Ecologistes au Parlement européen : Contre la finance, conquérir la démocratie

par Jean-Paul Besset, député européeen écologiste

 

Au Parlement européen, les écologistes ont obtenu un contrôle démocratique du Mécanisme Européen de Stabilité (MES) et une commission d’enquête sur la Troïka

Pour trouver une réponse unique et cohérente à la crise économique et financière, l’Union européenne a émis depuis 2009 des propositions visant à durcir la surveillance et la coordination budgétaire et économique (ce sont le Two-Pack et le Six-Pack). Elle a également improvisé des plans de sauvetage (Chypre, Grèce, Espagne), lancé des versements d’aide financière, transformé des forums de coordination (l’Eurogroup) en de véritables centres de décision et mis en place des équipes ad-hoc (Troïka) à la légitimité contestable. Ces efforts se sont avérés nécessaires et cruciaux dans la résolution des crises mais étaient profondément anti-démocratiques en ceci qu’ils ont marginalisé les représentants des citoyens (les parlements nationaux et le Parlement européen) : ce fut le cas notamment, et à des degrés divers, du Mécanisme Européen de Stabilité (MES) mis en place par l’Eurogroup et de la Troïka.

Grâce aux élus écologistes européens, qui ont constamment poussé pour la mise en place d’instruments de contrôle démocratique, ces mécanismes seront mieux encadrés et soumis à l’examen des représentants des citoyens européens : les députés européens.

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Le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) : vers une plus grande responsabilité démocratique

Créée à l’été 2012 comme un « Fonds Monétaire Européen », le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) est un fonds qui a pour objectif d’intervenir sur les marchés financiers ou dans des banques pour soutenir des Etats de la zone euro en difficulté (comme l’Espagne ou la Grèce, actuellement). Selon le traité MES qui détaille son organisation, il s’agit d’un fonds intergouvernemental, c’est-à-dire que la décision de verser une assistance financière à des pays en crise via ce MES est prise uniquement par des ministres des Finances de la zone euro, dans le cadre de l’Eurogroup.

Mais plus que les montants du MES, une question qui reste importante au vu de la résistance de certains grands États européens à les augmenter, ce qui préoccupe les écologistes, le point crucial pour les écologistes est celui du contrôle démocratique et du processus de décision. Le MES est gouverné par un Conseil des Gouverneurs, lui-même dirigé par le président de l’Eurogroup (en ce moment, le néerlandais Jeroen Dijsselbloem). Selon le traité MES, le Conseil des gouverneurs doit faire un rapport annuel accessible aux parlements nationaux et aux institutions européennes de contrôle des comptes. Dans ce cadre, aucun rôle n’est prévu spécifique pour le Parlement européen.

Autrement dit, les ministres des Finances de la zone euro peuvent mettre en commun des ressources financières immenses, les diriger pour un objectif spécifique, sans qu’ils soient collectivement responsables de leurs actes devant les citoyens.

Face à ce déni de démocratie, les Verts ont proposé nombre d’amendements visant à renforcer le contrôle démocratique du Parlement sur toute décision de « sauvetage » dans tous les textes sur la gouvernance économique (leTwo-Pack, la résolution du Parlement européen « Vers une nouvelle union économique et monétaire »). Suite à ces succès, l’esprit démocratique a insufflé progressivement les enceintes européennes. On a ainsi vu Klaus Regling, directeur général du MES, aller échanger avec les députés européens (au sein de la commission des affaires économiques et monétaires) et s’engager à répondre aux questions des députés européens, à leur procurer le rapport annuel et souhaiter que le MES soit intégré, à l’avenir, aux traités européens (donnant ainsi un vrai rôle au Parlement européen).

 

Le Parlement européen enquêtera sur les activités de la Troïka, symbole d’une technocratie sans visage et sans contrôle

Depuis les versements de montants massifs à la Grèce, au Portugal, à Chypre et à l’Irlande, les représentants des trois créanciers internationaux (le Fonds Monétaire International, la Banque Centrale Européenne et la Commission européenne) se sont de facto imposés comme seuls interlocuteurs des gouvernements récipiendaires de l’assistance.

En dépit de leurs analyses contestables et contestées des politiques d’austérité, en dépit de leurs désaccords internes, de leur manque total de légitimité démocratique (et souvent, d’expérience), les représentants de cette Troïka, technocrates inconnus, ont continué à imposer leurs conditions à des gouvernements élus et souvent acculés à des choix extrêmement difficiles (couper les dépenses, en particulier dans la santé et la sécurité sociale, augmenter les impôts, privatiser…).

Au sein du Parlement européen, et plus précisément de la commission des Affaires économiques et monétaires, les Verts, à force de persuasion et de pugnacité, ont obtenu la mise en place d’une commission d’enquête sur la Troïka. Cette commission, qui se réunira pour la première fois le 24 octobre 2013, devra mettre en lumière les effets des politiques imposées (et leur justification économique et politique) mais aussi poser la question de la légitimité politique de cette Troïka.

Si nous voulons faire de l’Europe un espace de démocratie et d’une prospérité nouvelle, il nous faut construire et conquérir cette démocratie jour après jour, dans nos assemblées et dans nos luttes. Grâce aux écologistes, les premiers jalons sont posés.

http://europeecologie.eu/Contre-la-finance-conquerir-la

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