Décroissance
Un mauvais jeu de maux
La montée en puissance des préoccupations écologiques suscite bien des convoitises. Désormais, tout le monde est écologiste, ou l'a toujours été, ou vient de découvrir qu'il l'était devenu. Mais encore faut-il, pour le faire savoir, se démarquer des écologistes coupables, forcément coupables (surtout quand leur score, comme aux européennes, menace de reconfigurer l'échiquier électoral autour de leurs préconisations) de prôner une écologie d'arrière-garde, triste, punitive.
Accuser les écologistes de "décroissance" est donc la nouvelle arme secrète des nouveaux arrivants dans le monde de l'écologie. Petite mise au point.
Comme le rappelle régulièrement Cécile Duflot, le vocable de décroissance est apparu lorsque le "développement durable" a commencé, de la part d'entreprises tout aussi polluantes que soucieuses d'entretenir leur image de marque, à se voir réduit au fait d'imprimer sur papier recyclé leur compte-rendu d'activité annuel... Ainsi le recours au terme de "décroissance" est-il notamment à comprendre en fonction de cette tendance à recycler les thématiques écologistes à n'importe quelle sauce : celle du marketing, de la croissance, du capitalisme et même du nucléaire, vert, toujours vert, encore plus vert...
Alors, ne l'oublions pas, si une certaine décroissance est certainement un mal (le retour à la bougie, la nostalgie d'une pureté originelle de l'homme, non encore "pollué" par la technique et la libéralisation des mœurs), elle n'est aussi qu'un mot. Et un mot n'a de sens qu'en fonction de l'usage qui en est fait.
Les écologistes sont-ils pour la décroissance ? Pour la décroissance de la bêtise, de la démesure, du temps perdu dans les transports, des pollutions, des égoïsmes... OUI ! Pour la décroissance du temps de travail, encore OUI ! Pour la décroissance de nos émissions en gaz à effet de serre et du gaspillage, toujours OUI !
Les écologistes sont-ils favorables à la croissance ? Si c'est celle de notre bien-être, de la qualité de vie, de notre épanouissement individuel et collectif... OUI ! Si c'est celle de l'implication des citoyens dans la démocratie, OUI ! Si c'est celle de notre capacité collective à transformer nos façons de produire, de consommer... bien sûr que OUI ! Et s'il s'agit de la croissance de nos ambitions pour entamer la conversion écologique de l'économie, par exemple et en particulier lors des échéances de mars prochain, eh bien, définitivement : OUI !!