Budget prévisionnel 2011: intervention principale
Intervention de Jean Delavergne.
Les temps sont difficiles, le climat se dérègle, la biodiversité fout le camp, le climat économique et social est lui aussi de plus en plus perturbé, et du point de vue politique on a le sentiment que les temps sont vraiment troubles …,
C’est dans ce contexte que nous avons du élaborer ce premier budget de la nouvelle mandature.
Ce budget est d’abord victime de l’empilement des mauvais coups portées aux collectivités locales et en particulier aux Régions par les gouvernements de droite. Je ne vais pas reprendre une fois le plus le détail des mesures qui année après année aboutissent à rogner les recettes de la Région Centre : depuis la non compensation des charges liée aux transferts de compétence, jusqu’à la baisse réelle des dotations de l’Etat, en passant par la suppression de recettes « dynamiques » comme l’était par exemple la TP… Au total c’est d’environ 50 M€ de recettes dont les gouvernements Sarkozy ont privé la région Centre, (20 M€ si on tient compte de la TIPP-Grenelle).
La droite au pouvoir poursuit deux objectifs convergents :
- D’une part, de manière très politicienne le pouvoir n’est pas mécontent de priver de ressources des régions qui ont l’outrecuidance d’avoir presque toutes des majorités de gauche et écologiste…
- D’autre part de façon cynique… il cherche à faire prendre en charge par les régions une part du fardeau de la dette qu’il n’a cessé de développer par ses propres politiques fiscales.
Face à la confusion manipulatrice entre les déficits abyssaux de l’Etat et les dettes des collectivités locales, il faut rappeler avec force que l’endettement de l’ensemble des collectivités est sans commune mesure avec celui de l’Etat central, que pour leur part les Régions sont les collectivités les moins endettées et que pour finir la région Centre fait plutôt partie des régions qui ont les meilleures capacités de désendettement.
Surtout, face au corps des pleureuses qui se lamentent sans cesse sur la dette publique, il faut rappeler sans cesse la grande responsabilité de la politique Sarkozyste dans le creusement du déficit de l’Etat : bouclier fiscal pour les plus riches, baisse sans contrepartie de la TVA dans la restauration, cadeaux aux entreprises par la suppression de la TP…
La liste est longue des cadeaux fiscaux et elle en parfaite cohérence avec la croissance des inégalités que ressentent les Français et que confirment de plus en plus d’études économiques: explosion des dividendes, des plus values, des stock-options, des bonus, des rémunérations des dirigeants des grandes sociétés… alors que pour 90% de la population le pouvoir d’achat stagne quand il ne diminue pas.
Il devient de plus en plus difficile de masquer le développement des privilèges d’une minorité alors que de plus en plus de salariés et d’indépendants voient leur situation, ou celle de leurs enfants, se précariser.
A la suite de la crise de 2008-2009, il devait y avoir une « moralisation du capitalisme » mais rien n’a changé ou seulement à la marge !
Pour les écologistes cette croissance des injustices est dramatique :
C’est dramatique d’abord pour les millions de personnes dont la qualité de vie est fortement détériorée.
Mais c’est aussi dramatique car cela rend encore plus difficile l’indispensable transformation écologique de notre société.
On ne pourra pas négocier cette transition dans un tel climat d’injustices sociales : pour que tous puissent s’impliquer il faut que les efforts demandés à chacun soient équitables !
Dans un tel contexte, la gauche, stimulée par les écologistes, doit offrir cette alternative aux citoyens : une capacité à gérer de façon équitable et responsable le présent orientée par une véritable compréhension des enjeux de l’avenir. Nous devons promouvoir, aujourd’hui dans les régions et demain au niveau national, un nouveau mode de développement nettement plus respectueux des hommes et de la nature.
C’est cette double exigence de gérer le présent en préparant l’avenir que nous avons cherché à réaliser en préparant ce budget 2011 en région Centre.
Nous avons cherché à trouver un équilibre entre les exigences de la gestion et celles de l’ambition portée devant les électeurs il y a moins d’un an.
C’est donc, les observateurs l’ont noté, un budget fortement teinté de Vert. Je n’ai pas dit que c’était un budget Vert : il est certain que si Europe-Ecologie avait été majoritaire dans la majorité, le budget n’aurait pas été le même mais il est tout aussi certain que si nous n’avions pas conquis la place que nous occupons aujourd’hui dans cette même majorité le budget n’aurait pas eu non plus la même palette de couleurs.
