[BS 2015] Intervention générale de Jean-Philippe Magnen

jpm

Comment ne pas commencer cette intervention sans évoquer la crise financière européenne, appelée de façon un peu caricaturale et avec des œillères par certains, « la crise grecque ».

Etre dans le camp de la réalité Monsieur Pinte, si je vous paraphrase, c’est de dire que la droite européenne est en train de couper les aides de cette Europe. De dire la lâcheté des ministres des finances de la zone euro qui en rompant les négociations avec la Grèce, ont refilé le bébé à la Banque Centrale Européenne. Et malheureusement notre ministre français des finances en est complice. Avec aucun mandat politique, il revient donc à la BCE la responsabilité de décider si oui ou non on expulse la Grèce de la zone euro en poursuivant ou non son aide aux banques grecques. Ce n’est pas la Grèce qui est en train de ruiner l’Europe mais les politiques ultra libérales dites d’austérité du FMI et de l’Europe qui sont en train de ruiner non seulement la Grèce, mais le projet européen.

Le problème c’est de faire croire que c’est uniquement une question de rigueur budgétaire de la Grèce qui règlerait la situation. C’est beaucoup plus grave que ça. C’est aujourd’hui l’austérité généralisée et dramatique, c’est le taxisme monétaire de l’ensemble des pays de la zone euro qui est la cause principale de cette crise.

Aujourd’hui à court terme, qu’est-ce qu’il faut faire ? Dire la vérité. Et la vérité, c’est que le renflouement de la dette grecque ne pèsera pas nécessairement sur les populations des pays de la zone euro, ce n’est pas 650 euros par an et par habitant comme on nous le dit.

Pour sortir par le haut de cette situation, sans parler des réformes profondes nécessaires aujourd’hui au niveau européen, il faudrait 10 euros par adulte français par an pour que la Grèce puisse repartir sur de bonnes bases sans humiliation, 10 euros pour qu’à l’humiliation ne succède pas le désir de revanche qui prendrait alors le plus terrible visage, celui de l’extrême droite nationaliste.

10 euros exigeants et non laxistes comme l’ont été les créanciers avec les gouvernements grecs précédents tous corrompus et champions de l’évasion fiscale. Ces mêmes créanciers dont la France, qui cherchent à faire tomber celui de Tsipras qui ne l’est pas. Ne nous trompons pas d’adversaire.

Rappelons un chiffre : les Etats ont déjà mis à disposition des banques l’équivalent de 4000 milliards d’euros depuis la crise de 2008 et la BCE a créé  1000 milliards d’euros en 2011/2012 toujours afin de sauver les banques. Et aujourd’hui, on veut enterrer la Grèce. Cherchez l’erreur.

Ce sont donc 10 euros pour sauver l’euro et notre vision progressiste et de transformation sociale de l’Europe, et non pas seulement pour sauver la Grèce…

Excusez cette digression de début d’intervention mais elle est tellement liée à la situation de nos territoires dans un contexte d’étude de budget supplémentaire : les mauvaises décisions prises au niveau européen auront en effet un impact direct sur les contribuables français.

Ce Budget supplémentaire s’inscrit donc dans ce contexte particulier  sans précédent, et qui ne relève pas seulement de la responsabilité de la gauche française, mais de l’ensemble des politiques européens, qui, je le regrette Messieurs et Mesdames de l’opposition, sont pour majeure partie de droite libérale. Alors on essaye de résister et peut-être faut-il regarder du côté des territoires et des régions de France et d’Europe pour trouver un motif d’espoir et un début d’intelligence collective et c’est ce que nous essayons de faire modestement au niveau régional.

Malgré la baisse préjudiciable des dotations d’Etat, nous en avions débattu lors du budget primitif, et l’absence de levier fiscal direct, l’examen du compte administratif 2014 et du budget supplémentaire montre que nous arrivons à maintenir un haut niveau d’investissement et une gestion financière saine tout en diminuant la dette, au service des habitants de notre région.

Les trois axes principaux d’engagement de ce Budget supplémentaire, Formation professionnelle et apprentissage (près de 16 millions d’euros), la jeunesse (plus de 15 millions) et l’aménagement et le développement des territoires (près de 11 millions) illustrent l’engagement fort qui est celui de la majorité pour apporter des solutions d’urgence tout de suite à ceux qui en ont le plus besoin sans hypothéquer l’avenir.

