Introduction au débat sur la loi organique

 

Introduction au débat sur la loi organique

Assemblée nationale

Lundi 8 octobre 2012

 

Monsieur le président,

Monsieur le ministre,

Mes cher(e)s collègues,

 

Lors de son intervention en réponse à la déclaration de politique européenne du Premier ministre, la semaine dernière, notre collègue Barbara Pompili insistait

–          sur le pragmatisme des écologistes

–          et notre refus de concevoir le monde – et singulièrement les questions européennes – selon un prisme idéologique réducteur et manichéen.

 

C’est dans cet esprit que nous voulons aborder l’examen de la loi organique après le refus majoritaire de notre groupe

de valider le TSCG en raison du risque d’austérité qu’il peut entraîner.

 

Si la politique est souvent décrite comme l’art de concilier les contraires,

cette séquence de la vie parlementaire en est une parfaite illustration.

 

Notre assemblée est en effet appelée à trouver  le chemin  entre des exigences apparemment contradictoires :

–          réduire la dette

–          mais maintenir l’activité économique et donc un emploi et un revenu pour le plus grand nombre.

Autrement dit, nos pays se trouvent aujourd’hui dans la situation d’un équilibriste qui peut à tout moment basculer

–          dans le gouffre de l’austérité

–          ou dans celui de la dette

  • qui conduira également à l’austérité

 

Le risque de l’austérité

 

Chacun  a compris que le régime sec aggravait la maladie.

Les dogmatiques de l’économie libérale,

tels les médecins de Molière,

ont fait de la saignée le remède à tous les maux.

 

La doxa libérale, uniquement obsédée par la dépense publique produit en réalité des effets inverses à ceux recherchés

en provoquant en réalité une dégradation des finances publiquess.

La  France en est malheureusement un des exemples les plus frappants

avec un doublement gravissime de la dette en 10 ans, de 900 à 1800 milliards, soit 30000 euros par français.

De quoi s’interroger sur la soi disant supériorité de la droite en matière de gestion.

 

Le risque de la dette

 

Je veux le dire ici avec force,

la gauche que nous incarnons,

parce qu’elle est écologiste et fondée sur l’avenir de nos enfants et des générations futures,

considère la dette financière comme un véritable fléau.

Tout simplement parce que la dette,

plus sûrement et plus sournoisement que la diète budgétaire,  conduit elle-même à l’austérité.

La dette, c’est l’argent rare et cher, et donc

–          la paralysie de l’économie

–          l’incapacité à épargner pour les plus modestes, pendant que les créanciers – les détenteurs de la dette –  voient leurs profits croître en même temps que les taux d’intérêt.

Oui, la dette est l’ennemi des modestes et des innovateurs. C’est pour eux  que nous voulons  nous engager dans le redressement des comptes publics.

Nous ne laisserons pas le monopole de l’honneur, de la combativité, de la défense des plus modestes à ceux qui déclarent – ce fut le cas d’un candidat à l’élection présidentielle – que « la dette n’est pas un problème ».

Dire cela c’est faillir à son  devoir qui est d’éclairer le peuple de dire ce qui est vrai.

 

Ni la foi aveugle dans les forces du marché, ni le rêve du  grand soir européen, encore moins un repli nationaliste fatal ne pourront  répondre aux défis qui sont devant nous.

 

 

Le moment du doute

 

Nous n’avons plus le temps de nous abriter derrière les certitudes passées qui ne conservent comme seule vertu que :

–          de rassurer

–          de rassembler les militants

–          de mobiliser son électorat.

Face à la complexité, le moment du doute est venu.

C’est tout à la fois une question d’hygiène mentale

et une condition à l’innovation politique.

 

Ce n’est pas toujours payant médiatiquement : il est tellement plus facile

–          de fonctionner avec des schémas

–          de » faire ses gammes » idéologiques

–          de se choisir un adversaire

–          et de fonctionner   bloc contre bloc.

 

C’est donc plus armés de doutes que de certitudes  que nous abordons ce débat sur la loi organique de programmation des finances publiques.

 

Parmi ces doutes, il en est un qui a fait couler beaucoup d’encre et qui peut aujourd’hui se poser de la façon suivante : peut-on réellement envisager de voter la loi organique alors qu’on a majoritairement refusé le TSCG ?

–          Tout d’abord, vous observerez, le moment venu, que le probable vote favorable  de notre groupe en faveur de la loi organique n’est pas plus unanime que ne l’a été notre opposition au TSCG. Ce qui relativise certains commentaires

–          Ensuite, nous devons intégrer le fait qu’après l’adoption du TSCG, ses dispositions s’appliquent et peuvent conduire à une saisine de la Cour de justice européenne et à des sanctions à  l’encontre de la France si cette la loi organique n’était pas adoptée.

