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    Les salins d’Aigues-Mortes sont-ils à vendre?

    7 janvier 2012

    Le projet de musée présenté à Aigues-Mortes par le Pdg de Salins, M. Pierre Lévi (cf ML 7-01-2012), s’inscrit dans un contexte, celui de graves inquiétudes sur l’avenir industriel du site.

    La chronologie des faits est éloquente :

    • fermeture progressive depuis 25 ans de tous les salins de Méditerranée française, après les salins de l’Hérault, d’Hyères, de l’Aude
    • réduction volontaire de production des grands salins de Giraud et d’Aigues-Mortes
    • vente du patrimoine productif : 6 000 ha à Giraud, 2 500 ha en 2011 à Aigues-Mortes
    • suppression des emplois : malgré l’annulation judiciaire du plan social, 35 personnes sont déjà parties
    • délocalisation de la production : pour la première fois cet été du sel La Baleine a été conditionné en Italie avec du sel de Tunisie
    • absence d’investissement, développement de la sous-traitance, remise en cause permanente des accords sociaux

    Quand, dans le même temps, ce Pdg affirme : «Je crois en l’avenir des salins» ce n’est ni sérieux ni crédible. Quand il avance des problèmes de surproduction et de manque de compétitivité pour une entreprise qui fait des profits réguliers il n’est pas à la hauteur des enjeux.

    Qu’est-ce donc qui est à l’oeuvre? Une logique interne de groupe qui privilégie à terme d’autres sites d’une rentabilité apparente plus immédiate; une stratégie financière hasardeuse (LBO) très pénalisante pour l’investissement; un choix de profit immédiat par liquidation du patrimoine foncier.

    C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre la multiplication d’initiatives sans avenir : des manoeuvres de diversion et parfois de valorisation avant liquidation.

    Le projet de thalassothérapie (ou halothérapie) est un serpent de mer que les politiques ressortent régulièrement et que les salins laissent dire sans s’engager : promesses de «développement économique» et «d’emplois», ce dossier brillant est vide comme au premier jour et ne se fera pas : les terrains sont inondables et inconstructibles, soumis à la loi littoral.

    On peut très raisonnablement penser que le projet touristique actuel vise à rénover du bâti – avec pour partie des fonds publics – qui permettra demain des transactions immobilières plus profitables.

    Et faire remarquer que ce projet est sans rapport avec la question de l’avenir industriel du site (les revenus de ce type d’activité sont marginaux par rapport à la production saline) et que bien au contraire la tendance muséographique semble clairement un avant-projet à la fin de l’exploitation.

    Et pendant ce temps personne ne parle véritablement de l’avenir et d’abord de celui de l’activité salinière et de la viabilité d’un projet industriel. Ou encore des alternatives : autres usages du sel, cultures substitutives, d’algues par exemple, activités piscicoles, ou bien d’un usage récréatif du site conciliable avec les enjeux environnementaux.

    A poser toutes ces questions on constatera que certaines peuvent être cruelles, elles n’en sont pas moins capitales : le dérèglement climatique provoque une hausse du niveau de la mer et des risques inéluctables de submersion marine, le coût du maintien du trait de côte sera de plus en plus élevé, sans doute intenable dans quelques décennies.

    L’enjeu des salins dépasse, et de très loin, les seuls intérêts d’une entreprise privée : l’exploitation du sel a façonné la société locale depuis l’antiquité, son imaginaire, sa langue, ses usages, les types urbains, les paysages évidemment. C’est donc un bien commun. On attend de toute cette société-là, élus, patrons, syndicats, associations, collectivités, citoyens… du courage et de l’inventivité pour décider de notre avenir et non le subir avec de graves déconvenues trop prévisibles.

    Europe Ecologie Les Verts souhaite vivement qu’une réflexion collective s’engage, un débat public local, sur l’avenir des salins et de l’activité salinière en Camargue. Il y prendra toute sa place.

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