Conférence Fairtrade Towns : impressions

Laurent MARTINEZ, conseiller régional. Membre de la Commission des Finances, du personnel, des affaires générales, de la communication et de la démocratie.

La quatrième conférence internationale «Fairtrade Towns» s’est déroulée à Bonn du 5 au 7 novembre : deux journées d’une intensité que je ne soupçonnais pas, deux journées d’échanges de pratiques, de mutualisation d’expériences, et de construction de projets communs. Près d’une centaine de représentants de plus de seize nations ont participé à ces rencontres.

 

Aujourd’hui Fairtrade Towns c’est plus de 400 collectivités dans le monde et près d’une trentaine en France, toutes labellisées Territoire de Commerce Equitable (TDCE) qui travaillent et réfléchissent ensemble pour valoriser et soutenir le commerce équitable. http://www.fairtradetowns.org

Il y a tout juste un an, la Région des Pays de la Loire était la première Région Française à s’engager dans le programme TDCE : http://www.commercequitable.org/images/pdf/iledefrance/tdce_campagne.pdf

 

Depuis, trois autres Régions l’ont rejointe ou ont le projet de la rejoindre. Seul élu représentant d’une collectivité territoriale française, j’ai été particulièrement attentif dans les échanges avec mes collègues, ou autres représentants de collectivités et de mouvements citoyens, à recueillir leurs conseils et retours d’expériences.

Contrairement aux collectivités des autres pays, la France se singularise par son approche territoriale du développement des Fair Trade Towns. Quand en Allemagne les acteurs de terrains sont les moteurs des Conseils locaux du commerce équitable, en France l’engagement provient bien des acteurs publics. Quand en Grande Bretagne, les acteurs locaux invitent les élu-es à participer à leur session, en France, les collectivités territoriales sont les pilotes de ces conseils.

Dans ce contexte l’engagement de la Région Pays de la Loire prend tout son sens et s’inscrit dans notre programme politique comme étant l’un des moyens de la conversation écologique de l’économie.

 

NLe commerce équitable n’est pas un modèle économique alternatif. Il ne refuse pas le commerce mondial, ni même la globalisation. Il n’est pas non plus un modèle de marketing sur un nouveau marché, ou bien une niche commerciale pour des gens concernés et encore moins une filière économique. Le commerce équitable est un mode de fonctionnement éthique qui définit des règles comportementales dans les rapports commerciaux. Cela se traduit par une plus grande équité dans le commerce mondial en ayant des conséquences directes sur le développement durable de territoires.

 

Nous parlons ici de rapports entre les hommes, de respect mutuel, voire du sens fondamental donné à l’acte économique. Rien à voir avec l’enrichissement et le consumérisme effréné, le consommateur n’est pas dans l’accumulation de bien pour la couverture d’hypothétiques besoins. Par son acte d’achat, le consommateur est le décideur. Au cours de ces rencontres, un entrepreneur irlandais, avec humour, nous dit que le monde est en train de vivre une révolution au travers du commerce équitable : l’armée révolutionnaire est constituée de consommateurs solidement armés, avec leur porte-monnaie ! Ce combattant économique par son choix devient alors l’acteur essentiel d’un modèle de développement local responsable. Notre rôle en tant que collectivité est de participer à l’information, à la sensibilisation du consommateur et de solliciter toutes les initiatives qui contribueront à un modèle commercial juste et équitable.

 

«C’est bien d’aider l’agriculture familiale du sud, mais que fait-on pour nos propres agriculteurs ??». Régulièrement, quand je défends le commerce équitable, j’entends cet d’argument…Tout d’abord il ne s’agit pas de charité. Cette conception de l’aide au développement a démontré son inefficacité. A mon sens, elle relève d’une logique culturelle directement issue du colonialisme. Quant aux filières locales, je réponds mille fois oui !! Le développement de l’agriculture de proximité est et doit être un axe prioritaire de nos politiques. A ce jour il existe des labels valorisant des modes de productions, mais ils ne garantissent pas obligatoirement un rapport équitable entre le producteur et l’acheteur. Le label « bio » en est la preuve flagrante : dans la guerre que se livre la grande distribution autour du « bio », l’agriculteur risque bien d’être oublié au profit des marges des distributeurs. C’est un schéma que nous connaissons malheureusement trop bien… Il est devient indispensable de développer les pratiques équitables dans tous les rapports économiques, du Nord-Sud, mais aussi Nord-Nord. La labellisation « Territoire de commerce équitable » comporte cinq critères. La Belgique en a ajouté un sixième sur le commerce de proximité. Il faut noter aussi que la labellisation de démarches équitables n’est pas l’unique moyen d’introduire de l’équité dans les échanges, les AMAP en sont le meilleur exemple.

 

Il s’agit d’un comportement global responsable. Le café, le thé, le cacao, le coton, etc. sont des matières premières non produites dans nos régions. Le café, est la seconde matière première produite dans le monde après …le pétrole ! Ces matières premières sont l’objet de spéculations financières. Introduire des rapports équitables dans les échanges mondiaux, c’est donner du pouvoir aux acteurs économiques au détriment de l’économie financière. Il ne s’agit pas uniquement de morale dans les échanges Nord-Sud, mais bien d’un modèle de société basée sur l’équité à des échelles aussi bien locales qu’internationales.

 

Aussi quand les acteurs de territoires de tous pays se réunissent pour échanger sur des bonnes pratiques , et que ces mêmes acteurs de retour chez eux entreprennent des actions d’envergure pour développer encore plus le commerce équitable, ils sont porteurs de nouveaux outils pour un véritable modèle économique durable ! La Région Pays de la Loire s’est inscrite comme étant un acteur incitateur, pour elle-même et pour son territoire. Il convient de donner de l’envergure à son action, c’est ma mission. Celle-ci trouve sa place dans le cadre du développement des filières économiques responsables mais aussi dans le cadre d’une économie solidaire. Cet engagement régional est d’autant plus important dans un contexte de crise conséquence d’un capitalisme financier niant les valeurs du travail et du développement des populations.

 

Laurent MARTINEZ,

Membre de la Commission des Finances, du personnel, des affaires générales, de la communication et de la démocratie.

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