–          Enfin, il faut préciser qu’au delà de l’adoption de cette loi, le débat et les choix politiques restent totalement ouverts. On le verra, dans cet hémicycle d’ici quelques jours,  lors du débat sur la loi de finances 2013, il y a bien plusieurs manières d’appliquer le TSCG et la Loi organique. Les critiques et les oppositions que nous auvons exprimées lors du débat et du vote sur  TSCG nous donne aujourd’hui une réelle force pour dire ce que nous voulons en  faire dans le budget 2013.

 

Le second consiste à savoir si la Loi organique permettra   de respecter les engagements de la France sans programmer l’austérité.

 

Cette loi n’aura donc pas valeur constitutionnelle. Pour autant, elle engage.

–          A quoi, et jusqu’où ?

–          Sera-t-elle une loi d’airain, au risque de se trouver rapidement ébranlée par la réalité et battue en brèche par les désastres de l’austérité qu’elle provoquerait ?

–          Ou à l’inverse une loi ouvrant la porte à des aménagements excessifs, ce qui serait en contradiction avec les engagements de la France ?

 

Les enjeux de la loi organique

 

C’est sur la base de ces questions que les député-e-s écologistes ont préparé le débat sur le texte qui nous est soumis. Avec ma collègue Eva Sas, nous avons examiné avec attention ses conséquences, comme ses présupposés. Les amendements sur lesquels nous avons travaillé – en lien avec nos collègues socialistes – entendent répondre à un certain nombre de questions posées la semaine dernière par François de Rugy et Barbara Pompili dans leurs interventions sur l’Europe et sur le TSCG.

 

Plus précisément, il est essentiel que la rudesse et la sécheresse des objectifs financiers chiffrés du  TSCG  traduits dans la loi organique ne nous fasse pas oublier les objectifs de développement adoptés par l’Union européenne, notamment en terme environnementaux et sociaux. Ces objectifs doivent être traduits dans la composition  du  Haut conseil des Finances publiques. La cohérence consiste également à veiller au maintien de ces objectifs.

 

C’est dans un esprit constructif que nous abordons ce débat.

Un débat qui n’est pas que formel ou artificiel, puisqu’il coïncide avec le début de l’examen d’un budget 2013 qui tout à la fois intègre et anticipe cette loi organique et ses objectifs.

 

Mes chers collègues, lors du débat sur le TSCG, nous avons évoqués les insuffisances de l’Europe, ses errances mais aussi ses avancées. Nous avons  partagé nos doutes sur la portée même des traités européens. Nous avons mesuré la capacité de l’Europe à bouger  malgré les forces contradictoires qui la traversent. Les écologistes ont salué les avancées obtenues depuis juin, sur la BEI, la croissance, la taxe sur les transactions financières.  On peut minimiser mais le sens est donné. Nous avons récemment noté avec satisfaction les changements de doctrine de la BCE sur la prise en compte des dettes souveraines et sur  les obligations d’Etat, ou encore le sursis accordé par les ministres de finances au Portugal. Rien n’est écrit définitivement, tout est possible, les libéraux, eux-mêmes, vascillent.

 

C’est précisément cette question qui va animer nos débats lors de la  loi de finance 2013.

C’est à ce moment précis que se confronteront la  logique des libéraux qui n’ont juré jusque là que sur réduction de l’impôt et la baisse de la dépense publique

Confrontation, disais-je, entre les libéraux et les progressistes, moins camper sur leurs certitudes,  plus réalistes, qui cherchent avec discernement le meilleur dosage entre optimisation de la dépense publique et restauration d’une fiscalité juste et dynamique

.

Oui nous rembourserons la dette mais nous le ferons en protégeant les plus modestes, en préservant nos ressources et en soutenant les entreprises créatrices de valeur et de travail.

Nous en donnerons des preuves très concrètes dans la loi de finance 2013.

Car rien n’empêche, ni dans le TSCG, ni dans la loi organique de restaurer la justice fiscale.

D’ailleurs, les débats qui s’engagent avec l’opposition parlementaires montrent à l’évidence qu’il y a bien deux manières de résorber la dette.

 

Nous avons encore des cartes en main pour dire que le vrai débat n’est pas tant de celui du remboursement de la dette mais celui de   savoir qui va  la rembourser.

Et de ce point de vu, ni le TSCG ni la LO n’ont écrit l’histoire. C’est à nous de le faire.

A nous de construire l’Europe politique qui  saura par l’harmonisation fiscale et sociale, par son poids dans le monde apporter la régulation nécessaire à la mondialisation.

 

Ce projet, n’en déplaise à certains, nous le porterons au sein de la majorité de cette assemblée avec toute notre force , avec notre singularité tout en assumant les décisions et les contraintes.

 

C’est dans ce cadre  que nous déposerons nos amendements sur le texte de cette loi organique, et de notre contribution au travail parlementaire sur ce projet.

 

Je vous remercie pour votre attention.

 

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