nombreux et de qualité mais plutôt cumulatifs, c’est l’idée d’un projet partagé, cohérent et inscrit dans le temps qui s’ouvre par la voie de cette mesure.
Celles et ceux qui participent à la vie des lycées, aux conseils d’administration, entendent tout comme moi, les besoins qui s’expriment et qui pour partie peuvent trouver réponse dans un échange approfondi et coordonné avec les acteurs du territoire :
- les besoins d’accès aux équipements du territoire,
- la prise en compte des lycéens dans la vie hors du lycée et en particulier les internes, comme par exemple la prise en compte des projets de ces jeunes, leur accompagnement,
- des soutiens à la mise en oeuvre des projets éducatifs portés par les enseignants,
- la reconnaissance de l’action culturelle et sportive des lycées,
- les enjeux de sécurité à l’abord des établissements,
- la gestion des déplacements des lycéens et personnels des lycées
- l’approvisionnement des restaurants scolaires...
- etc...
Ils peuvent aussi entendre les attentes des communes, villes ou agglomération, quant à la prise en compte de leurs propres enjeux :
- le maintien et le développement de filières qui irriguent aussi le territoire, le soutien à l’attractivité du territoire,
- le recours aux savoir-faire d’un lycée, comme par exemple ceux du lycée hôtelier de Blois qui très régulièrement est mis à contribution dans les manifestations locales,
- soutenir l’activité des acteurs qui font ce territoire : agriculteur, entreprises de la construction, associations d’éducation populaire associations sportives et culturelles,
- la place des jeunes dans la vie locale,
- la gestion des espaces publics à proximité des établissements scolaires,
- l’offre de mobilité dans le territoire,
Voici quelques exemples qui montrent combien les coopérations peuvent être nombreuses et diversifiées. Je vois dans cette mesure l’opportunité de donner un cadre pérenne à ces échanges, de les soutenir et de gagner en lisibilité, cohérence et coordination.
Les collectivités se sont vues doter de responsabilités croissantes en matière d’éducation, et de soutien aux établissements scolaires. La région est certes en charge des lycées mais elle n’est ni le seul acteur ni le seul interlocuteur des lycées. Sa responsabilité au côté de celle de l’Éducation Nationale lui permet cependant d’être à l’impulsion des dynamiques voulues au travers de cette mesure.
Notre débat ce jour mais aussi l’ensemble des concertations qui sont engagées : rectorat, proviseurs, enseignants, personnels des lycées, parents d’élèves, et lycéens, enrichiront sans aucun doute, ce projet tout comme les trois expérimentations à venir.
Quelques petites remarques sur la méthode et en écho à l’avis du CESER.
Oui bien entendu ces coopérations devront être à géométries variables tenant compte de la diversité des situations, de la volonté des acteurs et c’est sans doute cela qui est recherché en voulant non pas construire un dispositif clé en main mais en voulant insuffler, renforcer des dynamiques locales. Les réponses apportées par la Vice-Présidente me semblent répondre à cette donnée, le choix des trois territoires se faisant en considérant cette diversité.
Sur un même territoire, il existe parfois plusieurs établissements. La démarche pourra aussi encourager les dynamiques de projets entre les établissements d’un même territoire, entre chaque établissement et le territoire. Nous pouvons ainsi penser par exemple que la question de l’offre d’activités pour les internes le mercredi puisse constituer une problématique commune entre les établissements et que des réponses communes pourraient se construire en lien avec les acteurs du territoire : un opérateur culturel, un service jeunesse d’une collectivité, un club sportifs, etc...
A travers cet exemple je voudrais répondre aussi à une des interrogations du CESER quant au territoire du lycéen, en particulier quand celui-ci a un recrutement régional voir au-delà. Il me semble que nous pouvons tomber d’accord sur l’idée que le territoire est d’abord est celui que l’on vit et que l’on pratique. Il est certes parfois possible de pratiquer et vivre deux territoires, selon que son activité de formation ou professionnelle et son lieu de résidence sont dissociés ou pas. L’importance du temps scolaire, de la vie scolaire pour les lycées, les conduit aussi à vivre le territoire à y rechercher d’autres réponses à leurs besoins, à leurs projets. Cette mesure est aussi la possibilité de considérer une place pour cette jeunesse dans la vie locale.
Pour finir, je voudrais dire quelques mots sur l’idée d’économie que précise la communication et qui a également fait débat au sein du CESER.
Je crois qu’il ne faut jouer à se faire peur. Oui les temps sont durs et invitent la région comme toutes les collectivités à faire bon usage des deniers publics. Oui il convient de penser des projets générateurs d’économies. Non il ne s’agit pas de faire moins, de dépenser moins mais de dépenser mieux. Cette exigence s’applique à toutes nos politiques. Et là aussi il est possible de générer de l’économie, au sens d’une production induite de biens et de services, au bénéfice du territoire ou du lycée.
Les écologistes vous l’avez compris soutiennent pleinement l’orientation qui est proposée par la Vice-Présidente, je ne reviendrais pas sur mon propos introductif sur la situation de notre service public d’éducation mais nous avons bien en tête que ce contexte invite encore plus que d’ordinaire à l’écoute et à une concertation réussie avec toutes et tous.
Ce projet n’a pas été pensé en voulant tout réinventer, il s’appuie sur ce qui existe, il cherche à améliorer les rouages, à donner de la cohérence, il assemble ce qui est parfois séparé, il ouvre à des modalités de gouvernance différents, en ce sens il correspond pleinement à ce que nous défendons au travers de l’écologie politique, penser globalement les enjeux et agir localement, faire des choix au service du progrès humain dans un monde aux ressources contraintes.