Pour revenir au bilan de ce mandat, nous pouvons affirmer qu’il a été une belle occasion de montrer la crédibilité et la pertinence des propositions écologistes dans des domaines variés tels la transition énergétique où nous avons passé un cap décisif avec l’affirmation d’une région 100% renouvelable à échéance de 2050, le développement des circuits-courts, notamment dans la restauration durable des lycées (près de 60% de lycées engagés), l’éco-conditionnalité des aides publiques, même si l’exemple récent de Renault nous montre qu’il existe encore beaucoup de marge de progression et la commande publique durable ou la gestion de l’eau… Pendant cinq années, nous avons mis en œuvre une écologie concrète, avec le souci de répondre aux attentes des citoyen-ne-s comme des acteurs et actrices socio-économiques du territoire.

Ensemble, au sein d’une majorité unie dans sa diversité nous avons mis en œuvre des dispositifs contre la crise qui ont fait la preuve de leur efficacité et ce, malgré la baisse drastique de nos ressources financières :

*   Un Plan d’urgence en faveur de la filière construction durable,

*   une charte quadripartite pour la continuité professionnelle

*   les mesures nouvelles pour favorise l’emploi durable des jeunes.

Avec moins de ressources financières, nous avons réussi, grâce à de véritables partenariats avec les partenaires sociaux, à maintenir ces dynamiques positives pour l’économie et l’emploi durables de notre territoire.

Malheureusement, nous aurions pu faire beaucoup mieux si ces dynamiques positives n’avaient pas été trop souvent freinées par des prises de position et projets qui vont à l’encontre d’un développement harmonieux, respectueux des équilibres naturels et humains du territoire. Je pense ici naturellement à NDDL, et à l’A831 mais aussi à des choix faits en matière de politique agricole et agroalimentaire.

Je commence par l’A831. Alors que la Ministre de l’Écologie a annoncé ne pas vouloir prolonger, pour des raisons économiques et environnementales, la Déclaration d’Utilité Publique qui prendra fin le 12 juillet, les partisans de l’autoroute A831 multiplient les attaques à son encontre… A gauche comme à droite, personne ne semble vouloir observer que cette balafre de bêton sur pilotis, dans un site préservé, n’est pas une réponse adaptée aux véritables enjeux de développement et d’aménagement équilibré du territoire.

Et je rappelle que l’État a annoncé qu’il ne financera pas ce projet relégué aux oubliettes par le rapport Duron, et qu’il est donc difficile d’imaginer les collectivités locales en supporter seules le poids dans le contexte budgétaire actuel.

Et pourtant, nous ne faisons pas que de nous opposer. Des alternatives concrètes d’amélioration de l’existant sont bien là : modernisation de l’axe ferroviaire Nantes – Bordeaux avec la création d’un arrêt en gare de Vélluire afin de mieux desservir le Sud Vendée ou la sécurisation et le réaménagement des départementales 137 et 148.

Des alternatives bien plus intéressantes pour les finances publiques et l’environnement.

J’en arrive maintenant à Notre Dame Des Landes un autre dossier qui, malgré l’urgence de son abandon, continue d’alimenter les débats, les querelles et les prises de positions. Il symbolise un clivage, non pas entre la gauche et la droite encore une fois, ni entre écologistes et socialistes, non, il est le modèle – ou l’anti modèle – de ce que devrait être l’ambition au XXIe siècle… Pour nous, écologistes, un territoire sans Notre Dame Des Landes serait l’ambition d’une vision responsable de l’aménagement et de l’optimisation des infrastructures de transport existantes. Un territoire sans Notre Dame Des Landes serait l’ambition d’un respect de l’environnement, l’ambition d’une prise de conscience de la situation de nos finances publiques qui nous obligent à prioriser nos investissements aux services des habitants, au regard de leurs préoccupations quotidiennes…

Nous avons la conviction aujourd’hui, que l’opiniâtreté et le temps donneront raison aux écologistes. La lutte contre Notre Dame Des Landes s’est faite sur trois piliers distincts mais complémentaires : le débat politique dans les hémicycles, la mobilisation citoyenne, et la justice.

Sur ce dernier point nous attendons sereinement la décision du Tribunal Administratif du 17 juillet. Le rapporteur a si rapidement évacué la question des mesures compensatoires, pourtant au cœur du droit à l’environnement, qu’il nous est permis de rester confiants…

Et si, sur un malentendu, les partisans devaient remporter cette manche juridique, nous connaissons le droit et ses possibilités qu’il contient, pour les opposants, comme pour les promoteurs du projet : la Cour d’Administrative d’Appel d’abord, le Conseil d’Etat ensuite, pour tous les acteurs de ce dossier. Sans compter d’ailleurs, la plainte en cours au niveau de l’Union Européenne pour laquelle nous attendons encore l’expression de l’Etat français, qui devrait arriver dans les semaines qui viennent.

