La pollution de l’air « n’est pas qu’une aberration sanitaire, c’est aussi une aberration économique »
Dans son rapport intitulé « Pollution de l’air : le coût de l’inaction« , rendu public ce mercredi, une commission d’enquête du Sénat évalue globalement à 101,3 milliards d’euros le coût annuel de la pollution de l’air ! Le rapport a été réalisé grâce à l’audition de plus de 70 experts environnementaux et économistes ainsi que quatre ministres.
Il indique que la pollution « n’est pas qu’une aberration sanitaire, c’est aussi une aberration économique« . En cause, les particules fines émises principalement par les véhicules Diesel, qui seraient à l’origine de près de 45 000 décès prématurés par an et dont le coût serait de 48 milliards d’euros, selon l’Organisation Mondiale de la Santé.
La commission recommande d’aligner d’ici à 2020, la fiscalité de l’essence et du diesel, et d’appliquer la déduction de la TVA aux entreprises qui utilisent des véhicules diesels à l’essence et l’électrique.
« L’écart de taxation entre l’essence et le gazole est actuellement de 17 centimes. A moins de manquer de volonté, il est tout à fait possible de gagner ces 17 centimes à l’horizon de cinq ans« , a déclaré Jean-François Husson, président de la commission d’enquête, cité par Le Monde. Le sénateur du Doubs Martial Bourquin en était le Vice-Président.
Certains autres polluants atmosphériques tels que les oxydes d’azote favoriseraient les troubles cardiovasculaires, les cancers et des affections respiratoires telles que l’asthme, selon le rapport sénatorial, qui estime la prise en charge de 1 à 2 millions d’euros par an. Les arrêts maladies et hospitalisations dues à la pollution de l’air ont également été estimées à 650.000 jours d’arrêt de travail par an par la commission d’enquête.
La sénatrice française (EELV) de Paris, Leila Aïchi, instigatrice et rapporteuse de la commission, a précisé que « les effets cocktail ne sont nullement pris en compte. Et le coût sanitaire de la pollution de l’air intérieur n’est quasiment jamais intégré« , pointant les limites des études réalisées.
La commission d’enquête préconise d’instaurer une fiscalité « écologique » et « à ne pas simplement reporter le coût de la pollution sur les émetteurs », ce qui pourrait freiner les foyers les plus modestes.
Elle suggère également d’engager des partenariats entre public et privé pour inciter davantage la population à se tourner vers les alternatives déjà existantes.
Dans les grandes villes, les conséquences sont aussi visibles sur les bâtiments. Le coût des ravalements de façades noircies est en constante augmentation. À la campagne, c’est surtout la baisse des rendements agricoles qui préoccupe.
Les sénateurs ont présenté 60 recommandations. Ils espèrent une règlementation claire en matière de lutte contre la pollution, cinq mois avant la conférence du climat qui se tiendra à Paris.
« Déjà, je pense que l’avantage de ce rapport, c’est qu’il met enfin de la transparence sur ces données, il les a réunies et il montre que la pollution de l’air, ça coûte des journées de travail, ça coûte sur les rendements agricoles, cela coûte sur la santé des personnes et cela a un coût global sur l’Etat« , a avancé Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale EELV, sur France Inter.
« Les mesures » pour lutter contre cette pollution, « ça fait longtemps que les écologistes les défendent. Ça commence déjà par arrêter d’avoir une fiscalité qui favorise l’usage du diesel versus essence », a-t-elle poursuivi.
« Est-ce qu’il est normal qu’en Ile-de-France, dans une ville comme Paris, Grenoble ou Toulouse, nous perdions six mois d’expérience de vie parce que nous vivons dans une zone trop polluée ? Est-il normal que nos enfants aient des problèmes d’asthme, de bronchiolite, et que quand il y a des pics de pollution ce soient eux qui restent à la maison et pas les voitures, qui sont dehors ?« , a-t-elle développé.
Les écologistes prônent notamment d’ »aider par des niches fiscales à pouvoir changer de véhicule » et « avoir des crédits intéressants » pour l’acquisition de véhicules moins polluants.
Les travaux de la Commission :
http://www.senat.fr/notice-rapport/2014/r14-610-1-notice.html
Le Rapport : ci-dessous.
Ségolène Royal prendra des mesures « extrêmement fermes » la semaine prochaine
« Il n’y aura plus d’excuses pour ne pas agir« , a salué Ségolène Royal. La ministre de l’écologie a assuré à la sortie du Conseil des ministres qu’elle prendrait des mesures « extrêmement fermes » : « La semaine prochaine, je vais rendre publiques les décisions que l’Etat va prendre. Il ne faut plus que les gens rouspètent, que les gens disent « ce n’est pas le moment, on verra demain ». Il faut aussi que les maires des grandes villes prennent leurs responsabilités dès lors que la loi de transition énergétique va leur donner des moyens d’agir, notamment pour créer des zones de restriction de circulation ».