Éric Alauzet : « Pas de vaccination, sans explications ».

 

L’Est Républicain, dans son édition de dimanche dernier, a consacré son dossier des premières pages sur la question des vaccins de l’obligation de vaccination pour 11 d’entre eux prévue dans le Projet de loi de finances de la Sécurité sociale 2018. Rapporteur du Projet de loi pour la commission des finances et médecin, Éric Alauzet y explique ses réserves.

 

CI-dessous les articles de l’Est Républicain dont celui sur le combat d’Yves Ketterer, vice-président de l’association d’entraide aux malades de myofasciite à macrophages (E3M) – qui a rencontré dernièrement Éric Alauzet avec son Président à Paris – le point de vue du Médecin de la PMI du Doubs et la consultation ouverte par France Bleue.

 

 

FRANCHE-COMTÉ Santé

« Pas de vaccination, sans explications »

BERNARD PAYOT

 

Plutôt que de rendre plus de vaccins obligatoires, Éric Alauzet aimerait que les patients aient la possibilité de choisir des vaccins sans aluminium, un adjuvant qui est pointé du doigt par les opposants.

Annoncée cet été par la ministre de la Santé, la loi sur les onze vaccins obligatoires sera examinée lors de la session d’automne. Des voix s’opposent. Rapporteur du budget de la Sécu et médecin, Eric Alauzet explique ses réserves.

 

Ils ont permis à des maladies entières de quasi disparaître de notre planète. Leurs vertus ont longtemps été portées aux nues. Et pourtant, le doute s’est installé. Incontestés il y a quelques années – ou par seulement une poignée d’opposants –, les vaccins suscitent aujourd’hui davantage de prudence. Quand il ne s’agit pas d’opposition déclarée comme ce rapport de scientifiques en « guerre » contre la présence d’aluminium.

En ligne de mire, le projet de la ministre de la santé, Agnès Buzyn, présenté cet été afin de porter à 11 le nombre de vaccins obligatoires pour les enfants de moins de 2 ans d’ici le 1er janvier 2018. Pour entrer en application, le texte doit certes être voté lors de cette session d’automne du parlement, mais, d’ores et déjà, des voix s’élèvent pour en dénoncer le bien-fondé.

Médecin acupuncteur à Besançon, député soutenu par En Marche, rapporteur du projet de financement de la sécurité sociale au sein de la commission des finances, Eric Alauzet est plus que réservé sur la pertinence de cette évolution. « Avant toute chose, il n’est pas inutile de rappeler d’où vient ce texte », précise-t-il. En l’occurrence d’un arrêt du Conseil d’État suite à la plainte d’une famille exigeant que la vaccination se limite uniquement au DT Polio. Rien de plus. Là est bien tout le problème.

« Depuis 10 ans, sauf rappel, la France ne dispose plus de ces stocks », explique Eric Alauzet. Lors de l’injection, deux valences supplémentaires – voire trois – sont également injectées : la coqueluche, l’hépatite B et l’haemophilus influenzae. Des injonctions « sournoises » donc, non consenties par le patient, sur lesquelles il a bien fallu trancher d’un point de vue juridique.

 

  • L’obligation, une réponse « inappropriée »

Le projet de loi, en passant de trois à onze, entend donc y apporter réponse. Outre le DTPolio, seront donc obligatoires : la coqueluche, la rougeole, les oreillons, la rubéole, l’hépatite B, le méningocoque C, le pneumocoque, et l’haemophilus influenzae.

Plus que le coût financier – de l’ordre de 10 millions d’euros pour la sécurité sociale et les mutuelles –, c’est le côté « disproportionné » et « inapproprié » de la réponse qui préoccupe justement l’élu bisontin. « En amplifiant le caractère obligatoire, on ne fait que renforcer la défiance de l’opinion publique à l’encontre des vaccins », plaide-t-il. « Or, les arguments des opposants sur la présence d’adjuvants tels que l’aluminium sont des arguments qui font mouche. La population est de plus en plus méfiante par rapport aux lobbies. La santé est un vrai débat d’enjeu démocratique. Il faut plus de dialogue et moins d’obligation », conclut-il en rappelant qu’il avait déposé deux amendements en 2015 lors de l’examen de la loi Santé : l’un demandant que soit à nouveau produit des vaccins pour les seuls trois vaccins de base. L’autre, sur la possibilité de choisir des vaccins « sans adjuvant contenant de l’aluminium » mais plutôt « avec du phosphate de calcium ». Deux amendements qui, à l’époque, avaient été rejetés.

