« Notre-Dame-des-Landes, pourquoi je doute. » par Matthieu Orphelin.
L’un des plus beaux feuilletons de l’été est cette année made in Pays de la Loire : la poursuite ou l’abandon du nouvel aéroport de Notre Dame des Landes. Il possède tous les éléments qui font le succès des télénovelas brésiliennes : un nombre incalculable d’épisodes (depuis 42 ans… rappelons qu’il avait été imaginé pour pouvoir accueillir le Concorde à Nantes), des personnages qui s’aiment et / ou se détestent, des rebondissements inattendus… ».
Alors que ma première action politique d’élu fut, dès le lendemain de l’élection régionale, avec tous mes collègues du groupe Europe Ecologie à la Région, d’adhérer au collectif des élu-e-s qui doutent de l’utilité de cet aéroport, j’ai envie aujourd’hui de rappeler les raison de mon engagement contre ce projet.
Je doute car les méthodes utilisées sont indignes de la transparence qu’il faudrait appliquer si l’on souhaite que les Françaises et Français reprennent confiance en la chose politique. La signature secrète de l’accord de financement autour de Dominique Bussereau le 16 juillet en est un parfait contre-exemple. Je me rappelle d’un illustre préfet avec lequel j’avais travaillé sur les farines animales, un sujet sur lequel l’Etat cachait une partie de la vérité. Il m’avait expliqué les méthodes : « Quand tu as un mauvais coup à faire, fais-le après le 14 juillet, pendant les étapes de montagne du tour de France».
Je doute car la vérité des chiffres est implacable. Ces chiffres montrent que les formules de communication soigneusement utilisées (dont le fameux « simple transfert de l’aéroport actuel Nantes Atlantique ») sont des écrans de fumée. Le nouveau projet permet de viser 9 millions de passagers par an, soit plus qu’un triplement de la capacité actuelle. Comment peut-on mentir en parlant d’un simple transfert ? J’aimerais que les responsables politiques favorables au projet m’expliquent cela. J’attends avec impatience la démonstration.
Je doute car les arguments des partis politiques qui portent le projet me laissent perplexe. J’ai croisé récemment par hasard deux des plus proches collaborateurs de Jean-Louis Borloo. Je leur ai posé la question sans détour : pourquoi le ministre d’Etat ne s’oppose-t-il pas à ce nouvel aéroport ? La réponse fut également très franche : « Parce qu’il s’agit d’un projet très important pour le Premier Ministre » J J’ai aussi souvent discuté de ce projet avec des militants ou des membres des partis de gauche et de droite qui le soutiennent. On m’a souvent fait part de questionnements, d’une mauvaise connaissance de ce dossier.
Je doute car les solutions alternatives n’ont pas été assez explorées. Je pense notamment au changement de sens de la piste de l’aéroport actuel. Si les opposants pensent que l’étude n’a pas été menée sur le scénario qu’ils recommandaient, il faut refaire cette étude. On n’est pas à quelques mois près, 42 ans après…
Je doute car il y a 1 000 autres façons plus intelligentes de dépenser l’argent public en temps de crise.
Tant qu’un avion n’aura pas décollé de NDDL, il faudra continuer le combat. L’autorisation d’exploiter et le choix du concessionnaire ne signent pas la fin de l’aventure comme certains veulent nous le faire croire. Rappelons-nous du circuit de Formule 1 à Flins où le béton avait commencé à couler mais où l’obstination des écologistes et des détracteurs du projet a fini par payer. Rappelons-nous, chez-nous, de Donges-Est…
L’histoire de l’aéroport de NDDL, c’est l’histoire d’un projet né de la foi dans le seul progrès technique mais qui se révèle au cours des années porteur de plus de dégradation écologique que de mieux vivre. La prise de conscience de l’inutilité de ce projet est lente et complexe. De tout temps, il y a eu retard de la conscience sur l’expérience. Edgar Morin , citant Hegel dans une belle métaphore, l’illustre en parlant de « l’oiseau de Minerve [qui] prend toujours son envol au crépuscule ». Que l’oiseau de NDDL prenne son envol avant le premier avion