Interview de Michel Roulet:

8 juin 2011
Michel Roulet

Michel Roulet

Michel, 10 ans après l’éclatement de l’affaire de la dioxine, et quelques jours après le délibéré du procès quel est ton sentiment sur le résultat de ce combat mené par les parties civiles ?
J’ai un profond sentiment d’injustice. De très nombreuse personnes se sont dépensées corps et âmes pour que soit reconnu le préjudice et la justice s’est défaussée. Il est vrai que beaucoup de responsables locaux avaient des choses à se reprocher, et que le jugement les a arrangés. Il n’y a même pas eu de la part du procureur et de beaucoup d’élus, dont l’ancien maire, le minimum de compassion qu’une société civilisée doit avoir vis à vis des victimes, qu’elles soient agriculteurs ou malades, en particulier du cancer.
De même, pas la moindre autocritique de ce monde politique et judiciaire. Comme s’il était au dessus des autres et totalement étranger aux graves problèmes posés par l’irresponsabilité de la société en matière de déchets.

Peux-tu nous rappeler quel rôle a joué cette affaire dans la législation nationale ?
Je suis ingénieur et je n’ai pas fait d’études de droit. Mais après cette affaire, comme je l’ai dit à la télévision, je ne fais pas confiance à la justice de mon pays en matière de délit de pollution.
Tout d’abord, les magistrats sont ignorants en matière d’écologie, une science nouvelle pour eux et qui n’est pratiquement pas enseignée en fac de droit.
La justice s’appuie sur des textes trop anciens et il est scandaleux de demander à un malade en particulier de prouver que les dioxines sont la cause de son cancer.
Tout est donc à réformer. Je cite ici quelques points qui me paraissent fondamentaux:
a) Rendre obligatoire un registre des cancers.
b) Permettre aux victimes de se regrouper et faciliter la recherche de la vérité.
c) Prévoir un système indépendant pour les expertises.
A ma connaissance, rien n’a été fait par le gouvernement sur ces sujets. Et selon Maître Billet qui nous a défendu, la position de la cour de cassation en ce domaine est en recul. Sans parler du projet de suppression du juge d’instruction.

As-tu remarqué des changements dans la gestion des déchets au niveau local ? (quelles améliorations ? quels manques encore ?)

Après la catastrophe de GILLY, les savoyards ont globalement réagi dans le bon sens. Cela s’est traduit par la fin de la croissance du volume de déchets produits par personne et c’est encourageant.
Néanmoins pour moi sur le bassin d’Albertville, la réponse n’a pas été à la hauteur .Le projet d’écoparc s’est perdu dans les sables et j’ai la désagréable impression que beaucoup d’élus sont bien contents d’envoyer les déchets vers l’incinérateur de Chambéry en se défaussant ainsi de leur responsabilité. A noter cependant la très louable et courageuse décision de la collectivité Verrens / Frontenex qui passe à la redevance incitative.
Je pense qu’il faut aux prochaines élections locales qu’apparaissent une nouvelle génération d’élus, plus écologistes.

Pour aller plus loin:

Livre

Michel ROULET.- incinération+pollution ; Le scandale de l’incinérateur de Gilly sur Isère.- Editions du Layeur, 2008
(EN VENTE CHEZ: MAISON NATURE ZA CHIRIAC 621 RUE LOUIS ARMAND 73200 ALBERTVILLE)

Partager