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    Esquisse pour une démocratie communale

    9 février 2012

    Il y a pour le moins un malentendu sur la fonction des commissions municipales.

    Les élus d’Aigues-Mortes reçoivent par courrier le même jour la convocation pour le conseil municipal (CM) et pour la commission supposée préparer les délibérations soumises au conseil. Le CM siège 5 jours plus tard, la commission 3 jours. Comme la convocation au CM contient les projets rédigés de délibérations adressés à tous les conseillers, la fonction de la commission est une énigme. A quoi sert-elle ?

    Ce que sont en principe les commissions municipales (article L.2121-22 du CGCT) : des instances pluralistes (la représentation des élus y est proportionnelle – j’y reviens plus loin) qui préparent les projets de délibération. C’est un lieu de travail et d’élaboration où les différents courants politiques du conseil échangent leurs points de vue jusqu’à trouver soit un consensus, soit le point d’un désaccord qui se fonde sur une véritable divergence. Ces instances sont beaucoup moins conflictuelles que le CM lui-même qui est public et où entre de fait une part de représentation.

    La façon dont la municipalité actuelle pratique a quelque chose d’assez faux-cul : on réunit (parfois) la commission mais après la clôture de toute discussion. Pour tout ce qui relève de la discussion préalable, de la préparation, des étapes du projet, de l’élaboration, c’est « entre nous ». Puis quand on a posé la dernière virgule au texte définitif, là on ouvre la discussion, parce que l’on est des «grands démocrates» et que l’on est «de gauche»

    J’ai fait récemment une expérience instructive : lors d’une commission des finances (6/02/12) j’ai décidé, sur 2 ou 3 questions importantes, de ne pas intervenir (j’étais le seul élu minoritaire). Du coup le président et les membres de la commission étaient en plein désarroi, le silence pesant s’installait. La commission «préparatoire» n’avait plus aucune raison d’être puisque tout était préparé depuis longtemps hors commission.

    Cet état de fait tient pour une part à la personnalité du maire et de ses proches et pour une autre à nos institutions qui laissent la possibilité d’agir ainsi, à la limite de la légalité.

    Nous sommes en effet dans un système majoritaire – opposé à proportionnel – qui donne un avantage mécanique en nombre d’élus à la liste arrivée en tête aux élections. Ainsi la liste de M. Bonato dispose des 2/3 des sièges au CM alors qu’elle a obtenu moins de 40% des suffrages. Un système proportionnel lui aurait attribué le même nombre de sièges que de voix, soit 11 élus, et 18 aux autres listes présentes à ce scrutin.

    Et donc, plus de majorité automatique : retour de la discussion, de la négociation, du compromis, c’est-à-dire de la politique. Exit les simulacres d’assemblées genre «cause toujours» que sont les conseils actuels. Et alors le rôle des commissions redeviendrait ce qu’il devrait être : le lieu de la construction pluraliste des décisions, avant le débat en conseil.

    C’est ainsi que fonctionnent les municipalités en Suisse. J’ai eu l’occasion d’assister à un conseil grâce à un ami élu. J’ai été impressionné par la richesse des débats et la qualité des rapports présentés sur chacune des questions par les responsables des commissions. Une assemblée démocratique qui fonctionne c’est vraiment admirable.

    J’ai donc présenté des propositions écrites claires et précises lors du CM du 15/12/2011 pour améliorer le fonctionnement du conseil d’Aigues-Mortes. Elles n’ont pas suscité un mot, pas une réaction, pas un commentaire de nos «grands démocrates». L’ignorance absolue de nos élus «de gauche». (voir :  CM 15-12-2011- PROCES VERBAL)

    Il y a de nombreuses manières de considérer le fait majoritaire qui se ramènent en fin de compte à deux attitudes : 1. j’ai la majorité, j’ai donc le pouvoir de décider et je prêterai une oreille à la minorité si j’ai le temps et surtout – surtout – s’ils sont gentils; 2. les institutions m’ont donné un avantage pour pouvoir décider mais seule l’expression réelle du suffrage compte, les gens attendent de moi de tenir compte de la diversité des opinions qui se sont exprimées.

    Cette deuxième façon de voir est assez rare et le problème c’est que les citoyens eux-mêmes ont intégré une démocratie dévoyée : combien de fois ai-je constaté qu’en tant qu’élu minoritaire je n’étais pas considéré comme un représentant de la municipalité. Et vraiment pour le maire et son équipe les conseillers minoritaires sont des non-élus puisqu’ils ont perdu les élections : ils n’ont pas été élu, tout simplement. Même si dans la réalité, hors le fait du nombre qui emporte les décisions, les conseillers minoritaires ont exactement les mêmes droits, exactement le même statut. Ça, bien sûr c’est dans les livres, je veux dire dans la loi…

     

     

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