Cette marque Ecologiste se constate d’abord bien évidemment dans la progression du budget en faveur de l’environnement avec en particulier le développement très significatif des actions en faveur de la biodiversité et de l’éducation à l’environnement ou encore l’engagement dans une politique active de l’eau qui va trouver son plein développement dans les 3 prochaines années.
De même la forte ambition affichée dans l’élaboration du plan énergie-climat est un signe salutaire adressé par la région Centre au moment où règne au niveau national et international un certain scepticisme sur la capacité de l’humanité à faire face et à limiter réellement le réchauffement planétaire à moins de 2°.
Cette réflexion engagée sur les questions énergétiques – qui donne lieu a des ateliers particulièrement passionnants dans chaque forum local du SRADDT - ne nous conduit cependant pas à repousser à plus tard la décision d’agir sur notre propre patrimoine : nous savons que la priorité pour nous, c’est celle des économies d’énergie et du développement d’énergies renouvelables dans nos lycées et nous y investissons massivement. Nous avons mis dans notre programme de mandature 15M d’€ par an d’investissements dans l’efficacité énergétique réalisés en régie et nous ferons tout pour rendre effectivement ces investissements les plus efficaces possibles, en visant systématiquement la basse consommation. Il faut y ajouter pour cette année et l’année prochaine les investissements réalisés dans 18 lycées dans le cadre du CPE : nous n’avons pas approuvé la méthode (le PPP) et nous l’avons je crois suffisamment expliqué en juin dernier, mais objectivement cela représente tout de même pour 2011 encore 17 M € de plus d’investissements pour l’efficacité énergétique dans les lycées de la région. Ces investissements préparent doublement l’avenir : ils permettent d’apporter notre contribution à l’indispensable effort de réduction des GES mais ils anticipent aussi les hausses de coût de l’énergie qui risqueraient de se révéler insupportables pour les lycées dans la décennie à venir.
Ces questions d’environnement sont tout à fait décisives pour l’avenir régional mais pour nous cependant l’écologie ne se réduit pas à l’environnement.
Face à la crise économique et sociale nous sommes très attentifs aux synergies possibles entre écologie et économie et donc emploi.
Si la transition écologique de l’économie peut nécessiter de fortes adaptations aux modes de production, nous sommes aussi persuadés que l’écologie est une chance pour l’emploi, que l’économie verte, l’éco-construction, les énergies renouvelables, les éco-matériaux, l’isolation des bâtiments, l’agriculture biologique… offrent de grandes possibilités de création d’emplois. C’est d’abord là que résident les possibilités de création des « emplois non délocalisables » que nous avons mis dans notre programme. Nous nous réjouissons donc de voir les premières concrétisations du fond d’investissement dans l’économie verte présenté lors de dernière session.
Nous pensons cependant que c’est l’ensemble des dispositifs de soutien à l’économie, de formation professionnelle, de recherche et d’innovation qui mériteraient d’être revus de façon approfondie à la lumière de cette exigence de transformation écologique et sociale de l’économie.
Dans le domaine agricole nous voyons aussi avec satisfaction progresser les conversions vers l’agriculture biologique dans notre région même si nous sommes encore très loin de répondre à la demande par des productions locales. Et de ce point de vue, si nous sommes heureux de voir un début de concrétisation sur la question de la maîtrise foncière, pour aider à l’installation de formes d’agriculture durables, en particulier bio, principalement dans la périphérie des agglomérations, nous ne pouvons que regretter cependant que cette orientation qui était déjà inscrite à hauteur de 2M€ dans une AP du BP 2010 ne trouve qu’un timide début de réalisation dans ce BP 2011.
L’écologie c’est donc l’emploi mais c’est aussi et peut-être d’abord la santé. La liste Europe-Ecologie avait souhaité lors du premier tour des élections régionales que soit mise en oeuvre une politique de prévention-santé régionale et nous en voyons des éléments de réalisation dans ce budget à travers les mises en œuvre des maisons de santé mais aussi l’introduction d’une forte politique de prévention-santé pour les lycéens sur laquelle Saadika Harchi interviendra dans ce débat.
De la même façon Michelle Rivet présentera cette après-midi la politique d’appels à initiatives de développement rural « ID en campagne » pour laquelle nous nous sommes battus depuis plus d’une année et qui devrait permettre d’initier ou de soutenir de nouvelles dynamiques « citoyennes » dans des zones rurales.
