Préjudice écologique : le reconnaitre c’est bien, l’éviter serait mieux !
Le 25 septembre 2012, la Cour de cassation a retenu l’existence du préjudice écologique. Une avancée colossale saluée unanimement. Sophie BRINGUY, vice-présidente à l’environnement du Conseil régional des Pays de la Loire, et Christophe DOUGÉ, conseiller régional délégué à la Loire et en charge des politiques de l’eau, s’interrogent cependant sur la cohérence globale de cet engouement.
Beaucoup ont crié à la victoire. Et c’est vrai, une bataille juridique a été gagnée, avec des conséquences bien plus profondes qu’on ne l’imagine. Par cette décision, la Cour de cassation opère un glissement de la nature-objet vers la nature-sujet. Mais ce n’est pas une victoire « totale » pour une simple raison : le dommage a eu lieu. Nos côtes ont été souillées, quelques 37 000 tonnes de fiouls se sont déversées dans l’océan. Depuis, la nature a repris le dessus, mais le traumatisme des hommes et des femmes qui ont assisté, impuissants, à ce terrible spectacle, reste bien présent.
Beaucoup se sont réjouis parce que Total condamné, ce n’est plus l’impunité qui va régner dans nos mers et océans. Et c’est plus ou moins vrai.
– C’est vrai, parce qu’un principe de responsabilité fort encourage la prévention. C’est d’ailleurs le premier enjeu de la reconnaissance du préjudice écologique : savoir que l’on va devoir réparer incite à ne pas détruire.
– C’est moins vrai, parce que le droit de la mer international reste lacunaire et insatisfaisant, et qu’une décision française, qui n’a de portée que sur le territoire national, n’a aucun pouvoir là-dessus.
Peu semblent s’être dit qu’au-delà de la reconnaissance du préjudice écologique, ce qu’il fallait c’était surtout éviter la destruction de la nature, des écosystèmes, de la biodiversité. L’affaire de l’Erika a été érigée en symbole et rassemblé une pluralité d’acteurs autour de la protection de la nature, c’est une bonne chose. Mais n’oublions pas ce qu’il y a derrière ce symbole : dans notre région, 44% des espèces animales et végétales sont en situation précaire voire menacées. Nous allons vers une catastrophe écologique rampante, peu visible, mais qui avance d’un pas certain. Elle n’est pas spectaculaire comme l’Erika, mais le traumatisme n’en sera pas moins grand.
C’est pour cela, et pour éviter ce traumatisme pour les générations à venir, que nous apportons chaque jour notre modeste contribution, aux côtés d’autres acteurs, à la préservation de l’environnement, de la Biodiversité, de l’Eau. C’est pour cela que nous combattons chaque jour des projets inutiles, coûteux et destructeurs comme le projet de nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes ou encore celui d’une nouvelle autoroute dite « A831 » dans le marais Poitevin.
Sophie BRINGUY, vice-présidente à l’environnement du Conseil régional des Pays de la Loire,
Christophe DOUGÉ, conseiller régional délégué à la Loire et en charge des politiques de l’eau.