Et je rappelle si besoin que l’épuisement de la totalité des recours est la base des engagements de François Hollande en 2012 et 2014.

Nous sommes dans cette situation de crise économique, sociale, climatique, où les dérèglements sont multiples et engendrés principalement par l’activité humaine. C’est en lien avec les dossiers que je viens d’évoquer. Mais nous avons la main, pour faire quelque chose et pour agir parce que si le constat est affligeant, nous avons la possibilité d’agir et de prendre des décisions.

Et à ce titre, j’ai évoqué ce matin, en présence de M. Bonneau, où j’étais un peu étonné qu’il ne rebondisse pas dessus, ni mes collègues de la majorité régionale, l’enjeu de la COP21 est crucial, notre planète n’a pas de plan B !

La coopération entre tous, et tous les pays et l’intelligence collective permettront le succès de la COP21. 195 pays seront réunis pour tenter de trouver un accord inédit et universel pour lutter contre le réchauffement climatique.

Et notre région doit y prendre toute sa part. Au cours de ce Budget Supplémentaire, nous voterons le rapport sur notre stratégie à l’international. La transition écologique comme la lutte contre le réchauffement climatique doit être en son cœur tellement elles sont les solutions concrètes de changement de cap mondial face à l’illusion financière que j’évoquais au début de mon intervention. Selon Gaël Giraud, auteur de cet ouvrage, que je vous invite à lire qui date de 2014 « l’illusion financière » et le sous-titre de son livre « des subprimes à la transition écologique », on ne peut pas l’accuser d’être un écologiste engagé. Si nous démarrions maintenant le programme d’investissement, cela représenterait 3000 milliards d’euros à investir sur une décennie. 3000 milliards c’est moins que ce que j’évoquais tout à l’heure, sur le sauvetage des banques.

La transition écologique coûterait donc moins cher que le sauvetage inachevé du secteur bancaire  et en plus créerait des millions d’emplois.

Exemple pour revenir sur notre territoire régional, notre région y prend d’ailleurs toute sa part avec une stratégie régionale ambitieuse en matière de transition énergétique. Mais prenons par exemple un dossier du jour nous allons évoquer notre stratégie en matière de développement durable qui ne tient pas, ou peu compte des nouveaux indicateurs de richesses qui prennent mieux en compte de l’urgence du réchauffement climatique, et donc des externalités possibles. Je pense notamment à l’agriculture biologique ou à l’agriculture en circuit court.

Je finirais mon intervention en rendant hommage à une personne, qui aurait pu d’ailleurs tenir les propos de la fin de mon intervention sur, la stratégie de notre Région, et les nouveaux indicateurs de richesses, ou elle aurait pu reprendre ceux de Gaël Giraud.

C’est parce qu’il faut, de mon point de vue, écouter les gens qui agissent, et vont agir dans cet esprit de soutien à la transition d’un modèle qui aujourd’hui n’est plus uniquement une alternative mais un exigence, un impératif.

Cette personne, c’est Hélène Combe, qui nous a malheureusement quittés beaucoup trop tôt il y a quelques semaines.

Je ne citerai pas dans cet hémicycle tout ce qu’elle a apporté à notre Région ou à d’autres territoires sur la question du développement durable. Mais rien que le travail entamé et piloté par vous, M. Le Président, ou votre Premier Vice-Président, Christophe Clergeau, partagé avec des milliers de citoyens de notre Région et des centaines d’acteurs sur les indicateurs de richesse pose les jalons de la transition.

Tout le travail qui a été effectué, cette ébauche, nous ne pouvons pas la laisser. Rien que pour la mémoire du travail qu’Hélène a pu faire dans notre Région. Le plus bel hommage que nous pouvons lui faire est donc de continuer son œuvre en agissant et en faisant tout pour éviter l’effondrement et construire cette alternative écologique et solidaire qu’elle appelait de ses vœux. Ça veut dire très concrètement que j’espère que nos successeurs, mes successeurs, dont certains sont ici sauront agir de la sorte et sortir d’un conformisme paralysant pouvant devenir dramatique y compris pour notre Région.

 

Merci à elle.

 

Je vous remercie de votre attention.

 

 

Laissez un commentaire

Remonter