Dans le domaine des transports, et même si nous aurions préféré les voir carrément disparaître - nous sommes tout de même satisfaits de voir décliner année après année, les budgets consacrés aux routes. Cela nous permet de disposer ainsi de plus de possibilités pour avancer sur cette belle compétence qui est celle des TER. Le groupe Europe-Ecologie se félicite d’avoir rendu possible lors de la précédente session un fort développement des investissements sur le rail, en nous saisissant de la seule possibilité de financement offerte par le dispositif TIPP-Grenelle. Nous souhaitons par contre protester avec force contre la politique nationale d’affaiblissement du service public du chemin de fer qui se traduit d’une part par des difficultés croissantes à assurer la qualité de service et d’autre part par la tendance à exiger toujours plus de financement de la part des régions. En tant qu’élu de l’Indre je ne peux m’empêcher de trouver insupportable lemode de traitement qui revient à la ligne d’intérêt national Brive-Lilles : on demande aux régions Centre et Limousin de plus gros financements pour un service moindre. Pendant que l’on fait plus ou moins rêver les gens du sud de la région sur de très hypothétiques futures lignes TGV, la réalité qu’ils vivent aujourd’hui dans toute la région, c’est une certaine dégradation du service public et ce malgré les efforts de plus en plus importants que la région, elle, consacre à ce secteur.
Au total, nous pouvons affirmer que figurent dans ce budget l’essentiel des engagements qui avaient été pris dans « l’accord de gouvernement » que nous avions passé avec nos partenaires de gauche entre les deux tours des régionales.
Est-ce que pour autant nous serions totalement satisfaits ?
Je le répète ce budget n’est pas 100% Vert : c’est évidemment un compromis qui reflète les rapports de forces que les électeurs ont choisi de donner aux différentes composantes de la majorité.
Vous ne serez pas étonnés que nous tenions à rappeler d’abord que, pour nous, certaines dépenses ne sont pas du tout prioritaires, voir sont en parfaite contradiction avec l’orientation vers une « Eco-Région » : je veux parler des soutiens apportés aux lignes low-cost sur l’aéroport de Tours ou au fret d’armement ou de produits frais sur l’aéroport de Châteauroux : on est là très loin du développement durable et de la lutte contre les émissions de GES. Il faut aussi rappeler notre opposition déterminée aux projets dévoreurs d’espaces agricoles ou naturels comme les zones économiques du Breuil dans le 41 ou d’Ozans dans le 36 ou encore le projet pharaonique de l’ARENA.
Par ailleurs en ce qui concerne les recettes nous aurions souhaité pour notre part un peu plus d’audace : pour faire face aux crises économiques, sociales et écologiques l’amélioration de notre capacité de désendettement ne nous semblait pas être une priorité ; nous croyons possible au contraire, compte tenu des taux d’intérêt historiquement très faibles, de profiter d’un peu plus d’endettement pour conduire des politiques moins restrictives dans certains secteurs et contribuer aussi à soutenir mieux l’économie régionale. Qu’on nous comprenne bien : nous ne sommes absolument pas des adeptes du toujours plus en matière d’endettement mais tous ceux qui veulent bien regarder objectivement la situation financière de la région peuvent dire qu’elle est extrêmement saine et que nous ne prendrions guère de risque à augmenter de 6 ou 7 M € l’emprunt.
En se dotant de telles marges de manœuvre nous aurions sans doute pu desserrer un peu les contraintes qui vont peser par exemple sur le budget des lycées, ou encore pour prendre un autre exemple, ne pas procéder aux restrictions –avec lesquelles nous ne sommes pas d’accord- qui impactent le budget de la coopération décentralisée.
Ce ne sont pas les choix qui ont été faits et nous le regrettons mais cela ne met nullement en cause l’appréciation que nous portons sur ce premier budget de notre nouvelle mandature :
Ce budget reste un assez bon compromis entre la prise en compte des contraintes financières et les ambitions sur lesquelles nous nous sommes engagées vis-à-vis des électeurs
Il demeure au fond un assez bon compromis entre les orientations de la gauche traditionnelle et celles que nous portons en tant qu’écologistes.
C’est pourquoi quelques puissent en être les limites ou les insuffisances nous sommes tout de même plutôt fiers d’avoir fortement contribué à cette avancée vers une Eco-Région.