Alors que la ministre de la Santé tente de déminer le terrain, Eric Alauzet se dit, lui constant dans ses positions. Certes, la loi prévoit 3 750 € d’amendes et jusqu’à 2 ans d’emprisonnement pour toute personne qui refuseraient de faire vacciner son enfant.

Sauf prescription médicale et « volonté des parents qui s’opposeraient absolument ». Une mesure dérogatoire qui permettrait en réalité de trouver une porte de sortie honorable en cas de bras de fer. Celle du dialogue que préconise justement Eric Alauzet.

 

Des vaccins mais sans aluminium

FRED JIMENEZ

Yves Ketterer, vice-président de l’association d’entraide aux malades de myofasciite à macrophages (E3M).

Quatre ans pour un diagnostic, dix pour être reconnu handicapé à 80 %. La vie d’Yves Ketterer a basculé en 2000, après un accident vaccinal. « Peu importe le vaccin, je ne suis pas plus opposé aujourd’hui qu’hier à la vaccination, mais ce qu’il faut préciser c’est que c’était un vaccin aluminique », indique-t-il d’entrée.

Le décor est posé, le Bisontin est vice-président de l’association d’Entraide aux malades de myofasciite à macrophages (E3M). Un combat qui l’occupe désormais à plein-temps. L’aluminium, jugé responsable de cette maladie, sert d’adjuvant pour provoquer la réaction immunitaire face à un vaccin dit inactivé, donc indétectable à lui seul par le système de défense de notre corps.

Et l’aluminium, « plus encore à faible dose curieusement », présente un risque certain « pour une frange de la population selon une étude que nous avons cofinancée avec l’État en 2013. Les professeurs Gherardi et Authier de l’Inserm de Créteil ont, eux, mis en évidence la maladie dans les années 90. Ils sont rejoints dans leur mise en garde par des sommités mondiales. Pourtant, du côté des laboratoires qui produisent les vaccins et du ministère de la Santé, c’est le déni ! »

Ce, à coups d’affirmations ne reposant sur « aucune étude de fond » et de sentences qui n’ont « rien de scientifique », estime Yves Ketterer. « C’est le même scénario que pour l’amiante. “S’il y avait un problème avec l’aluminium ça se saurait depuis 90 ans qu’on l’utilise”, nous répond-on », soupire M. Ketterer. « Pourtant, l’institut Pasteur a cessé de l’utiliser en 1960. C’était avant d’être racheté par Mérieux puis par Sanofi qui ont fait un choix industriel en ne conservant que leur ligne de vaccin sur aluminium. Ce, alors que des vaccins sur un adjuvant de phosphate de calcium fonctionnent très bien. Mais ce qui coûte cher dans un vaccin, ce sont en fait les antigènes et avec l’aluminium il en faut beaucoup moins. »

Alors, la loi sur les onze vaccinations obligatoires rend Yves Ketterer assez pessimiste. « On fait primer le bénéfice sur le risque. Risque que l’on se dispense d’évaluer. C’est une manière de balayer la question des adjuvants. Il existe un problème de confiance aujourd’hui envers les vaccins. Un sondage évalue la part des hésitants à environ 40 %. Ce n’est pas avec la contrainte et la menace que l’on rétablira la confiance envers les décideurs. On ne peut que radicaliser les choses. Je ne pense pas que ce soit le bon choix pédagogique, politique, comme en matière de santé publique. »

Le problème, évoque enfin M. Ketterer, qui plaide pour un usage « raisonné » de la vaccination, « c’est que ce qui se dit à la télé pour promouvoir une politique de santé n’est pas ce qui se dit dans un colloque face à des gens qui ont un tant soit peu d’expertise sur la question. »

 

 

Les défavorisés ont moins de caprices d’enfants gâtés

P.L.

Dr Catherine Monnet Médecin de la PMI du Doubs.

 

En tant que médecin départemental de la Protection maternelle et infantile du Doubs, que pensez-vous du passage de 3 à 11 du nombre de vaccins obligatoires ?

C’est une bonne chose. On peut objecter que les pays scandinaves n’ont pas cette obligation vaccinale, mais leurs populations ont un tel sens civique que plus de 95 % ont tous les vaccins recommandés. Il est dommage de devoir en passer par l’obligation, mais il faut à peu près 95 % de personnes couvertes pour assurer une immunité dite collective.

 

Quelle est la situation actuelle s’agissant des nouveaux vaccins qui vont être obligatoires et n’étaient jusqu’à présent que recommandés ?

Pour le ROR (rougeole oreillons rubéole), nous en sommes à 90,8 % d’enfants qui ont la première dose mais seulement 77 % qui bénéficient de la seconde. Or, c’est le rappel qui déclenche l’immunité mémoire et assure l’efficacité du vaccin.

 

Comment se situe la Franche-Comté par rapport au reste de la France ?

Nous sommes aussi mauvais que la moyenne nationale. Ainsi pour la méningite, nous n’avons que 68 % d’enfants à 24 mois. Il serait également important de vacciner les 15-25 ans qui sont des populations à risque, en témoignent les épidémies que l’on constate parfois dans les facs. Il y a aussi l’hépatite B où l’on n’est pas très bon : 88 % à l’échelon national et 87 % ici à avoir eu les trois doses. Il serait d’ailleurs bon que parents et médecins envoient aux services de PMI tous les certificats de santé. Car sur les 3 obligatoires (8e jour, 9e mois et 24e mois), si nous avons à peu près 98 % des 8ejour, nous n’avons que 80 % des 9e mois et seulement 66 % des 24e mois. C’est important, car c’est à partir de cela que nous évaluons l’état sanitaire de la population.

 

Observez-vous des disparités au sein de la population dans le rapport à la vaccination ?

Les quartiers les plus défavorisés ont moins de caprices d’enfants gâtés et sont mieux vaccinés. C’est dans les quartiers les plus bobos que l’on observe le plus de résistances, avec une vision individualiste et un oubli de l’aspect santé publique. Car on vaccine pour éviter des complications. Je dis souvent aux enfants que c’est une petite piqûre qui en évite plein de grosses à l’hôpital. Vous savez, en réanimation infantile, j’ai vu mourir deux enfants de complications de la rougeole en un an. Après cela, on ne peut plus être contre les vaccins.

 

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Consultation France Bleu – 11 vaccins obligatoires en janvier pour les enfants : qu’en pensez-vous ?

France Bleu vous donne la parole sur les vaccins. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale, présenté ce jeudi par la ministre de la santé, prévoit qu’en janvier, tous les enfants de moins de deux ans devront être vaccinés contre 11 maladies, au lieu de trois actuellement.

La décision avait été officialisée au creux de l’été par la ministre de la santé Agnès Buzyn : 11 vaccins seront obligatoires à partir du 1er janvier 2018 pour les enfants de 2 à 24 mois.

Vous adhérez à cette mesure ? Vous émettez des doutes quant à son efficacité ? Vous ne voulez pas faire vacciner votre enfant ? Dites-nous ce que vous pensez en répondant au questionnaire ci-dessous. Les résultats de cette consultation (qui n’est pas un sondage) nourriront un article qui paraîtra le 24 octobre, le jour où les députés commenceront à examiner la loi de financement de la sécurité sociale à l’Assemblée nationale.

https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/consultation-france-bleu-11-vaccins-obligatoires-en-janvier-pour-les-enfants-qu-en-pensez-vous-1506432705

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